MESURE POUR MESURE, DE WILLIAM SHAKESPEARE
Le machiavélisme du bien
Ou
La miséricorde infernale
Ou
L’irrégularité constante
A Fanny Casal
Measure for measure (1603), production BBC, dirigé par Desmond Davis (1979). Isabella (Kate Nelligan) face à Angelo (Tim Piggot-Smith). Editions Montparnasse, voir extrait.
L’horrible pièce ! La pièce géniale ! La pièce où la quasi-totalité de l’action se passe dans un couloir de la mort où l’on attend l’exécution de Claudio. La pièce où l’on finit par trouver que Vincentio, le bon duc, est peut-être pire que le tyran, Angelo. La pièce du désordre moral absolu où pour faire le bien il faut laisser faire le mal. La pièce où Dieu lui-même se conduit comme un beau diable mettant à l’épreuve toutes ses créatures, les poussant jusqu’au risque qu’ils commettent le péché irrémissible, celui de refuser l’esprit saint, mais qui leur pardonne et les sauve in extremis – y compris celui à qui il vient de dire qu’il ne lui pardonnerait pas, le fanfaron Lucio. La pièce qui exprime tout ce que Richard Marienstras a analysé dans son Shakespeare et le désordre du monde et qu’il appelle « le machiavélisme du bien ».
Le duc en moine (Kenneth Colley)