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JEAN III - Nicodème, le nigaud de Dieu (+ Le Christ Serpent, selon Louis Pernot)

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Nicodème, James Tissot (entre 1886 et 1894)

Naqdimôn (Nicodème) – Le premier qui vient de lui-même à Ieschoua (dans la nuit, certes) et contrairement à Nathanaël qui, lui, avait été « désigné », « vu » par ce dernier. Pour autant, comme Nathanaël, Nicodème reconnaît tout de suite le Christ comme tel et tente de comprendre la résurrection. On appréciera la candeur de sa question (et qui fait par là-même de Nicodème le « nigaud » du Christ) :

« Est-ce possible qu'un homme naisse quand il est vieux ? »

[Merveilleuse définition du « born again », soit dit en passant !]

« Peut-il entrer dans le ventre de sa mère une seconde fois et naître de nouveau ? » 

[Le retour au ventre, aux entrailles – et cette fois-ci sans père ! Diantre ! N'était-ce pas là la définition du masochisme selon Gilles Deleuze ? Un homme réaccouché seulement par sa mère ? Le nigaud pressent.

Oui, répond Ieshouha – mais d'en haut.

« Il faut naître d'en haut. » 

C'est-à-dire du Ciel, de l'Air, du Souffle, du Pneuma.

 

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Et avant d'ajouter cette Parole providentielle et par là-même infiniment cruelle :

« LE PNEUMA SOUFFLE OÙ IL VEUT ». 

(III-8)

Arbitraire Saint Esprit ! Dieu hasardeux ! HasarDieu ! Caprice ! Condamné à mort qui s'est échappé !

Encore plus étonnant, le Christ comparé, associé au serpent.

« De même que Moshé

éleva le serpent au désert

ainsi faut-il que soit élevé le Fils de l'Homme. »

(III-14)

LE CHRIST–SERPENT !

Sur ce sujet, lire la belle prédication de Louis Pernot, « élever le Christ comme un serpent» :

Le serpent d'airain de Moïse dans le livre des Nombres (Nb. 21:4-9).

Le serpent, symbole de mort qui devient symbole de vie.

Le serpent qui nous apprend à voir l'ambivalence des choses (comme n'importe quel élément.)

Le serpent qui nous apprend à CHANGER DE REGARD.

Le serpent qui nous apprend à regarder et à aimer, à élever et à sauver.

Pensons à Victor Hugo :

« J'aime l'araignée et j'aime l'ortie,
Parce qu'on les hait...»

A Marie Noël :

« Moi aussi, j'ai joué en créant. Et le monde est beau de ma fantaisie. Je ne me suis pas réduit, par vertu, à la candeur des fleurs blanches. J'en ai semé sur la terre de toutes les couleurs. J'aurais pu me contenter des bonnes fleurs honnêtes, la camomille, la bourrache, la sauge, la mauve, la fleur de tilleul, le mille-pertuis, toute la confrérie des plantes salutaires en qui tout le monde a confiance, mais j'ai inventé aussi la digitale, l'aconit, la ciguë, l'ellébore, la stramoine, la mandragore, les champignons vénéneux, toute la bande des plantes malignes qui n'ont pas bonne renommée.

Pourtant, elles ont, elles aussi, leur bien à faire que je leur ai confié en secret, qu'elles recèlent en cachette et que les mages, les savants - j'aime leur préparer des surprises - découvriront en cherchant bien.»

Marie Noël, Notes intimes, pages 15 et 16

Donc, Louis Pernot :

« En toute chose, il nous faut prendre la réalité, l’élever et la regarder d’une manière neuve. Le serpent est une chose assez pénible, il rampe dans la terre, il est le terre-à-terre, le terrestre qui ne peut même pas s’élever par ses propres pattes. La vision terre-à-terre est désespérante, si on regarde la réalité terrestre, il y a de quoi douter, se décourager et désespérer. L’Évangile nous invite à simplement changer notre regard, l’élever pour voir autrement. Voilà qui change tout dans sa vie. »

Le serpent, symbole de conversion – et mieux, initiation au symbole. 

Ne pas avoir peur du danger. Voir le danger – un peu comme les panneaux routiers qui montrent l'accident possible afin justement de pouvoir l'éviter.

Faire en sorte que « la chose dangereuse devienne mon objet plutôt que moi je sois l’objet de la chose dangereuse. » 

Mieux, transmuter l'épreuve, le handicap, la faiblesse en force, en chance, en création.

« C’est dans le sens de l’œuvre constante de Dieu dans nos vies, lui qui peut faire en sorte que nos épreuves deviennent des sources de force, nos handicaps des chances extraordinaires. Les épreuves peuvent, en effet, être sources de bonnes choses. On voit ainsi tant de personnes dont on admire telle ou telle qualité extraordinaire, voire géniale et dont on peut découvrir que cette qualité a une cause dramatique. Il y a donc possibilité de convertir le drame en merveille, c’est là l’œuvre que Dieu nous permet de faire. » 

Donc le serpent, symbole de résurrection (il change de peau) et de médecine, de sérum.

LE CHRIST AU CADUCEE !

LE CHRIST SERPENTARD !

 

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« C’est un point extraordinaire de cette pensée biblique d’être d’une extrême complexité, de ne pas  dire qu’il y aurait le bien d’un côté et le mal de l’autre, mais que le mal et le bien sont toujours mélangés et ambigus. Tout est à la fois mal ou bien suivant comment on l’utilise, comment on le prend, comment on le vit. Et tous les symboles bibliques sont doubles, oxymoriques. Le feu est symbole de lumière, de chaleur et de présence de Dieu comme dans le buisson ardent, mais il peut aussi être le feu qui brûle et détruit. L’eau du baptême source de grâce, est aussi l’eau du déluge, ou l’eau de la tempête qui peut submerger celui qui s’y trouve. Le désert, lieu de la parole de Dieu, peut être aussi le lieu de la solitude, de la sécheresse et de la mort. Et puis la croix symbole de la mort devient celui de la vie. » 

« C’est pourquoi Jésus nous invite à être "rusés comme des serpents", mais il ajoute : "et purs comme des colombes". (Matt. 10:16), donc à ne pas rejeter cette intelligence ou cette ruse, mais à la mettre en lien avec la sagesse. » 

« Ceux qui seront sauvés, ne seront pas ceux qui n’auraient pas été mordus par des serpents, mais ceux qui, étant mordus, regardent le serpent d’airain. »

En tous cas, pas étonnant de la part de Jean de faire cette métaphore du serpent, lui que l'on représente si souvent avec une coupe en laquelle il en fait apparaître un.

 

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Saint Jean (prédelle de la Visitation par le maestro de Segorbe, XVe siècle, musée de la cathédrale de Segorbe.)

 

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Saint Jean (Cristóbal Llorens, 1590, Musée des Beaux-Arts de Valence.)

 

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Le Greco, Saint Jean (vers 1605 ou 1609)

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Rubens, Saint Jean (vers 1611)

 

Jean – sorcier des évangélistes, comme on a dit.

Et qui fait dire au Christ la parole salvatrice définitive :

« Dieu n'a pas envoyé son Fils dans le monde pour condamner le monde mais pour que le monde soit sauvé par Lui. »

(III-17) 

Et l'on parle bien du monde, là, pas d'un tel ou un tel. Du monde, de la totalité, de l'ensemble.

Pour cela, il suffit de croire en Lui. D'y adhérer sans condition. De faire confiance. Et tout ira bien.

Mais alors, celui qui n'y adhère pas ? Qui se méfie ? Qui tergiverse ? ou tout simplement, qui n'y arrive pas ?

Sur celui-ci, la colère de Dieu perdure.

Mais que veut dire cette colère ?

Que Dieu ne le lâche pas ?

Qu'au contraire il fait tout pour le récupérer, le retenir, l'attraper au lassot ou au fouet ?

La colère – suprême attention de Dieu qui n'abandonne jamais.

Et comme Nicodème n'abandonnera pas Jésus, étant celui qui aidera Joseph d'Arimathie lors de la descente de la croix et de la remise au tombeau.

Bref, Nicodème, premier « nigaud » fidèle.

« Nigaud t'aime. »

 

 

À SUIVRE – JEAN IV Photine, la fille de feu (la samaritaine)

À REPRENDRE – JEAN II Les métamorphoses (Cana / Marchands du temple.)

 

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