Quinze ans de blog (ou mon confinement). (05/05/2020)

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Mars

 Dimanche 1er mars 2020

JCF, dans son bel appartement du cinquième, proche du Jardin des Plantes, et qu’il a dessiné lui-même. Son épouse, leurs deux bambins. L'artiste heureux et équilibré (en tous cas, l'image qu'il donne). Autour d’un thé japonais rouge accompagné de marrons glacés (tout est exquis, ici), nous parlons de nos « œuvres » qui ont en commun le foutraque, le digressif, le métaphysico-intime, la longueur et une certaine illisibilité. Mes guillemets à « œuvres » valent surtout pour moi, car lui est un vrai cinéaste (en plus d’être un homme accompli) et moi un faux écrivain (et un homme déchu). Mais comme d’habitude, discourir avec lui est délicieux – et d’ailleurs, je parle trop, me laissant aller à ma misère burlesque, racontant mon Beau Mariage avec X.(la plus grande déroute sentimentale de ma vie et un vaudeville psychique), mes incapacités d’amant, mon avenir littéraire quelque peu effondré, mon déclassement social qui s'est accéléré depuis la mort de mon oncle il y a deux ans. Dans sa discothèque, je repère deux vieux vinyles, La vie de Mozart raconté par Gérard Philippe dans la collection du Petit Ménestrel ainsi que les Brandebourgeois de Bach dans la version Kurt Redel, deux disques qui bercèrent mon enfance et dont les couvertures agissent sur moi comme deux madeleines. Le comble est que ces deux disques, me raconte-t-il, sont les rescapés d’un dégât des eaux d’il y a plusieurs années. Impossible de ne pas les mettre en parallèle avec mon propre mini dégât des eaux d'il y a un mois dans mon placard d'entrée et qui a failli emporter mes BD de collégien et coûté 177 euros de plomberie. Reliques du passé qui resurgissent chez cet ami cher et que je ne peux m’empêcher de prendre en photo. Ma vie pour une image. 

Bientôt 19 h. JC se rend à la cinémathèque pour voir un documentaire sur Godard tandis que je rentre au Suffren inaugurer mon nouveau carnet par une liste de mots magiques. 

 

Aura été

PARACLET

CITALOPRAM (1/2 tous les deux jours depuis le 20 février)

LES TILLEULS en avril

PÈRE BRUNE

IESHOUA / ZARATHOUSTRA

TOBIE / JUDITH / ESTHER

RAYMOND SEBON

AURORA CORNU / VAROISES ANNÉES 80 / LE ROY DÉGUSTE

DUKE FLEED

PASSIONS SCHISMATIQUES

The Mooche / Daybreak express / Sophisticated Lady

Cul-de-sac / The Ghostwriter / La Vénus à la fourrure

H.

 

50 ans cette année, ce qui ne sera pas mal pour un homme de mon âge.

 Reprendre le Hölderlin de Heidegger.

Accepter le cloporte en soi (via la réversion cher à Arnaud Villani dans son essai sur Kafka.) 

Et bien sûr, toujours défendre le pire. Matzneff, Woody Allen, Polanski - ce dernier attaqué de toute part par les viragos. Celui-ci aura eu toute sa vie à ses trousses la mort sous toutes ses formes : nazie, sataniste, féministe. 

(Même dans mon quartier, il y a un "Violanski", pouffiasses !)

 

 Pierre Cormary, le 1er mars à 22:43 Butch Cassidy et le Kid, ce soir sur Arte, chef-d'oeuvre qui a enchanté mon adolescence. Après tout ce qui se passe ces derniers temps, néo-féminisme punitif et mortifère, négationnisme du passé, abjection et ressentiment sans fin du nouveau monde contre l'ancien, j'ai le sentiment paranoïaque que c'est la dernière fois qu'on voit ce film qui, bientôt, sera interdit comme tous les autres et que les malheureux qui oseront encore l'apprécier seront exécutés comme Paul Newman et Robert Redford au dernier plan.

 

*

 

A propos de mon improbable roman.

« Puis-je appeler ce livre un roman ? C’est moins peut-être et bien plus, l’essence même de ma vie, recueillie sans y rien mêler, dans ces heures de déchirure où elle découle. Ce livre n’a jamais été fait, il a été récolté », écrit Proust dans Jean Santeuil. Et de rechercher « l’essence intime » de son livre.

Voilà, j’en suis à mon Jean Santeuil.

Soirée au Suffren avec Frédéric P. On commence par boire des bières, on finit par commander des pieds de cochon et on termine par du tiramisu aux fruits rouges. De quoi amortir nos vies, nos difficultés, nos antidépresseurs. J’évoque mes folies sociales. Il me conseille de « m’adapter ».  C’est un vrai ami, ce gars. 

Rêvé de Philippe Sollers !!! Il remontait l’avenue de Suffren, me reconnaissait comme si nous nous connaissions depuis longtemps, me prenait par la main (!!!) et m’amenait dans un bistrot. Là, il évoquait mon livre avec ferveur et me disait qu'il allait le publier. Je me réveillais bien. 

 

À PROPOS DU CORONAVIRUS.

Pierre Cormary - Je ne sais pas pour vous, mais moi, elle m'exalte, cette fin du monde. (Vendredi 06 mars 2020)

 

*

 

AVEC ALBINE 

 

-----E-mail d'origine-----

De: montalte <montalte@aol.com>

A: Albine F.

Envoyé le: Ve, 6 Mar 2020 17:40

Sujet: Mars et ça repart ! 

Ma belle Albine, il faut se rendre à l'évidence. Tel qu'il est, mon livre ne sera jamais publié. Deux amis qui s'y connaissent en édition et à qui j'ai donné à lire celui-ci en partie ou en entier me l'ont signalé, d'ailleurs ne faisant que reprendre les critiques que les maisons d'édition m'avaient déjà faites. Mon livre n'est pas un roman mais un mixe de roman, de récit, de chronique, de biographie, de Journal intime, de posts tirés de blog. Il ne relève pas d'un genre identifiable, manque cruellement d'unité et de structure, contient trop de livres, se révélant trop long dans son ensemble et trop court dans le détail - en plus d'apparaître, c'est la critique la plus cruelle mais aussi celle que je n'osais me faire depuis longtemps, bien trop anecdotique. Le personnage d'Aurora est fort mais les situations ne le sont pas toujours. On parle, on mange, on se raconte des histoires improbables et invérifiables, on est dans un virtuel somme toute fort limité et un réel indéfini, on digresse de manière infinie, on compense par le pur performatif, la verve forcenée et essoufflée, la formule toute faite. Comme me l'a dit Hervé W., j'accroche le lecteur "comme un poivrot au bar accroche ses voisins pour leur raconter à tout prix son histoire à la con". On est amusé au début, impatient au milieu, irrité à la fin, car enfin, rien de concret ne se passe et pire ne semble répondre à une nécessité supérieure (et pourtant...). Il y a trop de choses autour d'Aurora pour voir en celle-ci un mythe : Nice, Saint-Malo, le musée, Internet, la famille, etc. Non, ce que je semble avoir réussi, c'est le rapport au virtuel, au masochisme, à mon propre corps (« là-dessus, vous êtes insurpassable », m’a dit MH, le seul à avoir vraiment aimé et compris mon livre - mais hélas, les auteurs ne sont pas des éditeurs). Là, mon écriture trouve son sens et sa légitimité. Là, je trouve mes sujets, c'est-à-dire mes maux drolatiques. Mais le reste.... Donc, si je veux tirer quelque chose de ce gros machin, il faut que le refonde en plusieurs livres. Mais il est inutile de continuer à l'envoyer tel quel aux éditeurs.

 Bien sûr, je ne prends pas ces critiques comme parole d'évangile mais comme elles viennent de deux types en qui j'ai confiance, l'un ayant déjà été publié, l'autre en passe de l'être, je suis obligé de les prendre en compte - et de me féliciter que le Citalopram, l'antidépresseur que je prends depuis quinze jours, marche bien sur moi, car sans cela, je crois que je me serais effondré. D'autant que ce qu'ils me disent va dans le sens des critiques de Flammarion, du Rocher, du Dilettante et du reste, des nôtres quand nous en parlions. En vérité, Bruno et Hervé ont fait éclater les défauts de mon "grand-oeuvre" au grand jour et j'ai du mal à ne pas être d'accord avec eux, quitte à prendre mon celui-ci en grippe - me disant qu'il va falloir le reprendre à zéro et que je n'en ai ni l'envie ni le courage. Quant à écrire autre chose, pour l'instant, c'est exclu. 

Bref, me voilà au point zéro au deux sens du terme. 

Pour autant, non, pas encore. Les jours passant, j'ai beaucoup pensé à tout ça jusqu'à en avoir une sorte d'illumination (ou de ré-illumination) - qu'en effet, mon livre était peut-être raté de A jusqu'à Z mais plutôt réussi de A jusqu'à F (comme fouet !), de G jusqu'à R (comme Rohmer), de S jusqu'à Z (comme FanoutZa) et qu'avec un peu d'organisation, je pourrais facilement tirer trois récits plus courts, bien plus unifiés, et que je pourrais réenvoyer aux éditeurs. Une élégie roumaine, une épopée de fiascos, un polar virtuel. 

Que penses-tu de ce triple projet ? Pour moi, il m'enthousiasme assez et m’apparaît en fait comme l’aboutissement de mon travail depuis sept ans. Michel Tournier a bien mis dix ans pour écrire et éditer son premier livre. 

Si après coup, cela ne marche toujours pas, tant pis. Je doublerai la sérotonine et tenterai de passer à autre chose (j'ai quelques nouveaux germes dramatiques : portraits de gens bizarres que j’ai croisés dans ma vie et que je pourrais appeler « Mes Caractères » ; ma « Théologie noire » et bien sûr « Ma Part Archaïque »). J'en aurai de toute façon fini avec ce livre. Mais pour l'heure, il faut que j'aille jusqu'au bout du processus - celui-ci d'ailleurs ne pouvant excéder six mois, la date butoir étant en fait mes cinquante ans le trente juillet. 

Donc, reloaded. 

Sinon, je pense de plus en plus sérieusement à me faire un séjour chez toi, listant les hôtels intéressants sur Booking.com, repérant les plages, les paysages, les promenades, me finistérisant au possible. J'ai découvert Saint-Malo grâce à Aurora, je pourrais découvrir Concarneau grâce à toi.

Je t'embrasse très fort, te sers dans mes bras et retrouve de l'élan. 

À toi. 

Pierre

PS : bises à l'homme et à l'enfant.

 

-----E-mail d'origine-----

De: Albine F.

A: montalte <montalte@aol.com>

Envoyé le: Di, 8 Mar 2020 18:23

Sujet: Re: RE : Re: Mars et ça repart !

 

Mon Pierre,

Ton livre est riche, énorme, foisonnant et cela nous le savons depuis le premier jour. C'est la propriété de TOUS les premiers textes soumis à un éditeur, ou presque tous. Mieux vaut faillir à cause de la quantité qu'à cause de l'indigence. Après réflexion, je pense que tu as raison. Il y a un aspect collage dans ce texte. J'avais souligné le problème de la structure à un moment donné. Pour moi, cela tenait malgré tout à cause de la voix, la tienne. Mais je conçois le problème. Il serait titanesque et nécessiterait des allongements fous pour en faire un tout organique.  Qu'il y ait matière à plusieurs livres, oui, mais à condition de ne pas faire enfler ce que tu vas prendre par parties pour en faire des unités à part entière.

Ton livre est protéiforme, polymorphe, mais il a pour lui une voix singulière, unique. J'ai hâte de (re)lire le premier volume, qui est ma partie préférée de toute façon. Le  "Roy déguste", c'est autre chose, on en reparlera le moment venu... Mais "Qu'il est doux de battre un garçon", mille fois oui.

"Varoises", non selon moi. "Aurora" aussi, comme volume me plaît. "Le Roy" sera quelque chose de plus difficile, mais passionnant, il me semble si c'est bien remixé. Alors, oui, je partage ton enthousiasme et suis et serai là.

Je pourrai te conseiller pour un bon hôtel, confortable et pas trop cher à Concarneau et même le visiter pour toi avant que tu ne réserves. Tu n'auras pas de mauvaises surprises. Il y a des plages d'une beauté folle ici. C'est une ville désuète, paisible, violente aussi avec les tempêtes, un pays à part entière. Pas de voilées ni d'école coranique non plus. C'est plus que la France. Je me mets au breton. Tu y trouveras la paix et l'inspiration. Il y a beaucoup d'artistes ici et des bars intéressants. J'ai hâte de me promener avec toi dans mes endroits préférés. On pourrait passer du temps ensemble pour une fois.

Je te serre dans mes bras, mon ami. Aie foi. Je suis un peu sorcière, je te l'ai dit, tu seras publié.

Ton Albine

 

Zora la rousse à la place de Kundry ? (pour mon roman II)

 

*

 

Aurora qui m’accueille en peignoir rouge. Elle a attrapé la crève l’autre jour en allant chez son coiffeur. On sabre tout de même le champagne. Je la fais sourire et rire tant que je peux.  Je lui raconte pour la centième fois notre histoire à tous les deux. Je deviens le raconteur permanent de sa vie. Je lui fais mille compliments sur elle, sa beauté, son intelligence, ses poèmes, son monastère, son destin, ses maris. Elle me demande un moment « mais Aulrrel, il est vlrraiment molrrt ? ». Je tente de la rendre heureuse autant que je peux. Elle n’a plus que moi de drôle et de régénérant dans la vie. Comme on ne commande pas japonais pour une fois, je mange son saumon et son Bleu d'Auvergne en buvant son vin. Elle me demande plusieurs fois « et toi, tu vas bien ? ». Je lui dis que oui. Et d’ailleurs, c’est vrai. Je suis toujours heureux avec elle, quel que soit notre état.

 

*

 

Au Suffren avec Hugues M. Il trouve que l’idée des trois récits tirés de mon livre est très bonne. Et moi aussi, de plus en plus. M’y remettre au plus vite. Être écrivain me manquait. 

Cul-de-sac, de Polanski, ce soir. Quel chef-d’œuvre ! Je l'avais vu une fois il y a trente ans et ne l'avais pas forcément compris - bien que l'ayant gardé en mémoire dans le détail. Peut-être le meilleur de son auteur. Et Françoise Dorléac, nom de Dieu. 

Gabriel Nerciat - Oui, c'est l'une des plus grandes réussites de Polanski. Un film extraordinaire, qui dit tout sur la lâcheté et le burlesque d'une certaine bourgeoisie occidentale du milieu des Radical Sixties, et que seul un grand artiste venu d'Europe orientale pouvait sans doute réussir avec autant d'ironie, de cruauté et de finesse.

 

* 

 

Nouvelles démangeaisons au bras gauche comme si j’avais été piqué par une araignée ou pire par des punaises (des punaises !! Voilà ce que je crains mille fois plus que n’importe quel virus, car les punaises ne vous laissent pas mourir ni même dormir en paix.) Mal de gorge « habituel » depuis quelques jours. Mais pas de fièvre ni toux. Il n'empêche, je suis anormalement épuisé (Citalopram ? Changement de saison ? Coronavirus en germe ?). Vivement que cette quarantaine, que le gouvernement a promis, arrive au plus vite. Que tout s'arrête. Ce serait le bonheur.

 

 *

 

Jeudi 12 mars 2020 – Nocturne Galerie Seine.

Et maintenant, des bouffées de chaleur et des frissons (mais pas de fièvre) + ces picotements de merde, un reste de torticolis, des palpites et de la somnolence. Mon corps ne sera plus jamais tranquille.

À moins que cela ne soit mon âme qui fasse des siennes et dans ce cas, c’est plus rassurant. L’âme peut délirer tant qu’elle veut du moment que le corps va bien… Et si Dieu existe, qu’il s’occupe de nos corps plutôt que de nos âmes.

Avec ses extra-terrestres et ses satanistes, le Père Brune déçoit. J’avais adoré sa Fracture théologique (un Christ / deux christianisme) mais Le Christ autrement (le vrai sens de la Passion) ne mène à rien et ne dit rien. 

Comme je lui préfère Nietzsche, surtout en ses temps de peste. 

TOUT CE QUI SOUFFRE VEUT VIVRE. 

MINUIT, C’EST AUSSI MIDI. 

« TU ME PLAIS, BONHEUR ! REVIENS, INSTANT ! » 

TOUTES LES CHOSES ENCHAÎNÉES, ENCHEVÊTRÉES, AMOUREUSEMENT LIÉES. 

APOCATASTASE DES DEVENIRS. 

(Zarathoustra IV – 18)

 

Patoche Valot qui me fait la leçon sur mon mur. J’adore ce con de Valot, l’homme dur et dramatique, âpre et rugueux, le chrétien impitoyable qui prend la vie et le salut au sérieux, qui croit vraiment à la damnation et qui mériterait d’être damné rien que pour ça. Le type qui préfère périr plutôt que de renoncer à sa liberté de merde. Notre dialogue absurde. 

Pierre Cormary – Rien de plus exaltant que l'apocalypse (et le délicieux confinement.) 

Patoche V. - Attendez un peu de perdre le quart de vos amis, et vous effacerez ce post avec honte. 

Pierre Cormary – Cher vieux, sachez que dans mon cas, je pourrais aussi y passer, je suis objectivement une personne à risques.  

Patoche V. - "je pourrais aussi y passer" Moi, moi, moi. Pauvre tanche. 

Pierre Cormary – Eh oui, c’est comme ça que ça marche, que voulez-vous ? A chacun son irrationnalité. Mais entre nous, vous êtes vraiment complètement con quand vous vous y mettez. 

Manon de S. - Quand ne s'y met-il pas, que je repasse...?

 

Comme je préfère cette italienne magnifique qui, une bouteille à la main, chante sur son balcon avec ses voisins.

 

Pierre Cormary – Quel charme ! Quelle vitalité ! Quelle confiance en l'instant ! Civilisation du Décaméron, je t'adore. https://www.facebook.com/micol.nacamulli/posts/10156488330472126?__cft__[0]=AZWdTrH-AITNXqlY9tLyB4bciqY2JeSad4_i3SvaEukYJiOSj79E3dkC_l8qjwNYsiZgBY-Olpu6uFwRmdSg0r6L76coe6BjB0jcNlWn052R_WlveFlL6SFoDX9K4udqLjoaTyt5RzaP0q9xhXIC_XorYZO_1gxJEwkUm_JirUj4Lg&__tn__=%2CO%2CP-R

 

Personne, ce soir, à Orsay. Salles quasi vides. J’adore cette ambiance. 

22 h 15 – Carlsberg au Suffren. J’adore le Suffren. Arrive l’ami Laurent. J’adore Laurent.

 

 

Samedi 14 mars 2020

– 20 h au Suffren. 

CORONAVIRUS - ÇA COMMENCE VRAIMENT.

LA FRANCE FERME.

Hier, c’étaient les écoles, les universités, les théâtres… et les musées. 

A l'instant, déclaration d’Edouard Philippe : fermeture des bars et des restaurants ce soir, minuit  Je vais faire la fermeture avec eux, tiens. Derniers verres de Laborie, ce vin que j’aime tant : six ce soir, dont un offert par L., l’autre par la patronne..

 

Moi qui aime les rituels, je suis servi.

J’ai toujours voulu vivre un truc comme ça.

Le cancer mondial.

L’obligation de se confiner.

La détente cosmique.

L’apocalypse innocente.

 

Et c’est aujourd’hui, comme par hasard, que j’ai repris pour de bon mon livre.

 

*

 

Dimanche 15 mars 2020

 

Douce après-midi ensoleillée. Comme tous les parisiens inconscients, je sors profiter du soleil et aller faire mon devoir de bobo – voter Rachida Dati à mon bureau de vote, près de Saint-Léon. Puis, je vais lire le début du De Rerum Natura de Lucrèce au Champ-de-Mars. L’hymne à Vénus. « Que son corps sous ton corps ».

18 h 30 - Je m’invite chez Aurora, sans doute une dernière fois avant longtemps. Celle-ci m’accueille avec joie. Je nous sers le Telmont, m’installant à l’autre bout de la table, « comme autrefois », et pour respecter la distanciation sociale, comme ils disent. On parle du covid-19 en tentant d’en rire et d’ailleurs en en riant vraiment. Je la quitte vers 20 h et vais fumer mon dernier cigare en revenant chez moi. C’est la fin, Séraphin.

 

Lundi 16 mars 2020 – 6633 cas / 148 morts.

Ménage et lessive. Se faire tout beau tout net pour le virus. 

Encore des bouffées de chaleur ce matin et frissons cet après-midi. Je dois somatiser. Cette histoire commence à me rendre nerveux. Je me surprends à prendre ma température – mais je suis toujours à 36,2. Macron va encore parler ce soir et annoncer des « mesures exigeantes ». Chouettos. 

J’aurais bien voulu me porter volontaire demain pour le musée (car on a besoin de six agents pour veiller dans les salles vides) mais dans mon cas d’ex-cancéreux (et d'obèse ha ha !), c’est un peu délicat. J’ai bien conscience d’être une personne à risque et du reste je me prépare à être contaminé un de ces jours. Le ministre Blanquer a même dit qu’un Français sur deux serait infecté. 

Ko-Ko, de Duke Elligton – premier disque de cette quarantaine. 

20 h – Allocution d’Emmanuel Macron. Le confinement (mot qu’il ne prononce pas alors qu’il répète six fois « c’est la guerre ») commence demain. Mais on aura un droit de sortie pour s’aérer une heure près de chez soi. Ouf. 

Résumons : il faut en moyenne 14 jours (certains disent 20) pour que l’incubation du corona se fasse. Autrement dit, si j’ai été contaminé la semaine dernière, sinon hier (je suis allé voter, j’ai fait des courses, j’ai fumé mon dernier cigare), je devrais sentir les premiers symptômes cette semaine ou la suivante – et si le 1er avril, je n’ai toujours rien, cela signifiera que je suis passé à travers. Beaucoup moins de chance en effet de le contacter à partir d’aujourd’hui.

Je répète ça le lendemain sur FB. 

Pierre Cormary, le 17 avril –

Bon, à moi de faire mon petit bilan santé prévision.

Si je ne suis pas malade avant le 1er avril, cela voudra dire que je n'ai pas été infecté avant le 15 mars, ce qui ne serait déjà pas si mal (et si j'ai bien compris la phase d'incubation). Chaque jour m'éloignera un peu plus de la semaine dernière - semaine à risques, s'il en est.

Je suis allé au musée jusqu'au 12 et au Suffren jusqu'au 14.

J'ai fumé mon dernier cigare dimanche 15 au soir dans ma rue. J'ai également vu Aurora en début de soirée et nous avons bu du champagne, sans doute une dernière fois avant longtemps.

La semaine dernière, j'ai eu un début de rhinopharyngite (chronique chez moi) avec une (très légère) toux sèche et un petit mal de gorge (sans fièvre). Le mal de gorge a disparu et je ne tousse pratiquement plus (ou comme on tousse quand on pense à tousser, surtout en cette période de toux problématique.)

Non, mon seul souci est que j'ai encore quelques bouffées de chaleur et frissons dans la journée ainsi que des picotements sur le corps - mais je me demande si ce n'est pas une nouvelle forme d'angoisse, en plus des allergies de mars, le mois qui m'est depuis toujours le plus agressif de l'année. Je vis en effet très mal les volte-face météorologiques : froid/chaud, venteux/humide, comme je déteste généralement tout ce qui est instable. J'ai aussi pensé à l'andropause. C'est de mon âge.

En revanche, mes palpitations se sont amenuisées - quelques battements de deux trois minutes de temps en temps. Mes crises d'angoisses se font également plus rares. Mais ça, c'est sans doute dû au Citalopram (comme du reste les légères sensations de nausée qui l'accompagnent.) Ces antidépresseurs seront arrivés au meilleur moment et c'est ce que je dirai à mon psy vendredi sauf si lui ou moi ne nous annulons pas avant.

Ma mouche oculaire, "nervalienne", à l'oeil droit, due à l'intervention au laser de l'an dernier, et qui m'a bien torturé ces deux derniers mois (je ne voyais plus qu'elle, la salope), me tourmente beaucoup moins. Je ne la vois que quand j'y pense ou la recherche (en écrivant ces mots par exemple, mais dès que je suis à "par exemple", je n'y pense plus et elle n'est plus là.) A croire que le Corvitec a de vrais effets bénéfiques, ce dont je doutais au début et qui me contrariait quelque peu (surtout pour 48 euros non remboursés.) Il se peut aussi que mon cerveau s'y soit habitué et dans ce cas, je le félicite de sa capacité nietzschéenne d'approbation et d'appropriation.

Ayant fini ma relecture du Zarathoustra, j'ai repris Lucrèce. J'aime beaucoup son idée de la nature alphabétique, chaque atome étant comme une lettre et la nature comme un livre infini. Car s'il n'y a pas d'immortalité chez lui, il y a bien un infini*. Et cette idée m'est très douce.

[*Au sens strict, il n'y a pas d'immortalité de l'âme mais il y a bien une immortalité, voire une éternité de la matière, ce qui est tout différent. La mort est un terme mais il y a un retour éternel du vivant. Renouvellement plutôt que résurrection.]

Bien que réellement inquiet par la situation (et autant pour ses possibilités cliniques que psychiques - il y aura dans les semaines à venir un effet Shining à ne pas négliger, d'où l'importance de faire le tour de son avenue une fois par jour), je trouve assez formidable d'avoir un ou deux mois à disposition.

Mon programme est ainsi conçu : lever 8h ; écriture de 09 h à 13 h (reprise de mon livre en trois livres, je vous en reparlerai...) ; déjeuner léger et sain ; sieste, lectures et posts (sur Shakespeare, pour commencer et si cela vous dit...) ; promenade autour de chez moi vers 18 h ; dîner sobre devant Hanouna,  Zemmour ou L'Heure des pros 2 (j'adore cette émission de beaufs populistes roboratifs) ; DVD de Polanski ou de Welles de 21 h à 23 h ; coucher minuit, petite prière orthodoxe (je m'étais promis, comme à chaque carême, un psaume par jour mais c'est un peu dur...).

À part ça, il me faudrait de nouvelles pantoufles.

 Blanche Dubois - En fait tu kiffes. 

Pierre Cormary – Et j’ai honte.

 

Rêvé d’André Parrat, mon ancien prof d’histoire-géo de terminale à Saint-Exupéry, mort depuis bien longtemps. Il était très élégant et se promenait dans la rue.

 

Mercredi 18 mars 2020 – 9134 cas / 264 morts.

 

Promenade autour de mon quartier. Palpites de joie. Deux mois comme ça. Deux mois innocents.  

Je découvre la télé-vidéo sur WhatsApp avec Anne, Didier et Sophie. Rires cathartiques.

Mon cardiologue m’appelle pour me donner, un peu dramatiquement, les résultats de mon Holter. Cette fois-ci, fini de rire. Je fais bel et bien de l’arythmie et avec le risque de me faire des caillots de sang au cerveau, une embolie pulmonaire et un AVC. Il m’envoie en mail un nouveau traitement beaucoup plus lourd et que je dois commencer dès ce soir. 

Je vais tout de suite acheter ça à ma pharmacie Fréva et me rends compte en effet, en lisant les notices, que les effets secondaires sont terrifiants (risques de saignement, de nausée, de grosse fatigue, de troubles du goût et de l’odorat et de complication oculaire – oups !) et surtout que ces médocs sont incompatibles avec le divin Citalopram.  Merde. Je rappelle cardiologue et psy pour leur demander conseil. 

 

*

 

Le lendemain, la secrétaire du docteur O. me rappelle pour me dire que oui, je peux continuer à prendre mon Citalopram (un demi comprimé tous les deux jours) avec mon nouveau traitement. Soulagement total.   

Pour fêter ça, je m’offre une bouteille de Peyrat-Fourthon et me fais un gigot plein d’ail (après tout, on est le 20, la fin d’une décade, etc…).

 

*

 

Beaucoup de mal à tenir mon Journal comme je le devrais – et même à faire des posts sur FB. Ces temps de détresse ne m’inspirent guère – à moins que cela ne soit mes antidépresseurs qui retiennent mon inspiration, phénomène qui a commencé dès la semaine de leur première prise. Ils créent une sorte d’insouciance forcée où l’on se fout de tout et où on a un mal fou à se concentrer. Cette première semaine de confinement se termine et je n’ai pas tant écrit ni lu que ça. En fait, j'ai perdu beaucoup de temps. Mais je crois que c’est un peu l’attitude générale – Sophie me le  disait tout à l’heure au téléphone : avec JM, ils s’étaient programmés un festival DVD très fourni et aucun film ne retient leur attention. De même, beaucoup de gens, parmi mes contacts, ont du mal à se divertir. On se jure de relire tout Balzac, tout Proust et tout Musil et on peine à dépasser la page trois, comme si quelque chose nous retenait, comme si on était tous dans l’attente. 

Non, la seule bonne chose que j’ai réussi à faire aujourd’hui, c’est d’avoir écouté le premier disque du Macbeth de Verdi sur mon canapé et en suivant le livret et les analyses de mon Guide des opéras de Verdi comme lorsque j’avais vingt ans. Et ce soir, je me refais le Macbeth de Welles. 

Et je fais de beaux rêves. 

Pierre Cormary - Trois rêves, cette semaine.

Je croisais dans la rue (à Sainte-Maxime ? Saint-Raphaël ? Nice ?) mon ancien professeur d'histoire-géo de terminale de Saint-Exupéry, mort depuis bien longtemps, "MONSIEUR PARRAT", sorte d'Orson Welles provençal à la voix de stentor et qui nous en imposait tous - même aux fortes têtes de la classe, ce dont j'étais bien aise (j'ai toujours été du côté des profs contre les cabochards). Cours marxistes captivants, et une fois par an, un cours spécial sur les fromages ou les vins de France ("mais qu'euh-ceuh queuh c'est queuh ces élèveuh nulleuh en cultureuh oeuneuhleugiqueuh ? Vous veuhnez tousseuh de Tataouineuh ?"). Dans le rêve, il était très élégant et semblait répondre à une interview télé sur le covid-19 avec tout le sérieux de notable de Saint-Raphaël qu'il était, ayant fait une campagne électorale désastreuse dans le temps mais s'occupant de moult associations de la ville, et considéré comme une autorité morale et culturelle. Ce qui m'a perturbé dans ce rêve n'est tant pas le rêve lui-même (au fond sécurisant, les années 80, le Var, la Vierge Noire, Twin Peaks et Aldona Fontana) que le réveil ce jeudi 19 mars 2020, troisième jour du confinement. Qui aurait cru ça à cette époque ? Qu'en 2020, on allait se retrouver au Moyen Age ? Adieu nos anciens repères, adieu l'ancien monde.

Le second rêve est une féérie qui tourne mal. Je retrouve Ava Prackowiack à une séance de Fanny et Alexandre d'Ingmar Bergman (!!!). Elle est enceinte et en compagnie d’une amie commune qui m'aime beaucoup. En froid avec Ava depuis quelques années, je les salue discrètement et vais m'installer dans une rangée éloignée de la leur - quoique ravi de penser que l'on va peut-être se retrouver après la séance car notre amie commune, qui ignore notre brouille, ne va pas manquer de nous proposer un verre. Et en effet, après le film, celle-ci (dont j'ai complètement oublié l'identité) nous invite au bar d'à côté. J’acquiesce joyeusement. Ava plus circonspecte, accepte aussi - et je me dis que nous allons enfin pouvoir nous réconcilier, notre brouille n'étant dans mon esprit qu'un malentendu ridicule. Mais en entrant dans le bar, elle se retourne vers moi avec humeur et me met en garde : "ce n'est pas parce que nous allons partager ce moment avec notre amie que cela vous donne le droit d’écrire sur moi dans votre roman à venir." Mais comment sait-elle qu'elle y est ? Je suis tétanisé.

Le troisième rêve (fait cette nuit) tourne mieux. Je suis à Nice sur la promenade des anglais dans l'exaltation la plus totale, sûr d'échapper au Covid malgré le monde qu'il y a. Et brusquement je me dis que si je vais y échapper, contrairement à tous ces gens, c'est qu'eux sont en 2020 mais que moi je suis en 1990, que j'ai basculé dans le temps passé (le lycée Masséna, la khâgne, et toujours Aldona Fontana) et que rien ne pourra m'arriver dans ce passé. Mais pourrais-je un jour revenir en 2020 ? Beau crépuscule sur la baie des anges. 

Pascal Z. - Le deuxième est rohmerien en diable. 

Raphaël J.- Tu m'énerves, tu fais toujours des super rêves, moi les miens ils ressemblent à rien... 

Gabriel N. - Pas de doute : c'est l'écriture de votre roman, peut-être intensément réactivée depuis le confinement, qui travaille votre inconscient. Mais l'interprétation du dernier rêve est très juste : il me semble que ceux qui possèdent la faculté de ne pas appartenir totalement au temps présent survivent mieux aux épreuves et aux tragédies que les autres. Ceux qui pensent plus souvent aux morts que les autres aussi. La seule fois de ma vie où j'ai été gravement malade, j'ai été certain de m'en tirer à partir du moment où ma grand-mère et mon père sont venus me visiter en rêve.

 

*

 

Pierre Cormary, le 23 mars –

Surveiller et punir.

Culpabiliser tout azimut.

Interdire toute légèreté.

Bien comprendre qu'on doit en baver (le vieux fond catholique français.)

Souffrir moralement par solidarité avec ceux qui souffrent physiquement (mais ça sert à quoi, bon Dieu ?).

Infantiliser et abrutir.

Prétendre que ce dont on manque est inutile (cette histoire de masques est proprement surréaliste - cela me fait penser à ce gag du Charme discret de la bourgeoisie de Bunuel où un barman avoue tranquillement à ses clients que le bar n'a plus de café ni de thé) alors que lorsqu'on en aura (des masques, des tests de dépistage), ils seront obligatoires.

 

Il paraît que les gens du groupe sanguin O+ sont moins susceptibles d’être contaminés que les autres. J’en suis.

 

Mardi 24 mars 2020 – 82 ans de ma mère

 

Pierre Cormary - Dans Macbeth, c'est ma scène préférée, ce moment où le petit Macduff apprend par sa mère que son père les a abandonnés, elle et lui, en plus d'avoir trahi le roi.

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"LE FILS – Mère, mon père était-il un traître ?

LA MÈRE – Oui, c’en était un.

LE FILS – Qu’est-ce qu’un traître ?

LA MÈRE – Mais, quelqu’un qui jure et qui ment.

LE FILS – Et sont-ils des traîtres tous ceux qui ont fait cela ?

LA MÈRE -Tout homme qui le fait est un traître et doit être pendu.

LE FILS – Et doit-on pendre tous ceux qui jurent et mentent ?

LA MÈRE – Tous.

LE FILS – Qui doit les pendre ?

LA MÈRE – Les honnêtes gens.

LE FILS – Alors les menteurs et les jureurs sont des imbéciles, car il y a assez de menteurs et de jureurs pour battre les honnêtes gens et les pendre."

Ce qu'il y a de très subtil et de très émouvant dans ce bref échange est que l'enfant veut à tout prix protéger son père de la médisance maternelle et puisqu'on veut le persuader que celui-ci était un traître, il prend alors le parti des traîtres contre celui des honnêtes gens. Non par malice ou perfidie mais par loyauté envers un parent qu'on démolit à ses yeux. Et du coup, il renverse l'ordre social et la morale des honnêtes gens - au nom de l'amour. Il me semble que cette attitude est bien souvent la nôtre quand nous voulons sauver un être aimé du jugement social, familial, sinon du jugement de Dieu lui-même. Être du côté du "méchant", c'est toujours être du côté de quelqu'un qu'on n'a pas cessé d'aimer malgré ce qu'il a fait (ou qu'on suppose qu'il a fait) et qu'on veut sauver envers et contre tout. On est prêt à sacrifier la morale commune ou divine (les deux promettent l'enfer) et peut-être même perdre son âme plutôt que perdre l'être aimé et pire le voir se perdre. Un peu comme la fameuse phrase attribuée à Albert Camus qui pulvérise l'horrible morale kantienne : "je préfère ma mère à la justice". Le petit Macduff préfère son père aux honnêtes gens, c'est pour lui une question de survie et il a bien raison (et même s'il périra assassiné à peine plus loin....  en voulant protéger sa mère.)

(Extrait de Macbeth, BBC 1983)

 

 

Pierre Cormary

le 24 mars à 12:20 ·

Bientôt, ce ne sera plus "mon voisin est juif" mais "mon voisin est sorti."

 

Au téléphone avec Cécile B. Chloris G., Clara S., Charles D. (les « C »), et toujours Didier et Anne.

 

Mon Macbeth ou la double peine en ligne.

 

Promenade avenue Lowendal, Tour Maubourg, École militaire, Champ de Mars (je me fais contrôler mais mon attestation est bien datée et signée). 

Je visionne une seconde fois le fort kubricko-polanskien moyen métrage de Sam Azulys, My Little china girl.

 

 

Pierre Cormary

le 27 mars à 21:22 ·

 

La vraie peur, ce n'est pas d'être contaminé mais de ne pas être hospitalisé si on l'est

 

 Avec Franck A. à qui je raconte ma catastrophe psychique de janvier et la dépression qui s’en est suivie. Selon lui, être déçu par ce que l’on croyait être son salut et son désir est forcément traumatisant. On se dit malgré soi que l’on ne sera jamais heureux et que l’on est condamné à ses frustrations. Assez juste explication. Il me conseille de retrouver les traces d’Isabelle L., mon grand amour ultra platonique du musée dans les années 2000. Je doute qu'elle veuille renouer mais je vais tenter.    

Le Roi Lear BBC, ce soir et La Soupe aux choux, de Jean Girault avec Louis de Funès et Jacques Villeret, cet après-midi. On est vraiment peu de chose.

 

*

 

Avec D. – le pauvre s’emmerde dur en cette période et m’appelle tous les jours à l’heure du pain. Aujourd’hui, nous évoquons nos cinquante ans qui arrivent, notre passé, nos années Nice et Saint-Raphaël, Saint-Exupéry, Parrat, Oheix, Guigonis, Aldona Fontana – « tout cela, c’était la semaine dernière », lui dis-je. Il n'est pas si convaincu. Nos vies ont-elles été réussies ? La sienne, certainement. La mienne n’a jamais réellement commencé même si j’ai fait ce que j’ai pu. « Comme disait George Marchais, ce n’est pas un bilan globalement positif mais un néant globalement positif. »

 

Tiens, Patrick Devidjan est mort.

 

Ma blague FB du jour :

 

Pierre Cormary

le 29 mars à 17:10 ·

Public

En plus, aujourd'hui, il ne fait pas beau, on ne peut même pas sortir.

 

 

Alexandra F. contaminée depuis trois jours. Pas de fièvre, quelques courbatures, grosse fatigue et vraie difficulté à respirer. Elle est chez elle, attend que ça passe (tout se joue entre le sixième et le dixième jour), évitant mari et enfant. Ambiance lourde. Elle devrait évidemment s’en sortir, mais quelle angoisse ! Ma pauvre camarade d’hypokhâgne…

 

Mardi 31 mars 2020

 

Aujourd’hui, les « H » et les « I » :

Hélène F.

Hervé M.

Hervé W.

Hugues M.

Ioana A.

Isabelle C.

Isabelle K.

(Mais Isabelle L., à qui j'ai écrit comme me l'avait conseillé Frank, ne me répond pas comme prévu.)

Je trouve enfin ma vitesse de croisière. Lever vers 08 h 30 (citron tiède, décoction de gingembre au miel avec trois biscuits Bjorg bourrés vanille), écriture  jusqu’à 13 h, téléphone après le déjeuner de 14 h à 16 h, lecture et annotations jusqu’à 19 h, promenade, dîner, cinéma le soir. Opéra le week-end. Réécouter mes douze Verdi

Ce soir, Le Locataire, de Polanski, que je n’avais pas vu depuis des lustres mais dont je me souviens de presque de chaque image. Quel filmeur, ce Roman ! Et quel personnage ! Quel destin ! L’un des plus tragiques et les plus résilients qui soient. Violeur ou pas, l’homme m’émeut énormément.

 

 

Avril

 

 

Mercredi 1er avril 2020 - 56 989 cas / 4032 morts.

 

Aujourd’hui, tour des « J » :

Jacques-Pierre A., toujours heureux à Saint-Malo.

Jean-B., toujours dans les signes généalogiques (sa mère est morte le jour de son anniversaire).

Jean-Rémi G., qui devient le syndicaliste que l’on s’arrache partout, surtout chez Pascal Praud.

Jérôme V., toujours dingue (il a découvert le Scrabble et est content d’apprendre grâce à moi un nouveau mot : arythmie qu’il ne faut pas confondre avec eurythmie.)

Joseph V, toujours à Clermont-Ferrand et qui me conseille, entre autres, Ramsay.

 

*

 

Quelles sont vos héroïnes dans la vie réelle, demandait Marcel Proust dans son fameux questionnaire ? Mais les femmes qu’on n’a pas eues, bien sûr.

 

*

 

Mes deux nouvelles rubriques FB :

« Changeons d’air », où je mets en lien un morceau de Duke Ellington.

« La promenade », où je poste photos et vidéos de mon heure de marche, aujourd’hui, remontée de l’avenue de Suffren jusqu’au quai Branly, redescente du boulevard de Grenelle par Bir-Hakeim.

 

*

 

J’ai objectivement maigri ! Avec ce confinement, je me refais une santé. Dingue.

 

 

Pierre Cormary

Le 04 avril, à 18 h 45

 

Je ne sais pas pour vous, mais le week-end, c'est encore mieux. C'est la parenthèse dans la parenthèse.

 

Elle a une vraie classe, cette Élizabeth II. Le discours d’une reine.

Je dis à Aurora de prendre exemple sur elle. Elle me répond que depuis quelque temps, elle voit des « yeux d’animals punis » dans sa chambre. Hallucinations ? Superstitions de son pays ? Drogues qu’elle prendrait en douce à son âge ? Effrayants, en tous cas. Pour le reste, elle se nourrit à peine, dort toute la journée et attend sa mort. Quand je lui dis qu’on va bientôt arriver aux dix mille morts, elle me répond : « oh ils ont de la chance, eux. » Elle me fait répéter le nom de cette maladie : « Le coronavirus. – Oh melrrde ! C’est mon nom. »

 

*

 

Excellent Ghostwriter de Polanski.

 

*

 

Avec les «  R » :

Rémi S. (de l'AS).

Raphaël B. (d’Angers).

Raphaël J. (de Laval).

Richard A. (du musée).

Rachel B. (de M.)

 

« La Promenade » à Beaugrenelle, immeubles sinistres sous le ciel gris mais qui ont malgré tout un certain charme. Tout me paraît beau, bon et vrai en ce moment. « Le plus beau printemps de ma vie », me disait Anne Putiphar. Le mien aussi.

 

Pierre Cormary

le 7 avril à 13:14 · 

 

 Confinés malheureux et confinés heureux - surface et profondeur.
(Oui, je sais, ça fait merdeux mais pas pu m'en empêcher.)

 

 

Le Polanski du jour : La Jeune fille et la mort.  Scénario très commun sublimé par la mise en scène. 

Dans le De Rerum de Lucrèce, je lis ce passage où même s’il les confond le plus souvent, il fait quand même la différence entre âme et esprit. Celui-ci pense par lui-même et a sa vie propre, heureuse ou malheureuse, qui ne touche pas forcément l’âme – qui elle, peut être en paix en dehors de lui. Voilà qui me plaît infiniment et me résout un épineux problème. Mon âme peut être innocente alors que mon esprit peut être coupable – ou se croire tel. Mon âme peut être sauvée alors que mon esprit se persuader qu’il est damné. Bon, je force un peu Lucrèce mais peu importe, cette distinction âme/être et esprit/pensée me donne du baume au cœur. L’esprit peut être en enfer alors que l’âme est au paradis. Je peux être en même temps torturé et serein.

À rapprocher de cette phrase de Rozanov dans Esseulement :

« Extérieurement, je suis déclinable. En moi-même (subjectivement), je suis absolument indéclinable. Je ne m’accorde pas.  Un adverbe en quelque sorte. »

 Et ce soir, j’ai une petite illumination. Je me rends compte que si je ne peux plus supporter la foi chrétienne pour moi, je peux très bien la supporter pour les autres et même prier pour eux. Du coup, je me fais un petit recueillement catho-orthodoxe qui me met dans un état de douceur et de réconciliation totale avec Dieu – et comme si mon acédie de ces derniers mois était terminé. Peu importent le jugement dernier, l’enfer, les horreurs divines puisque je prie pour les autres, ce qui me fait du bien à moi aussi. Et donc, je prie aussi pour moi. Vive Dieu et mon moi impénétrable !

 

*

 

Deux heures au téléphone avec R., une de ses femmes-fouets qui m’enchante et me donne à croire que je ne suis pas foutu (alors que si, mais peu importe). Passionnante discussion socio-culturelle. Elle m’excite, m’émeut, m'apaise - que puis-je demander de plus à une femme ? 

Promenade autour de Saint-Léon. Cierge à Saint Antoine de Padoue. 

Oliver Twist, de Polanski. Très beau.

 

Mercredi saint 08 avril 2020 – 1,5 M de cas / 10328 morts.

On a donc dépassé les dix-mille morts.

Et on a perdu six pour cent de PIB.

Mais Alexandra est saine et sauve ! Entre étouffements et courbatures, sa semaine fut rude mais elle s’en est sortie et reprend ses ballades dans la forêt de Chantilly dès demain. Merci Dieu. 

« La Promenade » entre Breteuil et Ségur. Les sportifs attaquent. Riche idée que de leur avoir interdit le footing la journée ! Résultat, ils le font tous à 19 h et on risque de s’en prendre un dans la gueule. 

Malgré ça, euphorie persistante. Sérénité épicurienne. Et douceur de la foi retrouvée.

Comme je le dis à mes amis, cette période mortifère est unique. Le temps s’est figé, l'espace s’est limité, la vie s'est suspendue. Ce ne sont ni des vacances ni un arrêt-maladie mais une autre forme de repos, de renaissance, de recueillement. Et moi, je me refais une santé tout de bon, clinique et financière. Huit jours que je n’ai pas bu une goutte d’alcool et que je carbure au citron, au gingembre et au kiwi. La sobriété nous remet dans la durée et la beauté des choses. On s'enivre de réel. On redécouvre des sensations oubliées depuis… l’adolescence. Tout redevient auroral, matinal, natal.

 

 

Pierre Cormary

le 8 avril à 10:36 · 

Finalement, je n'aurais pas été si mal dans un pays totalitaire.

 

 *

 

Jeudi saint 09 avril 2020

 

Excellentissime papier de Sylvain Tesson sur le coronavirus, le confinement et la fracture littéraire.

« Un nouveau dogme s’institue : tout doit fluctuer, se mêler sans répit, sans entraves, donc sans frontières. Dieu est mouvement. Circuler est bon. Demeurer est mal. Plus rien ne doit se prétendre de quelque part puisque tout peut-être de partout. Qui s’opposera intellectuellement à la religion du flux est un chien. Le mur devient la forme du mal. Haro sur le muret. »

« [Le virus] est comme le tweet : toxique et rapide. La mondialisation devait être heureuse. Elle est une dame au camélia : infectée. »

« L’humanité réagit très vite. Marche arrière toute ! Il faut se confiner ! Un nouveau mot d’ordre vient conclure brutalement le cycle global. C’est une injonction stupéfiante car sa simple énonciation incarne ce que l’époque combattait jusqu’alors, et le fait de prononcer ces mots avant leur édiction officielle faisait de vous un infréquentable : « restez chez vous ! ». »

« L’effondriste fondamentaliste annonce l’enfer de Bosch et fait des stocks de pâtes. Aujourd’hui, beaucoup se frottent les mains : « Nous l’avions bien dit ! » Aucun n’avait pourtant vu que le coup d’arrêt proviendrait d’un petit animal qui ressemble à un panzer vêtu par Paco Rabane. »

«Soit nous réussissons à faire de cette traversée du temps retrouvé une expérience proustienne (mémoire, pastille à la bergamote, exercice de la sensibilité), soit c’est le vrai effondrement : celui de soi-même. Heinrich von Kleist dans Michael Kohlhaas donne une clef : « du fond de sa douleur de voir le monde dans un si monstrueux désordre, surgissait la satisfaction secrète de sentir l’ordre régner désormais dans son cœur ». À chacun est offerte une occasion (rémunérée) de faire un peu d’ordre en son cœur. »

«Une inégalité immédiate se révèle. Certains ont une vie intérieure, d’autres non. J’éprouve de la compassion pour ceux qui passeront ces journées loin d’un jardin. Mais j’en ai aussi pour ceux qui n’aiment pas la lecture et ne « se doute[nt] pas le moins du monde qu’un Rembrandt, un Beethoven, un Dante, ou un Napoléon ont jamais existé », comme l’écrit Zweig au début du Joueur d’échec. On peut savoir gré au président Macron d’avoir lancé dans son discours du lundi 16 mars le plus churchilien mot d’ordre : « Lisez. » C’est tout de même plus beau que « Enrichissez-vous » de Guizot. »

« Nos sociétés sont bien outillées pour les catastrophes. Ainsi des époques. Dans l’Histoire de France, il y a eu des temps bâtisseurs (XII ème siècle), conquérants (Premier Empire), artistiques (Belle Époque). À présent, nous sommes doués pour éteindre les brasiers. La dégradation de l’ordre ancien s’accompagne de l’augmentation des moyens d’urgence. Reconnaissons cela à la modernité : nous savons nous activer sur les décombres. Définition du progrès : amélioration des services de réparation du désastre. »

« Les civilisations s’étaient fondées sur quelques principes : séparation, séclusion, distinction, singularisation, enracinement. Confinement, quoi. »

 

*

 

Fin de ma lecture du livre III du De Rerum. C’est drôle comme Lucrèce peine à convaincre de la mort de l’âme. Plus je lis, plus j’ai envie de croire en Dieu. Et plus je crois en Dieu, plus j’ai envie de le lire. Les passions schismatiques, comme dirait Matzneff. 

Promenade jusqu’à Saint François-Xavier, et toujours plein de sportifs. Je passe rue Chevert où habite Anthony P. et l’appelle au cas où il serait chez lui et qu’il pourrait me faire un signe par sa fenêtre, mais il n’est pas là. En rentrant, je croise l’ami Laurent, mon compère du Suffren, qui rentre chez lui. On discute un peu à deux mètres. Lui trouve tout cela effroyable et moi formidable. 

Soirée 7ème compagnie puis Dix commandements « sur Facebook. »

 

Pierre Cormary

Jeudi 09, 21 h  

Bon. Tout le monde est prêt pour le
Full Metal Jacket
français ?

 

 

Je tombe ensuite sur Les Dix Commandements.

 

Pierre Cormary – Oh putaingue !

Pierre Cormary – N'empêche que ce fut mon premier film préféré de tous les temps à huit ans. Ça m'a appris le cinéma. Et après j'ai vu 2001 (la suite.)

Pierre Cormary – Je l'aurais fait. Filmer LA scène de mon Samsung. Filmer l'infilmable. Enregistrer Celui qui dit qu'Il Est sur mon mur. Après ça, je peux me retirer de Facebook. [Scène de la mer qui s’ouvre.] 

Pierre Cormary – « TU NE FERAS PAS CHIER. » [Scène des tables de la loi].

Pierre Cormary – Mince, c'est déjà fini. C'était trop bien. Bonne nuit tout le monde. Pensées gethsémaniennes.

 

Vendredi saint 10 avril 2020

Pierre Cormary

On est utérin ou on ne l'est pas.

 Mon premier yoga avec Anne, ce matin, sur mon tapis, par écran interposé. Je découvre quelque chose, là – et qui comme tout le reste en ce moment arrive au bon moment. Je lui fais un don de cinquante euros pour la peine.

 Fin de mon premier cycle d’appels téléphoniques par ordre alphabétique avec Thibaut S., Xavier B. et Yacim B. Je recommence avec les "A" lundi. 

Promenade au Village Suisse. Après les applaudissements de 20 h, des gens chantent Aux Champs-Elysées, de Joe Dassin. Eh ben, moi, n'en déplaise aux mauvais coucheurs, je trouve ça infiniment sympathique. De sa fenêtre, je reconnais madame C., la mère de Carole et Florence du Suffren. On se parle à quinze mètres. 

La Vénus à la fourrure, de Polanski. Très grand petit film. Mon préféré, évidemment. Quand Emmanuelle Seigner susurre à l’oreille d’Amalric « avec un chat »…. Je n’aurais pas vécu grand-chose mais j’aurais bcp frissonné en rêve.

 

Samedi saint 11 avril 2020 

En écoutant Répliques consacré à Flaubert, ce titre de poème de Hugo dans La Légende des siècles qui fait tilt : PUISSANCE ÉGALE BONTÉ. 

 

Dimanche de Pâques 12 avril 2020

Pierre Cormary

 

 IL EST VRAIMENT RESSUSCITÉ !
Dans l'histoire des croyances, c'est quand même la plus belle et moi j'y crois encore. Fête à vous.

 

Mercredi 15 avril 2020 – UN MOIS DE CONFINEMENT. 

Assurément, l’une des meilleures périodes de ma vie et qui est en écho avec mon année de chimio en 2016 où je fus heureux comme jamais pendant neuf mois. Je suis fait pour les Epoché 

Coup de fil d’Hervé W. qui se propose de m’envoyer des masques en tissu cousus main par sa compagne. Avec ceux d’Astrid qui m'en a envoyé il y a deux jours, je vais être paré. 

Avenue de Suffren, je rencontre de nouveau l’ami Laurent qui m’apprend que Hervé, le restaurateur du Septième vin, avenue Bosquet, propose des repas à emporter tous les midis et soirs. J’irai, tiens. Cette nouvelle vie est fantastique.

La merveilleuse H. au téléphone. On parle de Dieu, de foi, de beauté, de création. Elle m’écoute avec beaucoup d’attention et me rend éloquent et même séduisant.

 

Jeudi 16 avril 2020 

Ce brave idiot de R. qui ne peut plus me supporter à cause de mon « macronisme » et qui écrit que mon « esprit critique » a été ravagé. Moi, ce sont les « esprits critiques » de son acabit que je ne peux plus supporter. Mais on reste amis ha !

 

Pierre Cormary

Rien de plus grossier, obtus et à côté de la plaque qu'un "esprit critique".

 

 

Le marathon téléphonique continue : « E », « F », « G ». 

Reçu mon coffret Amazon de La Force du Destin, de Verdi. 

On a retrouvé la septième compagnie, sur la deux. Regarder ces films est devenu un acte civique. Du rire résistant et patriote. Alors rions. 

 

Samedi 18 avril 2020

Apologie du confinement sur FB.

 

Confinement - il y a les gens qui kiffent et les gens qui ne kiffent pas. Et c'est pire que la lutte des classes.

 

"RESTEZ CHEZ VOUS" - punition pour les uns, bénédiction pour les autres.

 

Confinement - la revanche des asociaux, le triomphe des misanthropes, la victoire des contemplatifs.

 

"La paix était totale, le silence absolu. C'était un moment merveilleux."
(Michel Houellebecq, La Poésie du mouvement arrêté.)

 

- Vous dites ça parce que vous êtes un putain de fonctionnaire.
- Eh bien, devenez-le.

 

Dans la fable de La Fontaine, Le Chien et le loup, je suis le chien et m'en félicite. Loup libre, je n'aurais pas tenu une minute.

 

Brian Dennehy, le flic de Rambo mais aussi l’architecte Kracklight, brisé par la vie dans Le Ventre de l'architecte, de Peter Greenaway, est mort.

Mon premier 7ème vin, le restaurant de Hervéet de Stéphanie qui proposent des plats à emporter. Terrine mortelle, agneau aux petits poids semoule succulent, dessert au citron à tomber. Et un Cahors magique. Le tout pour trente euros. 

Je me revisionne The Ghostwriter, de Polanski. Super film, vraiment. 

Pierre Cormary - Ce qui est très fort chez Polanski, c'est que la mise en scène est d'une précision extraordinaire (et qui le place à mon avis parmi les plus grands) tout en n'étant pas visible. Il y a dans The Ghostwriter une élégance et une discrétion du style qui rend ce film, aimable thriller politique, absolument palpitant. Et qui vieillit bien.

 

Dimanche 19 avril 2020

Pâques orthodoxe – Aurora, plus claire et enjouée aujourd’hui, me sort cette merveilleuse formule : « on ne peut lrrien lrreprocher au sommeil ». Nous avons aussi ce merveilleux échange délicieux : « Comment vas-tu, toi, mon pauvlrre chou ? – Oh moi, c’est l’euphorie. Je voudrais que cette période ne s’arrête jamais. – Tlrraîtlrre ! Tu as tellement lrraison. » Nous fêtons aussi la résurrection du Christ à la roumaine comme elle m’a appris. Le premier dit : « Christos a înviat » (« Christ est ressuscité »), le second répond : « Adevarat Ça a invia » (« Il est vraiment ressuscité »). « Voilà, c’est fait, dis-je à Aurora. On est bon encore pour un an au moins. » Elle rit de bon coeur. On se dit encore qu’on s’adore (c’est vrai) et on se quitte pour se retrouver dans deux jours.

 Deuxième dîner 7ème vin, salade de gésier, porc aux lentilles, entremet à la framboise et encore leur super Maison Corbie.   

Mr Arkadin, de Welles. Fabulissime ! Comment ai-je pu négliger ce film pendant si longtemps ? Comme pendant ma chimio, je suis reparti pour un cycle Orson Welles.

D’après ce qu’en dit Youssef Isghahpour :

Le film le plus personnel d’Orson (qui devait s’appeler Mascarade à l’origine) et le plus défiguré par les producteurs. Fragmentaire et ruiné.

L’exergue où il est question du secret (incestueux) du roi est tirée d’une réplique de Périclès de Shakespeare, une pièce qui parle de l’inceste entre père et fille.

Film de masques et de faux semblants.

Un film qui n’en finit pas de commencer, qui brouille les pistes, qui nous fait voyager dans le monde entier comme dans un James Bond. Une odyssée de l’espace plutôt que du temps (au contraire de Citizen Kane) et qui met sans cesse le spectateur en suspens par rapport à l’action. Celui-ci n’est jamais omniscient – comme du reste Van Stratten, toujours mis en retard par Arkadin, sauf dans la scène finale où il prend l’avion avant lui.

Le baroque de Welles à son comble : on est toujours trop près ou trop loin, trop haut ou trop bas et tout va toujours trop vite ou trop lentement. Narration erratique et elliptique, désarticulée et précipitée. Sentiment d’irréalité et de malaise. Disjonction permanente, heurts continuels, faux raccords en rafale au risque de l’étouffant et du foutraque, court-foyer asphyxiant, contre-plongées excessives, tensions irrésolues, tout est là pour faire perdre pied. Torsions de l’espace et du temps au risque de « l’absence d’univers ». Le récit comme piège, la diégèse comme mensonge, l’enquête comme liquidation du passé : Arkadin a-t-il vraiment perdu la mémoire ? (// Angel Heart).

Et pourtant grande énergie et profonde nostalgie (grâce à la superbe musique de Paul Misraki). Et même des moments d’émotion (avec le personnage de « Sophie », jouée par Katína Paxinoú, l’ex-chef du gang de la traite des blanches, et la femme qu’Arkadin aima, et surtout l’entrevue entre Arkadin et Jakob Zouk - Akim Tamiroff dans la chambre à la fin.)

L’épisode du foie gras que veut absolument goûter Zouk.

Les contes sur l’amitié (« buvons à l’amitié ») et le caractère du scorpion (« buvons au scorpion »).

Le secret comme ce qui provient de la volonté d’en créer un.

Treibitsch (génial Michael Redgrave) qui révèle le trafic de femmes.

Le cirque des puces du professeur Radzinski (Mischa Auer – doublé par Welles).

Esthétique du grotesque (« attraction de la répulsion »).

Van Stratten (Robert Arden – dont on a dit qu’il était mauvais alors que c’était la volonté de Welles d’en faire un médiocre.)

Les belles mains, la belle taille et le beau minois de Paola Mori. Les belles femmes que Welles a eues, de Rita Hayworth à Oja Kodar.

Le gigantisme enfantin de Welles. Kane était un bourgeois mais Arkadin est un barbare.

La bourgeoisie qui se pense comme « classe universelle ».

La prolifération abstraite.

L’extrême concentration du style de Welles où chaque plan contient un monde, un affect, une monade – mais va trop vite. La vitesse et les contorsions de Welles.

Arkadin, « monstre innocent ». 

Ce qu’en dit Olivier Kohn dans mon vieux et canonique Positif de juillet-août 1992 (spécial Orson Welles)

Même si l’on ne suit pas le détail, le sentiment d’imprécision qui se dégage du film – fait pour perdre le spectateur toujours en retard sur Arkadin (comme l’est Van Stratten). « Devant Mr Arkadin, être spectateur n’est plus un privilège, mais un handicap car seules nous sont données à voir les conséquences d’une action accomplie en notre absence. »

Les scènes racontées et non vues (quand la baronne Nagel – Suzanne Flon – dit à Arkadin qu’elle a déjà vu Van Stratten, et que celui-ci répond qu’il est un sot car un sot paye deux fois pour le même service.) Les personnages digressent tout le temps. Le film lui-même semble avoir plusieurs tonalités : burlesque, polar, docu, drama. Un puzzle qui ne s’assemble pas. Une narration qui ne prend plaisir qu’à elle-même (comme dans certains romans de Pynchon.) Le sens du film n’est pas dans les informations récoltées – en ce sens, il est ultra-moderne.

Briser la perception du spectateur.

On ne voit jamais les meurtres – on arrive toujours après eux. Pareil pour le suicide d’Arkadin à la fin.

Arkadin comme conteur et qui a droit à des regards caméras.

Non « je ne suis pas qui je suis », de Iago, mais « je ne sais pas qui je suis ». En revanche, c’est un monsieur « je suis partout. »

 

*

 

Anne qui fait son cours de yoga en public tous les soirs à 18 h depuis un mois.

Pierre Cormary, le 22 avril à 15:35 - Brisez-vous les vertèbres, cassez-vous la nuque et mourez en beauté tous les soirs à 18 h avec #lagymnosophe [lien sur son sitet.]

 

« La promenade » dans Beaugrenelle. Le recueillement. Si je fais une crise cardiaque, ce sera de joie.

 

Pierre Cormary - Ma plus grande joie, c'est maintenant.

En fait, c'est dès que la vie s'arrête.

La première fois, c'était en 1996 après une TS et l'on m'avait envoyé dans une maison de convalescence en Dordogne. Un mois avec des fous et des dépressifs en pleine campagne et qui m'avait complètement retapé. J'ai tellement aimé cette maison que je m'y suis fait renvoyer l'année suivante pour un mois et demi - séjour pendant lequel je fis un jeûne de neuf jours, neuf jours de sérénité inouïe.

La seconde fois, c'était 2016, année de ma chimio où là aussi tout se mit entre parenthèse et où je fus heureux comme rarement.

La troisième fois, c'est cette année depuis le 15 mars. Temps qui s'est arrêté, espace qui s'est limité, obligation de rester chez soi, recueillement absolu et euphorie qui n'en finit pas. Je suis conscient d'être un privilégié (fonctionnaire et tout et tout) mais je n'en remercie pas moins les dieux de m'avoir donné une nature si à l'aise dans le néant.

 

Pierre Cormary

Merci mon Dieu de m'avoir donné une nature si à l'aise dans le néant.
#Prièredumatin

 

Commandé sur Amazon depuis le début du confinement :

 

Et je me suis même demandé si je n’allais pas m’acheter aussi la trilogie de La Septième compagnie dont je suis devenu un vrai fan. L’humour bienveillant, c’est rare. Et avec de vrais moments de burlesque. Le fil rouge sur le bouton rouge, le fil vert sur le bouton vert.  

 

Rigoletto de Verdi – quel chef-d’œuvre ! découvert dans les années 80 dans la version Callas à Costecalde et négligé depuis.

 

What ? de Polanski, un sous Cul-de-sac et c’est bien dommage.

 

W. qui m’appelle. Très grande joie de l’entendre après tout ce temps (...) 

Il pleut dans ma cuisine ce matin ! Ça vient forcément du voisin du huitième. Dégât des eaux en vue, complications, merdes, déprime. Mais je reste zen, vais prévenir le voisin, puis le concierge et il apparaît que ce n’est que le tuyau du lave-linge du premier qui est défectueux. En attendant d’aller le changer à Bricorama, il arrive à le resserrer et la pluie dans ma cuisine s’arrête. Plus de mauvaise odeur dans ma salle de bain. Je suis assez efficace, finalement.

(Mais aussi parce que je ne me suis pas senti coupable. Le problème venait d’un autre, pas de moi.)

 

Mon Timon d’Athènes ou le péché de Dieu en ligne.

 

SOLO CHOUFFE + PATAIL CE SOIR – mais la dernière fois de l’année que je m’envoie de la bière chez moi, la prochaine fois, ce sera au Suffren, je le jure.

Dernier cigare : le 15 mars.

Dernières bières : le 30 avril.

 

Dialogue sur Messenger avec H. L’état d’ASMR dans lequel elle me met sans le savoir et qui me la rend encore plus irrésistible. "Je suis curieuse, je veux tout savoir". "Raconte-moi". "Trop bien".  

 

 

Mai

 

« La Promenade » Invalides-Breteuil-Ségur. 

Païsa, de Roberto Rossellini (1946) – le film préféré de Martin Scorsese. 

Le Livre de Judith, dans mon lit, à haute voix.

 

Samedi 02 mai 2020

 

Pierre Cormary – ORSON WELLES A DIT (1/3)

«  Je ne suis donc pas extase devant l’art : je suis en extase devant LA FONCTION HUMAINE, ce qui sous-tend tout ce que nous faisons avec nos mains, nos sens, etc.

«  Naturellement, je joue toujours des rôles de chefs, de gens qui ont une ampleur extraordinaire : je dois toujours être BIGGER THAN LIFE, plus grand que nature. »

 

Pierre Cormary – Lui aussi, BIGGER THAN LIFE.

« Je n’ai pas de volonté. J’aime pas les volontaires, c'est pour l'armée. J’ai simplement un désir fort. Toujours on dit, quand j’étais gamin, je me souviens : “il faut de la volonté pour faire ça“. La volonté m'ennuie, la volonté m'enraille, c'est un faux mot ça, c’est ridicule, la volonté. »  (Gérard Depardieu) « Je n’ai pas de volonté. J’aime pas les volontaires, c'est pour l'armée. J’ai simplement un désir fort. Toujours on dit, quand j’étais gamin, je me souviens : “il faut de la volonté pour faire ça“. La volonté m'ennuie, la volonté m'enraille, c'est un faux mot ça, c’est ridicule, la volonté. » (Gérard Depardieu, le visiteur de la réalité).

 

Pierre Cormary

le 2 mai à 15:25 · 

 

Arrêtez tout ! Je découvre NETFLIX ! The Other side of the Wind, The Irishman, Marriage story, enfin ! Et même Truffaut !

 

Encore un solo 7ème vin et ma première critique gastronomique sur Tripadvisor.

"Le meilleur du quartier

Terrine à tomber. Gigot, boeuf ou porc dont on devient addict à la première bouchée. Accompagnement délicat et généreux (on en a vraiment dans son assiette et ce n'est pas négligeable.) Desserts mortels (notamment au citron et au chocolat). Une cuisine à la fois familiale et savante, goûtue et généreuse, saine et gourmande. Et pour un prix modique : 20 euros en ce moment, entrée, plat, dessert - et si vous aimez le vin, n'hésitez pas à explorer la cave variée et abordable, notamment un Cahors-Balbec Maison Corbie (10 euros) qui est devenu mon vin préféré cette année. En écrivant ce commentaire, je suis en train de finir la bouteille. Non, vraiment, une super maison et un super accueil. Bravo à Hervé et Stéphanie et merci d'être là.

Pierre Cormary"

7eme vin

TRIPADVISOR.COM

7eme vin

68 avenue Bosquet, 75007 Paris, France

 

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Quelqu’un me fait remarquer que j’ai confondu « Malbec » avec « Balbec » de Proust !

 

Dimanche 03 mai 2020

 

Pierre Cormary – La tranche poétique du jour, donc.

"Le confinement, c'est quoi ?"

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Sur Netflix, je découvre enfin, enfin, The Other Side of the Wind, chef-d'oeuvre malade d'Orson Welles avec la sublime, sublime OJA KODAR. 

 

Pierre Cormary, lundi 04 mai

 

Bien. Profitons à fond de notre dernière semaine de liberté.

 

 

Mardi 05 mai 2020 – QUINZE ANS

DE BLOG

 

 

Pierre Cormary, le 06 mai 

Sauf exception, j'en veux toujours beaucoup plus aux gens qu'au pouvoir, c'est drôle, hein ?



(Le pouvoir est le résultat des gens. La dictature, si dictature il y a, vient des gens. Philippe Muray l'avait dit depuis longtemps : Big Brother, ce n'est plus l'Etat mais le citoyen vigilant, l'esprit critique, le voisin qui dénonce que vous êtes sorti. En vérité, les politiques n'ont plus de pouvoir et c'est un leurre que de s'en prendre à eux. C'est l'opinion qui domine, pas le pauvre Edouard Philippe. Le "risque zéro" tant décrié ne vient pas d'en haut mais d'en bas. Tout vient d'en bas. Et le pouvoir suit.)

 

Pierre Cormary, le 07 mai, 11 h 

 

40 % des Français approuvent l'action de Macron - ce qui, vu le contexte, est énorme. Dans votre cul, les "esprits critiques" !

 

 Pierre Cormary, le 07 mai, 20 h

Le confinement, c'est finiiiiii ! [plein d'émoticônes tristes.]

 

 Pierre Cormary, le 08 mai - Le déconfinement ou le retour à la vraie vie morale et responsable et aux vraies gens positifs et actifs.

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Pierre Cormary - Où l'on apprend qu'Orson Welles a participé au montage d'une scène de lesbiennes dans un film pornographique pour aider son chef op. à finir au plus vite ce travail et revenir sur le plateau de The Other Side of the Wind. Où l'on comprend que Welles a souffert dans sa chair abondante de tous les films qui lui ont été arrachés et notamment celui-ci qu'il voulait terminer comme tous les autres, et contrairement à la légende absurde prétendant qu'il détestait terminer ses films. Où l'on est ému par la formidable amitié "virile" (quoique...) entre Orson et John Huston, acteur principal de son film. Où l'on est horrifié de son injuste cruauté à l'égard de Peter Bogdanovitch, jeune cinéaste qui l'admirait tant et l'aida personnellement à surmonter ses difficultés, le logeant même une période chez lui. Où l'on est décidément fou amoureux d'Oja Kodar, cette actrice croate, dernier amour du maître et sans doute le plus grand de sa vie, et qui l'a dépucelé artistiquement, lui faisant tourner d'incroyables scènes érotiques, lui qui était plutôt pudibond et sadique avec ses personnages féminins jusque-là. Où l'on a la confirmation que The Other Side of the Wind, film certes imparfait (plus que "malade"), est un "miracle de l'écran", comme on dit, mixe génial de faux docu et de vraie fiction et qui a trente ans d'avance sur tout le monde à son époque. Welles aura vraiment réinventé le cinéma à chaque film.
Comme beaucoup de jeunes cinéphiles, j'ai d'abord adoré son oeuvre. A 15 ans, voir Citizen Kane, La Splendeur des Amberson ou Le Procès était une expérience extraordinaire. On apprenait les formes, les contre-plongées, les trucs compliqués et performants, la virtuosité inouïe de sa caméra visible et son "je-m'as-tu-vu filmer" assumé et jouissif. Comme Hitchcock ou Kubrick, Welles fait partie des cinéastes dont on retient toute sa vie des images précises, cristaux du temps, nappes de passé, puissances du faux, comme dit Deleuze. C'est l'un des plus grands visuels de tous les temps. Et c'est cela peut-être qui fait qu'après on s'en détache un peu (moi, en tous cas), se persuadant au nom d'un snobisme de l'authenticité que tout cela est peut-être de l'esbroufe, que Kane et Arkadin ne sont pas si "profonds" que ça, que "le plus grand réalisateur du monde" n'est pas à l'abri de certains clichés (l'enfance perdue, le mal un peu trop fascinant, la magie facile) et que son formalisme tourne à vide - autant de choses qui méritaient mille coups de fouet de la main de Rita, Marlene et Oja et qui me firent comprendre ces dernières années que je me trompais lourdement. En fait, c'est en 2016, année de ma chimio, que j'ai redécouvert le génie d'Orson, avec les films que je ne connaissais pas ou très mal et qui ont changé ma perception wellesienne : It's all true, Don Quichotte, Falstaff et surtout, surtout, Vérités et mensonges qui m'a ébloui sur tous les plans. Ce que je prenais pour de la superficialité était de la vitesse narrative, ce que je croyais des stéréotypes étaient des mythes, ce qui me semblait commun était d'une évidence paradoxale. Rien de gratuit chez ce voyant. Rien de vain chez ce baroque. En fait, comme cela peut parfois arriver avec un artiste qui est naturellement fait pour nous, on passe à côté de lui sous prétexte qu'il nous correspond trop. On trouve peu intéressant le génie qui devrait nous intéresser le plus et pour l'indigne raison que c'est précisément ce qu'il fait. On se détourne de celui qui nous retourne. On lui reproche de nous ressembler trop sans se rendre compte que cette ressemblance est notre chance (alors qu'elle n'est pas forcément la sienne, pauvre Orson, pauvre Stanley.) On fait la fine bouche devant ce qui devrait nous régaler si l'on était moins abruti. Aurora Cornu m'avait fait un jour cette réflexion pythique : "je n'aimais pas du tout Höldelrrlin jusqu'à ce que je me lrrende compte un jourllr que je pensais et que je sentais comme lui, ablrrutie olrrgueilleuse que j'étais."
Orson est donc ma redécouverte. Et Oja la femme à qui j'aimerais un jour écrire (si elle comprend le français.) J'ai un destin avec les douairières.
Tout ça pour dire que ce document Netflix est exceptionnel - ILS M'AIMERONT QUAND JE SERAI MORT.

 

 

Pierre Cormary, le 09 mai

 

En MP avec une merveilleuse personne, mon énormité du jour : "il n'y a pas plus cathartique que moi."

 

Pierre Cormary, le 10 mai
"Le monde d'après", comme ils disent.

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Pierre Cormary, le 10 mai

Bienheureux, poètes, mystiques, RÉSISTONS. Non au déconfinement, oui à la liberté.
#confinementforever

 

23:55 Écrit par Pierre CORMARY | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : orson welles, verdi, roman polanski, charles dickens, lucrèce, marcel conche, le livre de judith, cervantès, montaigne, oja kodar, duke ellington, shakespeare | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer