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"Animal rare et coûteux, l'éléphant blanc albinos fait l'objet de légendes en Orient comme en Europe. Par extension, l' « éléphant blanc » désigne un ouvrage architectural d'envergure, onéreux et peu utile. Indifférent au bruit, notre pachyderme poursuit lui sa route au milieu des livres, hors-circuit."
Une collection dirigée par Étienne Ruhaud.
Publication d'Aurora Cornu, aux Editions Unicité, le 07 novembre 2022
On peut retrouver toutes ces informations (ainsi que la date et le lieu des signatures) sur mon mur Facebook ainsi que sur celui de Aurora Cornu Pierre Cormary tenu par Etienne Ruhaud et moi-même.
Dédicace Amélie Nothomb, au Divan, 203 rue de la Convention, et comme par hasard, jour-anniversaire de notre rencontre à Aurora et moi (12/10/2012)
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11 octobre 2024
LECTURE D'EXTRAITS DE MON LIVRE PAR EVA BRUNOY (DONT LA VOIX - DE CANTATRICE ! - N'EST PAS SANS ECHO AVEC CELLE D'AURORA...)
Evanances littéraires, par Eve Brunoy
Bonjour ou bonsoir à tous.
Merci aux groupes de lecture qui accepteront ce post.
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Aurora Cornu de Pierre Cormary paru le 7 novembre 2022 aux Éditions Unicité dans la collection Éléphant Blanc, 392 pages. Préface de Amélie Nothomb, photographies en fin d'ouvrage.
Lecture d'extraits de ce roman enregistrée en vidéo sur Éva Résonances littéraires :
Un enfant me suivait dans mon rêve cette nuit ;
Âpre et frêle, cartable rempli de poèmes
Étrange ce double élan maternel qui me prit
Était-ce le poète qui va nous suivre quand même ?
Enfant mystérieux, si vaillant, si malin,
Éveillée, mon cœur en alerte le console,
Tu appelles les coups comme un caillou en chemin ;
Quand tu seras fatigué, souviens-toi de mes paroles :
- Apprends à dormir, mon petit combattant, dépose l'arme
Oublie la gloire, renonce à l'orgueil, rejette en dehors
Les sentiments qui ne sont pas les piliers de ton âme
Et ceux qui restent, entoure-les de ténèbres et dors !
Le sommeil est pour nous le brou amer de noix
Lorsqu'il se défait, les eaux chantent l'émoi.
Aurore Cornu, Hypothyroïdienne.
Cher Pierre-Antoine Cormaroy,
Mon Pierre,
Je suis heureuse que tu aies décidé de faire de l'histoire de ma vie un livre et te pardonne d'avance les libertés et fantaisies inhérentes à une œuvre de fiction. Tu as ma gratitude et tous les avantages possibles d'une aventure
qui est tienne.
Amitié complètement amoureuse.
Aurora Cornu
Paris, le 24 mai 2013
(Notre Pâques.)
Avec ces deux extraits recopiés, je pourrais m'arrêter là.
A comme Amour
Tout est dit, écrit, gravé pour l'éternité par une Femme hors du commun, Sorcière, Déesse de la Terre et de la Bilocation, dans ces quelques lignes... et je pourrais presque être envieuse de cette chance inouïe, incroyable, que Pierre-Antoine a eu de rencontrer son idole, celle qui l'émut au plus profond de son être dès la première fois où il la vit sur écran, actrice du film de Rohmer, le Genou de Claire.
Oui, il va vous décrire par le menu chaque scène de cette oeuvre cinématographique, oui, mais la vérité est ailleurs ; oui, il va vous raconter les évènements majeurs jalonnant l'existence de la belle, oui, mais la vérité est ailleurs ; oui, il va dresser un auto-portrait tout à la fois provocateur, auto-flagellant, brillantissime, somptueux, riche de détails, de confidences drôles, parfois cyniques, bouleversantes ou confondantes de naïveté enfantine, oui, mais ... vous l'avez compris, la vérité est ailleurs !
Cette rencontre devait avoir lieu, elle était écrite, pré-destinée, entre cet adulescent quarantenaire à fleur de peau caché sous une carapace de graisse et des postures offensives, et une Aurora Cornu amoindrie par l'âge mais toujours d'une intelligence et d'un instinct fulgurants, d'une générosité fabuleuse.
Dieu que cette femme est géniale, Dieu que nous l'aimons, nous-aussi, Dieu que nous sommes finalement bénis d'avoir pu lire une telle déclaration d'Amour à la Vie, à la Mort, à l'Éternité.
Les digressions n'en sont pas, les anecdotes multiples non plus, tout participe à permettre à Pierre Cormary d'aller au-delà de ses forces, de ses pudeurs, de ses peurs, à dire l'essentiel, l'unique " je vous aime " à Aurora la merveilleuse, l'accoucheuse de cet homme enfin certain d'être aimé inconditionnellement.
Double biographie donc de ces deux amoureux, l'un racontant l'autre et se dévoilant, se délestant enfin du malheur, de la haine, du mépris de ceux qui ne le méritaient pas, l'autre l'accouchant et le rendant à la vie.
Je vous remercie Pierre de ce cadeau inestimable, vous ne pouvez imaginer à quel point votre livre m'a bouleversée, concernée.
EB
Merci également à Étienne Ruhaud, dirigeant la collection Éléphant Blanc chez Unicité Éditions :
Animal rare et coûteux, l'éléphant albinos fait l'objet de légendes en Orient comme en Europe. Par extension, l' "éléphant blanc " désigne un ouvrage architectural d'envergure, onéreux et peu utile. Indifférent au bruit, notre pachyderme poursuit lui aussi sa route au milieu des livres, hors-circuit.
Gratitude.
Quatrième de couverture :
Qui connaît Aurora Cornu (1931-2021) ? Romancière, poétesse, actrice, et cinéaste franco-roumaine, la dame semble avoir eu mille vies. Le public français retient d’elle son rôle dans le célèbre Genou de Claire. Le reste semble confidentiel, sinon totalement inconnu. Loin de toute biographie au sens strict, Pierre Cormary nous parle ici d’une rencontre : celle d’un agent d’accueil muséal, geek assumé, rohmérien transi, et d’une dame âgée, fantasque, devenue égérie. Non sans humour ni distance, Pierre raconte donc Aurora, et, ce faisant, se raconte tout autant. Autofictionnel, intime, Aurora Cornu nous fait aussi voyager, des Balkans au lac d’Annecy, de New York à la rive gauche de Paris, où se concentre l’essentiel de l’action. Difficile, ainsi, de ranger ce livre inclassable, où se mêlent tant de figures et de lieux, condensés en une subtile alchimie poétique teintée de mélancolie, mêlée d’une singulière drôlerie.
Non seulement votre livre est « quelque chose », comme je m’attendais à ce qu’il le soit, mais il est aussi réussi - selon ses propres normes, que vous imposez au fur et à mesure. Je l’ai lu en trois jours, alors que j’avais pour des raisons de travail pas mal d'autres choses à lire, et plus j’avançais plus je me prenais d’amitié pour Aurora et pour vous. Votre autoportrait est cruel, mais très fort, quant à elle on a envie de la connaître ou de ‘lavoir connue. Je n’avais qu’un souvenir lointain du Genou de Claire, une des choses que je vous dois, ç’a été l’immense plaisir de le revoir, et dans la foulée La Collectionneuse - bref un retour à Rohmer plus fréquenté depuis longtemps. Merci de m’avoir envoyé ce livre si étonnant, si personnel, merci surtout de l’avoir écrit. Je lui souhaite de trouver ses lecteurs - peu importe leur nombre, je crois que ceux qui le liront l’aimeront. Et, bien sûr, continuez.
Très amicalement.
Emmanuel Carrère, le 05 janvier 2023
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06 décembre 2023 - Anniversaire d'Aurora qui aurait eu 92 ans, et comme par hasard, rencontre (enfin !) avec Béatrice Romand au musée d'Orsay.
"Elrric passait tout à cette chipie !", me disait Aurora. Je le comprends.
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29 novembre 2023 - Alors là, je vais pleurer, chère Anne Bolenne.
Aurora Cornu est une partition violente gorgée d'émotions, d'un fabuleux surréalisme, d'une virtuosité terrifiante, déployée en un style rhapsodique, rempli d'éclairs.
Une oeuvre envoûtante qui refuse la clôture, arrachée à tous les vents du désir.
Véritable journal intime, orchestration obsessionnelle dont les équilibres et les déséquilibres admirables permettent à l'auteur d'aller vers toutes les audaces, sans cesser d'en demeurer le maître, toujours avec une sensibilité bouleversante.
Ce livre est un livre-corps, un livre-exquis.
Comment ne pas penser à cette approche « objective du hasard », où l'on se laisse infuser par le mystère et la beauté ?
Comment ne pas penser aux tableaux surréalistes de Ernst (le visage de Gala Eluard), Dali, de Chirico ?
« Me perdre dans son visage continental qui donne l'impression de partir en pèlerinage dès qu'on le scrute ? »
« Voyager dans le visage d'Aurora - mon premier bonheur physique avec elle. Arriver à son menton comme un alpiniste… »
Un monde de « Pierre » qui se métamorphose sur le passage du genou d'une femme, et inspire une puissance sensorielle folle.
Un récit comme le miroir d'une correspondance à deux accents, deux temps, deux corps, deux désirs.
Un baiser pour voix et orchestre.
L'humour, le sens de l'autodérision dont l'auteur fait preuve, rendent les personnages particulièrement attachants, vivants : générosités, indignations, gestes, perceptions, interrelations, articulations, joutes amoureuses, tensions douces, « pétrifiantes coïncidences », tout est réjouissant dans le style.
La verve renforce la conviction qu'on ne prend pas place dans un drame mais que ces deux titans des restaurants, dans leur plongée sensible, me renvoie à la célèbre citation de Paul Éluard « qu'il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous ».
Aurora ou la parole d'un auteur qui s'inscrit véritablement et en profondeur dans la vie.
Pas de réduction du réel à sa perception mais une matérialisation d'un univers très personnel où tout est vrai. (Un vrai roman ?).
La famille, comme roman-feuilleton, où les zones opaques comme celles du rêve sont des images doubles, triples, multiples, brutes. Un temps cocasse, disloqué, figuré, défiguré, des mots qui ébranlent des représentations cinématographiques, picturales, sculpturales et qui se donnent à voir comme présence forte, traces tangibles du passé, des empreintes réelles de la mémoire.
Obscure plume de l'écrivain qui parfois démouche son fleuret.
Lectrice conquise par ce livre déroutant, délirant, cette vision magnifique d'Aurora, permise par l'amour, par cet amour face à une vérité harmonique, dans le temps et l'espace.
Livre admirable parce qu'il donne à ressentir ce qu'est le sentiment amoureux, la possibilité offerte à chaque instant de vivre ce sentiment, loin du bavardage et du discours bien pensant.
Pages aux couleurs poignantes, hymne à la lumière qui efface les ombres, l'amertume de l'injustice et de la cruauté.
Rebelle et belle Aurora qui ouvre et préserve son intensité émotive, traverse le cosmos comme Peter Ibbetson, et partage d'autres aventures merveilleuses avec les oiseaux dans un été invincible.
Faut-il relire le livre de Pierre Cormary perché sur une échelle, qui deviendrait un objet de fascination, de tentation, mais aussi l'expression la plus pure de l‘absolu ?
« Tu alrrives toujoulrs à tes fins. Poulrrquoi , » - Peut-être parce que tu m'aimes. »
Anne Bolenne
Gala Eluard, par Max Ernst (1924)
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24 novembre 2023 -
Immense merci à JEAN-FRANCOIS ROUZIERES pour son superbe article dans TEMOIGNAGE CHRETIEN
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07 novembre 2023
MON LIVRE A UN AN !
Magnifique cadeau que me fait pour l'occasion Joseph Vebret dans le quatrième numéro de sa revue bi-annuelle Littératures & Cie.
Ecrire un roman passionnant sur la comédie du désir, sur le pathétique masculin et sur l'intelligence des femmes, est-ce possible ? La réponse est oui.
David di Nota - Aurora Cornu, ou le récit d'une icône. Peux-tu nous en dire plus sur cet étonnant personnage ?
« Aurora Cornu », de Pierre Cormary, Éditions Unicité, 2022
par Jean-Michel Bérard
La recension que Cristina Hermeziu a publié de ce livre aussi érudit qu'inclassable m'avait suffisamment intrigué – bien qu'un peu dubitatif - pour m'y plonger. Et là, quelle merveilleuse surprise ! C'est léger, drôle, enlevé !
Je ne connaissais pas l'actrice et poétesse Aurora Cornu (1931 - 2021). Enfin, pas pour elle-même. Je connaissais la muse de Marin Preda (cf. mon post du 15 août dernier sur l'excellent ouvrage d'Eugen Simion, Marin Preda, portrait de l'écrivain amoureux).
J'appris plus tard qu'elle avait aussi été l'épouse d'Aurel Cornea. Et le nom de l'ingénieur du son à France 2 m'était familier pour avoir fait l'ouverture du journal télévisé pendant près de 300 jours qu'a duré sa captivité en 1986 (j'avais 16 ans), otage d'une des milices qui ont dévasté le malheureux Liban pendant la guerre civile.
Plus tard, j'ai su qu'Aurel Cornea était d'origine roumaine (mais que savais-je alors de la Roumanie ?), lorsque ses compagnons de captivité ont décrit comment ce prodigieux conteur de la verve d'un Panaït Istrati les faisait s'évader de leur cachot avec ses récits d'entre Danube et Carpates.
Mais je n'avais rien lu de l'héroïne de Pierre Cormary, ni vu le Genou de Claire – le film d'Eric Rohmer où elle crève l'écran – une pellicule sortie dans les salles obscures l'année de ma naissance (qui est aussi celle de l'auteur).
Depuis, bien sûr, j'ai vu le film. Et comment ne pas faire le parallèle entre Pierre Cormary éperdu d'admiration pour son égérie, et l'acteur qui donne la réplique à la belle roumaine dans l'opus de Rohmer ? Jean-Claude Brialy déposait en effet chaque année au cimetière de Montmartre, une rose rouge sur la tombe d'Alphonsine Plessis (dite Marie Duplessis), qui inspira à Alexandre Dumas fils, le personnage de « la Dame aux Camélias ». Le suave Brialy a d'ailleurs poussé la passion jusqu'à reposer juste à côté de la célèbre courtisane qui l'aura fasciné toute sa vie.
Le livre de Pierre Cormary, touffu, décousu et pourtant qu'on ne lâche pas avant la dernière page, n'est pas une biographie de son égérie. C'est plutôt un « exercice d'admiration », comme aurait dit Cioran, qu'Aurora Cornu goûtait apparemment fort peu.
La « préface » d'Amélie Nothomb vantée en couverture se résume à un incipit d'une douzaine de lignes, sans doute pour rejoindre au plus vite l'auteur et « sa vieille centenailrre calrractélrrielle » dans leurs promenades et leurs discussions. Aurora Cornu y expose ses vues philosophiques tolstoïennes, mystiques aussi, et fait montre d'un merveilleux sens de la répartie, mordant et plein d'esprit.
Cormary ayant dit à sa grande amie qu'elle ressemblait à la 3ème symphonie de Mahler, on imagine la mine déconfite de la poétesse après s'être infligée l'écoute des quatre mouvements tonitruants de ce bon Gustav, en se demandant ce que son « salopalrrd » idolâtre - l'épithète est affectueux dans la bouche d'Aurora - a bien pu lui trouver de mahlérien...
On suit l'étonnant couple dévorer d'un appétit gargantuesque, des plateaux d'oursins généreusement arrosés d'un Quincy gouleyant. La scène au restaurant argentin, en particulier (p.260-264), est à s'étouffer de rire.
Quelle est la part de vérité et la part fantasmée dans le récit que Pierre Cormary fait de ses rencontres avec Aurora Cornu ? Seul l'auteur pourrait répondre.
Mais à Pierre Lazareff qui demandait avec insistance à Blaise Cendrars après la publication de « La prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France », s'il avait vraiment pris le train mythique, Cendrars avait eu cette réplique sublime : « Quelle importance, puisque je vous y ai tous emmené ? »"
JEAN-MICHEL BERARD
(rencontré hier matin avec son épouse, 15 octobre 2023, onze ans après Aurora, dans la nef d'Orsay.)
Portait de Marie Duplessis, par Edouard Viénot, 1845.
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23 août 2023 - "Théologie rugueuse", par Joël Janiaud.
Cher Pierre,
je viens de terminer la lecture d'Aurora Cornu.
Nous aurons peut-être un jour l'occasion d'en reparler, mais comme on ne se voit pas souvent, je partage brièvement quelques impressions subjectives. (Avertissement : mon texte peut contenir des platitudes.)
Merci à toi de m'avoir offert une très belle expérience de lecture. Ce livre a été touchant, au sens noble du terme, au sens de "qui atteint et qui marque affectivement", et je suis sûr qu'il peut atteindre bien d'autres personnes comme il l'a, j'espère, déjà fait.
J'ai été d'abord content de t'y retrouver, et de découvrir plus en profondeur ce qui a empli ta vie pendant ces années où nous ne sommes pas vus pendant que je découvrais, de mon côté, l'expérience de voir grandir un enfant et de l'accompagner tant bien que mal. Tu m'avais parlé d'Aurora Cornu (et aussi de ton cancer, et aussi des trolls) lorsque nous nous sommes revus il y a quelques années, et je découvre en te lisant l'intensité et le charme de tout cela, que tu as su faire vivre dans l'écriture.
Tout bêtement, j'ai donc été content d'avoir "de tes nouvelles" avec ce livre. Mais cela va plus loin, bien sûr. C'est une belle aventure littéraire, savamment construite, et écrite avec un mélange unique de plein de choses (drôlerie, adoration, auto-dénigrement, geekisme culturel, théologie rugueuse, récits bien menés, alcools et viandes en abondance). Je ne pourrai jamais être objectif sur ce livre, mais quand même, c'est une belle réussite littéraire (je vais donc pouvoir me pavaner en disant que j'ai un jour été dans la même classe que toi).
Il faut un grand talent pour faire une autofiction intéressante et il y a chez toi non seulement un grand talent, mais une sorte de génie de l'égotisme. Et puis il y a Aurora, dont tu dévoiles des facettes, dont tu fais résonner l'esprit et les paroles mais qui reste finalement nimbée d'un grand mystère, ce qui est une des plus grandes réussites du livre, et peut-être sa plus grande élégance : en la dévoilant à travers toi, en lien avec toi, en contraste avec toi, tu ne la réduis pas à un simple fantasme, mais au contraire tu lui confères une présence réelle, folle et douce, qui la respecte profondément et lui laisse toute son étrangeté. C'est en tout cas ce que je perçois.
Tout cela a en plus été l'occasion de revoir Le genou de Claire (pour la troisième fois seulement, mais avec une attention renouvelée) et de découvrir Bilocation, objet cinématographique étonnant.
Bref, pour conclure sur une authentique platitude, merci et bravo, cher Pierre. La préface d'Amélie Nothomb dit très bien l'essentiel d'ailleurs, j'aurais mieux fait de me taire.
J'espère que tu vas bien et qu'il y a des choses exaltantes dans ta vie.
Pierre Cormary est un blogueur littéraire. Il collabore à Causeur, la Revue des deux mondes et aux Cahiers de l’Herne. Passionné de cinéma, il tombe amoureux du film d’Éric Rohmer : Le Genou de Claire. Enfin, plus exactement d’une de ses principales actrices, l’écrivaine roumaine Aurora Cornu.
Après, en guise d’introduction, nous avoir conté à sa manière le synopsis de l’œuvre cinématographique, il nous parle avec passion de la personnalité de son égérie, sa vie, ses emmerdes, ses amants, ses œuvres poétiques. Et le voilà parti dans une quête éperdue de sa muse qui va lui prendre de nombreuses années.
Je pose comme hypothèse (et non comme prolégomènes) que la curiosité et la quête des profondeurs de l’esthétisme auront peut-être été aiguisés par son métier de guide au légendaire musée d’Orsay, palais de l’impressionnisme. Je l’imagine explorer les arcanes de l’Art, les dessous métaphysiques de la beauté ou bien autre chose de plus caché, quelque chose que les faciles apparences offertes au visiteur pressé ne nous diront pas ou si peu. Ce que j’entends par là et perçois, en tout cas, c’est que l’aventure romanesque relatée dans le livre est idéalisée. Elle est tendrement platonique voire d’essence spirituelle quoique ancrée sur des tranches de réalité vécue.
Après une longue quête des coordonnées d’Aurora Cornu pour tenter de l’approcher (enquêtes discrètes et polies de voisinage, lettres éperdues d’attentes confiées à des tiers...), l’écrivain va enfin rencontrer sa dame, une dame qui a beaucoup vieilli. Alors persiste chez le lecteur, cette curieuse et entêtante impression que le rédacteur du livre voit toujours en elle la jeune femme, la jeune actrice qu’il a adorée et vénérée au plus haut point. Une franche naïveté. Mais une belle naïveté.
Le blogueur et débatteur, parfois incisif dans ses critiques que l’on peut lire sur les réseaux sociaux et les revues spécialisées, mute pour l’occasion en prince compatissant mais jamais compassé. Il est éperdu et prêt à tout pour sa princesse littéraire, figure d’idéalité.
S’en suivent des dialogues suaves, mâtinés de traits d’esprit, saillies intellectuelles touchant tous les sujets : poésie, philosophie, littérature... et même théologie (nous aurons droit, sur ce sujet, à quelques allusions à l’Apocatastase). Tout cela fait de ce long voyage, une découverte de l’intime de Pierre Cormary. Pas toujours simple mais attachant.
Car ce dernier se livre sans trop de complexes ni tabous. Tout y passe : ses questions existentielles et métaphysiques, sa difficulté et sa pudeur envers le beau sexe, ses difficultés familiales, nonobstant l’aisance apparente (bourgeoisie tropézienne). Tout ce petit monde en apparence protégé cache de « belles tortures » de jeunesses. Elles sont, du reste, inhérentes à beaucoup de familles reconstituées (et pas que) : les rapports au père, l’œdipe... Ce sont des choses, in fine, communes à beaucoup d’entre nous mais dont les écheveaux sont plus difficiles à démêler chez les êtres sensibles en recherche de signifiant. M’y reconnaissant parmi tant d’autres, autant dire que ma lecture fut donc relativement attentive... et un brin plus empathique que pour certains... qui pourraient y manifester de la flagornerie facile, n’y voyant que des problèmes de bobos.
… Des bobos ? On en a tous. Et pour se soigner Cormary nous entraîne à la recherche de la muse consolante, la mère, la femme, le mystère éternel dont nous sommes tous plus ou moins les fils et les amant, ce qui nous rend relativement solidaires du cheminement des écrivains qui soulignent ou grossissent ces traits sacro-saints. À tel point que l’on s’imagine par moment flânant, en douce, avec Pierre et Aurora dans le Paris des amoureux propices à toutes les déviances poétiques et tous les imaginaires indicibles.
Car si il y a un troisième personnage dans le livre, c’est bien Paris... la ville des amoureux transis (et parfois frustrés). À tel point grisés par sa magie sensuelle, nous le visitons bien volontiers, bras dessus bras dessous, avec les deux chastes amants. Ce sera un Paris prétexte à des déambulations autour de la tour Eiffel et du Champ de Mars, au milieu de moult conversations intellectuelles onctueuses, ce que j’aime à nommer « le charme discret de la bourgeoisie » en hommage à Buñuel (ce qui n’est pas un vain mot). C’est aussi un Paris prétexte à des visites hors norme de musées : Orsay et son univers autour de l’Origine du monde de Courbet (revisitée par l’auteur !). Un Paris, aussi, prétexte à une initiation gustative dans de somptueux restaurants où l’on boit bien et parle parfois fort.
Mais le plus envoûtant dans cet opus hors normes, c’est cet étrange sentiment pénétrant que l’on est assis entre deux chaises, entre réalité et fiction. Cormary raconte t-il un réel ou un fantasmé ? A t-il volontairement enjolivé ses rapports et sa communication avec Aurora ? En rajoute t-il ? Ment-il ? Rêve t-il ? Échafaude t-il ? Au début c’est un peu gênant et bluffant, puis on s’y fait. Et qu’importe, mesdames et messieurs… on voyage. On s'émerveille du charme du vivant. Puisque l’essentiel est qu’il nous entraîne dans une quête initiatique, un goût de l’autre comme complétude à nos propres vides. Nos absences. Nos solitudes ontologiques. Nos doutes. Nos angoisses.
Pour finir par des choses plus rassurantes, matérialistes et formelles, j’aimerai souligner la qualité littéraire qui est au rendez-vous. Une friandise que la curiosité de cet intellectuel avide de lecture nous propose à chaque page : philosophie, humanisme, spiritualité. Tout y passe, non sans talent. Ce grand travelling au sein de la mémoire de l’humanité aurait pu rester enfermé dans les salons huppés du tout Paris au milieu de dandys sans étoffes. Mais là pour l’heure, ce grand zoom de l’esprit humain, depuis son cosmos bien à lui, nous est offert sans mesure et avec une réelle connaissance de ce qu’il avance culturellement, même si l'on n'est pas toujours en accord avec lui. L’auteur aura réussi à attirer Amélie Nothomb dans sa préface, ce qui nous rassure sur son aplomb. À ce titre on lui pardonne ses opinions politiques très marquées, ses tirades traditionalistes sur les mœurs de ses contemporains, ses coups de gueule idéologiques...
Au-delà enfin, et j’en terminerai par là, on devine en filigrane une certaine forme de « quête du Divin et du Sacré ». Car si Pierre C. se risque à invectiver le Bon Dieu quelques pages avant l’épilogue, c’est pour mieux le questionner. Et pour le moins il osera lui parler, ce qui est déjà ça car peu osent le faire.
D’où ma conclusion. Aurora, après son décès, laisse un grand vide dans son intériorité. Cormary est un ex catholique en recherche (il publie sur Pascal et le jansénisme actuellement). On sent chez lui une quête d’intimité au moins autant que d’universalité. C’est ma perception des choses. Le reste, fort heureusement, lui appartient.
Bon voyage au pays des fées et des muses rendues vivantes.
C’est cela la magie de l’écrit. Il ressuscite les fantômes avec brio.
Pierre Cormary sait le faire avec un certain panache (et un gros cigare à la bouche).
Jean-Marc Freling
Le 15 octobre 2012, en allant au Café des PTT, rue Cler, à la rencontre d'Aurora (première fois.)
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13 juillet 2023 -
sur Radio Courtoisie, dans Le Libre journal des littératures, mené par Sophie Bachat, où je cause une demi-heure en fin d'émission de la poésie, chamanique s'il en est, d'Aurora.
Grassouillet, sain, aux boucles tombantes sur le front,
Sur sa lèvre croupit le mot galant, le verbe exagéré et so-nore
Le contentement de soi-même luit sous les mèches frisées.
Hélas ! Cette tête est crispée dans l’offense obtuse
Le regard abattu et méfiant !
Tête digne de pitié, que cherches-tu ici ?
Est-ce une erreur ou non ?
Ne soupçonnais-tu pas que le papier monnaie émis par toi était faux ?
Que celui qui n’a pas d’or ne peut émettre des bank-notes ?
Marchandise d’inflation, sans couverture en or ?
Tête creuse, tu gis ici maintenant parfumée, offensée,
Cabotine !
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08 juillet 2023
Sortie de LIVR'ARBITRES n°42 avec mon entretien conduit par Antoine Katerji et que l'on peut lire intégralement ici
Qui connaît Aurore Cornu (1931-2021) ? Pas grand monde, à l'exception des cinéphiles qui se souviennent de cette mystérieuse actrice roumaine du Genou de Claire de Rohmer, ignorant sans doute qu’elle fut aussi poétesse, romancière, traductrice et même réalisatrice. Pierre Cormary (auteur de l’excellent blog littéraire Soleil et Croix) répare cette injustice en consacrant un livre inclassable (Aurora Cornu, Éditions Unicité, 2022) à leur drôle de couple platonique : elle, la vieille dame digne, qui a connu le Paris littéraire des années soixante, côtoyé de près Raymond Abellio, Jean Parvulesco et Dominique de Roux ; lui, le vieux garçon obèse qui se réfugie derrière les écrans par peur de se colleter à la réalité, spectateur de sa vie jusque dans son travail (il est gardien de musée). Un mélange d’Harold et Maude et de Ma nuit chez Maud, qui en fait une sorte d’équivalent littéraire du cinéma de Rohmer.
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1er juillet 2023
Soirée "Cosmose" (pour ne pas dire "apothéose")
à l'INSTITUT CULTUREL ROUMAIN,
organisée par IRINA ENACHE VIC, avec CRISTINA HERMEZIU,
DANIELA IANCU,
SAM AZULYS.
Vampire et écrivain
Heidi et Lancelot
Vouivre et rat
Libertinage et amour courtois, selon Sam Azulys
(Quelque chose de "Shining" dans cette photo où Aurora ressemble à Wonder Woman.)
*
Comme le laurier !
Merci infiniment, chère Raluca Prelipceanu, pour ce beau texte non seulement sincère et sensible mais qui est le premier à traiter directement de la dimension "politique" de mon livre.
Et parce que je sens le besoin de sortir de trop de visuel (on est vraiment dans un monde dominé par le visuel), je vais écrire un petit commentaire sur une de mes lectures récentes. Comme malheureusement entre le boulot et mes projets, j'arrive de moins à moins à lire de la littérature, je me suis délécté quand même ces dernières semaines avec le livre de notre ami Pierre Cormary sur Aurora Cornu.
Le livre est très bien écrit, le style fluide fait de ce livre une lecture facile. Les personnages sont presque vivants, on les voit défiler devant nos yeux. Le livre est lui-même un récit très visuel. Les descriptions sont très savoureuses, les épithètes ne dépassent pas la bonne mesure. Mais ce sont surtout les dialogues qui donnent vie aux personnages et qui entraînent le lecteur. De plus, les commentaires sur des extraits des films d'Aurora qu'il s'agisse du Genou de Claire ou de Bilocation, ainsi que des films que les deux ont visionné ensemble, renforcent cette impression visuelle.
La première chose que j'aimerais évoquer par rapport à ce livre, c'est le sentiment de présence dans l'absence. Au départ, tout parle d'Aurora sans qu'elle soit là : les films évoqués par Pierre, la tension de la quête, sa lettre. Aurora en tant que personnage apparaît seulement à la page 147 (jusque là suspens : elle apparaîtra ou pas, très bien évoqué par l'auteur), mais elle est presque plus présente dans son absence. Bien sûr, c'est la première version d'Aurora qui domine cette partie. La jeune actrice Aurora du Genou de Claire.
La personnalité d'Aurora est présentée sous ses facettes multiples, car elle même était une personnalité complexe : écrivaine, cinéaste, mystique, sorcière... La personnalité de Pierre semble se définir et se contourner autour de cette personnalité très marquante d'Aurora, comme le laurier. En fait le livre a deux personnages centraux : Aurora et Pierre. Pierre donne aux lecteurs sa vision d'Aurora. Il est sans doute tombé sous la fascination de l'actrice version jeune dirigée par Rohmer dans son film, mais il avoue être fasciné également par la vieille version d'Aurora qu'il finit par rencontrer. Il s'agit cette fois d'un autre type de fascination, pour quelqu'un qui a la conscience d'être né trop tard. Et en tant que lectrice, je me suis demandée quelle version est-ce qu'il a fini par aimer le plus. Bien sûr les fantasmes sexuelles sont surtout liée à cette jeune Aurora qu'il a vu dans le film de Rohmer. Pourtant c'est cette deuxième version d'Aurora qui le change et le façonne en le transformant en l'écrivain qu'il est à travers le contact réel - en plus de le libérer de ses inhibitions.
Pierre donne une image très fidèle d'Aurora, en décrivant sa taille, ses traits, sa façon de marcher mais par dessus tout son caractère. Aurora était indépendante et ne voulait accepter son aide au départ. Il évoque aussi son accent, élément de fascination pour l'écrivain, qui fait partie du charisme de la mystérieuse femme de l'Est qui avait charmé Rohmer.
La dimension mystique d'Aurora est également interprétée. Pour lui il s'agit d'un syncrétisme chez Aurora, d'ailleurs évoqué par plusieurs de ses amis proches. Aurora croit en réincarnation, donc elle est la réincarnation de cette Fanutza qui a vécu 500 ans auparavant et qui était la fille de Dracula - d'où son côté vampire. Pierre sent le besoin de fusionner avec son idole, de se retrouver en elle et elle en lui - jusqu'à vouloir devenir vampire comme elle. Pour lui, elle est la déesse au sourcil blanc, qui pourrait le faire fusionner en elle et le transformer à son tour en dieu.
Scène étonnante que celle où le fantôme d'Aurora traverse la rue Cognac-Jay. Certainement une projection mentale de Pierre qui la voit sous la forme d'Aurora l'actrice mais qui relève aussi d'un désir de retourner dans son passé à elle. D'ailleurs, le temps a, dans ce roman autobiographique, une dimension mythique qu'on trouve chez Mircea Eliade. Il coule à la fois dans le futur et dans le passé, le temps est imbriqué.
L'amitié "aurorienne" avec les oiseaux est aussi mentionnée. Il s'agit de cet oiseau symbole du folklore roumain, l'oiseau-âme qui est très présent dans la vie d'Aurora, le même oiseau sculpté par Brancusi, paysan comme elle, devenu aussi célèbre à Paris. Tous les deux étaient habités par les mêmes croyances et traditions paysannes. Il fait aussi partie de sa dimension mystique.
J'ai aussi beaucoup apprécié la manière dont Pierre évoque la période communiste en Roumanie. Il a sans doute appris tout par Aurora, mais aussi en lisant le propre livre de celle-ci, Fugue roumaine vers le point C. On pourrait presque penser que l'auteur a expérimenté lui-même toutes les privations engendrées par le communisme : premièrement la privation de liberté, ensuite celle de nourriture, toute cette pression, la trahison, la suspicion qui sont évoquées et aussi le discours d'Aurora par rapport au communisme qui mérite d'être lu par tous ceux qui sont inclinés vers de telles sympathies.
Pierre s'est aussi rapproché des amoureux d'Aurora. Il évoque le romancier Marin Preda, façonné aussi par elle d'une certaine manière et surtout son deuxième mari, Aurel Cornea dont il est un peu jaloux, même s'il affirme se sentir son ami.
Et peut être qu'on est même un peu dans ce mythe de l'éternel retour, puisque Pierre retourne plusieurs fois dans son livre à cette Aurora du Genou, son amour impossible à cause de la dimension temporelle et de ses limites. Et effectivement, à la fin du livre, encore une fois on retrouve ce retour vers le film. Boucle bouclée.
En réalité, le livre est assez complexe, car on peut y découvrir plusieurs dimensions : le passé, le présent, les films. Le réalisme se mêle avec le surréalisme, ce qui fait de cet exploit littéraire un roman biographique. Les personnages ont plusieurs dimensions, les descriptions réelles s'associent souvent au côté imaginaire.
Cette relation entre Pierre et Aurora, une relation si improbable entre le fan et l'icône est aussi un témoignage de courage. Avant d'avoir le courage d'écrire et de publier, Pierre a eu d'abord le courage de chercher son icône, d'assumer sa posture de fan, dans les yeux des autres, parfois un peu ridicule et aussi de s'accrocher à elle, mêlant leurs différences, elle, solaire, lui, saturnien (admirateur de Cioran).
Pendant la vie d'Aurora, la relation semble avoir un sens unique, c'est elle qui façonne Pierre. Après sa mort, c'est Pierre qui façonne d'une certaine manière Aurora, à travers cette vision d'elle qu'il nous offre dans son livre.
Raluca Prelipceanu
(03 juillet 2023.)
Avec Raluca Prelipceanu à l'ICS (institut culturel roumain), lors de la soirée "Cosmose" que ces dames m'ont consacrée, le 1er juin 2023 (à venir.)
BONUS - quelques photos de l'expo "vêtements traditionnels roumains" que l'on peut voir actuellement à l'ICS
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Merveilleuse soirée "Aimer, boire et chanter", hier soir, mercredi 14 juin 2023, au restaurant roumain, le (ou la ?) DOÏNA, 149 rue Saint-Dominique.
Avec Edith Cottrell, Irina Enache Vic, Daniela Iancu, Hugues Moreau, Hervé Weil, Etienne Ruhaud, Sam Azulys, Thibaut Serges, Alexandre, Jérôme V. et sa nouvelle compagne, Jean-François Rouzières , Guilaine Depis, Geoffroy Hermann, Stanislas Parvulesco, Liana Fulga et Laurence de Monaghan herself.
Très grand merci à Florin Popesco pour l'accueil, l'ambiance, les mets, les affinités, les clins d'oeil, la rigolade, l'émotion aurorienne. On va y revenir souvent, je crois.
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Le 09 mai 2023, mon livre à la librairie Kyralina de Bucarest en Roumanie - en attendant sa traduction. En voilà une petite consécration. Merci à Grégory Rateau pour les photos. Il va falloir l'organiser un jour ce voyage.
Le 30 avril, à L'Officine, 5 rue des Maronites (Ménilmontant),
présentation et signature de nos livres à Etienne Ruhaud, Gabriel Boksztejn (Hervé Weil) et moi - avec, entre autres, Pascal Varejka, Jean-Luc Bitton, Thierry Théolier, Raluca Prelipceanu, Irina Enache et Carnif Low qui nous a, comme à son habitude, méchamment croqués.
Merci infiniment à Claire Cecchini pour son accueil épatant et son rhum à la liqueur de myrtille succulentissime, j'en veux encore.
Et pour ceux qui veulent m'entendre palabrer sur mon livre avec de grands mouvements d'écharpe, c'est ici (merci à Jean-Luc Bitton)
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Le 28 avril, soirée LIVR'ARBITRESà La Maison Perchée (58 rue Mouffetard),
avec, entre autres, Antoine Katerji (que je remercie encore pour son invitation et son entretien avec moi à paraître dans le prochain numéro de juin-juillet), Pascal Manuel Heu, Pierre-Marie Sigaud, Hervé Weil (Gabriel Boksztejn), Florin Popesco, Léocadie Rochester et Noémie Halioua plus souveraine que jamais.
Bel hommage à Pierre Gripari par Alain Paucard.
Aurora et eau minérale
GB (sacoche) et FP (appareil photo)
PMH et AK
LR et moa.
Léocadie Rochester qui m'a fait tirer deux cartes de son tarot : La Tempérance et le Monde - "sleeve et livres", si j'ose dire.
PMS, NH et moa.
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"La voilà. Quelle tristesse. La maison bucolique où Le Genou de Claire a été tourné. Fini la pelouse. Fini le grand jardin. La maison a été agrandie sur la droite.
C'est aujourd'hui un espèce de buibui avec chambre d'hôtes."
Merci Ber Trand (et très triste, en effet.)
Le 19 avril 2023 (sur mon mur FB)
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Sur Radio Courtoisie, dans Le libre journal du cinéma, une émission de Pascal Manuel Heu avec Hugues Moreau et Florin Popesco, le 06 avril 2023,
Florin Popesco (qui a connu Aurora, enfant !!) et moi.
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Avec l'exquise Laurence de Monaghan, le 04 avril 2023, au Suffren.
- Mais alors, ça s'est passé comment le tournage du Genou de vous, racontez-moi ?
- Oh ! vous savez, pour moi, aujourd'hui, ça relève plus du souvenir d'enfance. J'étais en vacances et on s'éclatait. Il y avait mes parents, mes amis. C'était formidable. Et Fabrice faisait déjà la star. C'était lui ou rien.
C'est un très beau livre, un superbe roman, une géniale autofiction. Touffu, baroque, plein de vie et d'énergie spirituelle. Avec deux protagonistes, le narrateur, une sorte d'Ogre peu sûr de lui mais vorace et obstiné, et Aurora Cornu, sa muse, sa créature, une égérie du cinéma rohmérien, la belle roumaine brune du Genou de Claire, actrice, réalisatrice, poétesse, artiste sublime. Et autour fourmillent plein de personnages attachants comme ces deux-là. Pour celles et ceux qui aiment Rohmer, Aurora Cornu, le cinéma, les nuits blanches de Paris, il faut lire ce livre magistral !
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Un mot de GUILLAUME RENOUARD, le 19 mars 2023
Cher Pierre Cormary, j’ai d’ordinaire la mauvaise habitude de chercher à finir les livres le plus vite possible, sachant combien l’existence est courte comparée au nombre de livres qui s’offrent à nous, mais avec le vôtre, je me surprends à procéder différemment : je vadrouille, je billebaude, je prends mon temps, cherchant à faire durer le plaisir et retarder un petit peu le moment où j’arriverai à la fin. Votre roman me procure une sensation que je n’ai éprouvée qu’avec quelques auteurs, principalement Montaigne, Proust et Rousseau, celle d’être en compagnie d’un ami qui se confie à vous, tour à tour très drôle (j’ai littéralement pleuré de rire devant l’épisode de la nouvelle érotique envoyée à votre collègue du musée, c’était sacrément couillu de votre part), captivant (vos réflexions sur la religion et l’art) et émouvant (tout ce qui touche à la belle Aurora). Un ami que l’on n’a aucune envie de quitter, ce qui me conduit à volontairement ralentir le rythme de ma lecture. Le récit prend même parfois des allures de roman policier borgésien à travers le mystérieux personnage de Guilhem Hasting. Le fait que je partage votre goût pour Eric Rohmer, la théologie, Wagner, les cigares et les femmes de caractère ajoutant naturellement au plaisir de la lecture. Aurora était visiblement une personnalité hors du commun, et c’est un vrai bonheur d’apprendre à la connaître à travers vous. Vous deviez former un couple sublime. Je ne verrai plus jamais le Genou de Claire de la même manière, vous en êtes devenu l’un des personnages principaux. En vous remerciant pour cette aventure et en espérant vous lire de nouveau.
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Aurora Cornu, l'accoucheuse de Cormary,
par MAXIMILIEN FRICHE
dans LE BIEN COMMUN N°49
(mars 2023)
Qui est cette Aurora Cornu ? C’est d’abord « la femme que vous aimeriez aimer », autant dire que Pierre Cormary va cristalliser. Et il a raison puisque c’est bien le seul moyen que l’on a de s’extirper de la fadeur du monde et de retrouver les élans de l’adolescence, le seul moyen que l’on a d’être digne du héros de son enfance. Aurora Cornu, née Stéphanie Chitu, écrivain, poétesse cinéaste et … actrice, actrice de Rohmer, héroïne du Genou de Claire aux côtés de Jean-Claude Brialy. Et sujet du premier livre de Pierre Cormary. Celle qui ne se définissait pas comme mère mais comme sage-femme va faire accoucher l’écrivain. On le savait tous que Cormary était un écrivain, on attendait son livre avec impatience et certitude, on était certain que ce serait un livre sur sa mère et ce fut un livre sur la sage-femme qui l’a accouché, Aurora Cornu.
Cormary est né avec les blogs, un produit littéraire du web 2.0. Quand on est un geek littéraire nié par les rentiers de la littérature, on est bien obligé d’être dans le story telling pour exister dans la marge. Mais cette fois, il s’est carrément fait son film et il a bien fait. Il est tombé amoureux d’Aurora dans le Genou de Claire, cette bonne amie de Jean-Claude Brialy qu’elle manipule en le jetant dans différents bras au bord du lac d’Annecy. Un peu comme dans La rose pourpre du Caire, Cormary veut s’inviter dans le film, et ce sera finalement le film qui enveloppera toute sa vie. Cormary se fait enquêteur, il veut tout savoir sur l’actrice et en fera un papier sur son blog. Aurora fut d’abord la voix off de Cormary. Et le désir de se relier à cet invisible-là l’étreint. « Mais elle, où est-elle ? Est-elle-même encore vivante ? » Il va user de toutes les ficelles possibles et c’est finalement celle de l’ambassade de Roumanie qui marche. Et c’est à Orsay où il est gardien de musée derrière la statue de Rodin que Cormary entend pour la première fois la voix d’Aurora dans son téléphone. Ils vont se voir, cela va donc se faire. Il n’en revient pas, il ne s’agit plus d’écrire, il va falloir vivre, c’est une autre paire de manches, le chroniqueur en série n’a pas cette habitude. « Mon Dieu, ne me fais pas bafouiller, écris-moi un beau dialogue, fais-nous un beau film. »
Cormary entre dans son histoire d’abord en restant spectateur de lui-même, diariste de ce qui lui arrive. Pierre doute en permanence, il sait son indignité totale et c’est ce qui le distingue de la tourbe des semblables restés dupes d’eux-mêmes. Les premières rencontres, les premiers échanges sont terres d’élection mais Cormary semble guetter la chute, la peau de banane, trop beau pour être vrai… « Cette manie de me faire de mauvais films même après le bon ! » Médusé, comme au balcon de lui-même, il donne la réplique à son héroïne tout en cultivant le sentiment d’être une erreur de casting. Il s’avoue : « Je n’ai jamais été que le touriste de notre histoire. Le spectateur passif. Le fan pas au niveau. » et pourtant, nous allons assister à l’entrée de Cormary dans l’histoire, dans son livre, comme si la caméra faisait d’un coup la netteté sur son visage et que lui acceptait de jouer sa propre vie enfin. Et c’est parce qu’il accepte la vie qui s’offre à lui que son visage est désormais net.
Cormary fait sa cour
Cormary va faire le damoiseau de compagnie pendant cinq ans. Et Aurora n’en reviendra pas d’avoir son premier fan 42 ans après Le genou de Claire. Dès lors, une véritable relation amoureuse s’établit, et la plus belle qui soit puisqu’elle se fait dans la chasteté. « Un cœur romantique a tendance à exagérer son destin » et c’est heureux, cela fait des livres, les cœurs gros. Le fan et l’icône vont camper dans ce temps d’élection d’avant la rencontre des corps, ce temps où tout le reste devient méprisable. « C’est fou comme tout dans la vie peut se vivre sur le mode de l’effroi ou du sacré. » Les deux se rejoignent pour s’élire, se faire la courte échelle, se consoler, pour porter la vie à son paroxysme malgré leurs propres médiocrités, malgré les médiocrités du monde. Nous suivons cette montée fusionnelle pendant les cinq ans de rendez-vous amoureux d’abord au restau puis chez Aurora. Et nous les envions. On devient tous amoureux d’Aurora, de l’inaccessible toujours là. « Le seul amour est celui que les autres n’ont pas connu. » Aurora est vieille, ils vivent leur amour dans l’urgence, c’est-à-dire en savourant chaque minute. « Tout ce que nous vivons est de l’ordre de la première et de la dernière fois. » Cormary a l’idée depuis le début d’écrire son livre, ce fut même le prétexte à la rencontre. Non pour thésauriser mais pour rendre grâce. Il pense qu’après cette histoire, il pourra mourir. Non, il écrira et c’est la même chose.
Cormary se fait son livre
Cormary témoigne de sa naissance comme écrivain et se plaint : « A chaque phrase, sa fausse-couche. » … Et Aurora l’a fait définitivement naître. Il lui fallait donc avoir vécu pour écrire vraiment. « La vie qui va plus vite que l’écriture. » L’histoire du fan et de l’icône ressemble à une pièce de théâtre, chaque dialogue de restaurant est à jouer et rejouer. Cormary est obsessionnel, c’est l’homme du retour, du replay. C’est le dialogue qui permet à la relation d’être vraie. Les longs dialogues se suivent comme dans un film de Rohmer. On s’exprime pour l’autre, on ne lui répond qu’après qu’il ait fini, on écoute l’autre dans le silence et on traduit du silence ce qu’on a à lui dire. Il y a un continuum qui s’établit avec les longues discussions du Genou de Claire entre Brialy et Aurora. Pour Cormary, la morale de ce film préfigure son rôle d’écrivain : « L’échec du démiurge à changer le destin ». Dès lors, il ne sera que conteur de lui-même. Il passera au roman comme on passe à confesse sur un divan, préfigurant l’apéro. Le dernier film de Rohmer a donc été écrit, il ne reste plus qu’à le tourner.
« Je te pardonne d’avance les libertés et fantaisies inhérentes à une œuvre de fiction. » Aurora lui donne le blanc-seing. Elle le sait, on ne retient jamais un écrivain ! Elle aime trop la littérature pour empêcher un écrivain de naître. C’est ainsi que Cormary devint le dernier du clan Cornu, lerapporteur, l’écrivain. Ce sont sans doute les livres qui sont actes de naissance des écrivains qui sont les meilleurs, Aurora Cornu est de ceux-là.
Avec Hervé Weil, Marina Tore, Gustav Mahler et Richard Wagner dans Je tiens absolument à cette virgule, podcast du premier, mis en ligne le 10 mars 2023, ICI.
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Les métamorphoses d'Aurora Cornu ou le mystère de la bilocation,
par FABRICE MORACCHINI
sur le site d'ELEMENTS
(28 février 2023)
Certes, on peut toujours discuter à l’infini, et l’on ne s’en prive pas, que ce soit chez les spécialistes ou les profanes, pour parvenir à déterminer si tel ou tel livre, telle ou telle œuvre sont réussis ou non, mais il y a une autre question plus rare, sans doute beaucoup plus importante que la première, et à laquelle la critique réfléchit rarement : tel livre, indépendamment de ses vertus ou de ses vices formels, est-il capable de provoquer, de convoquer le destin, ou à défaut de se situer au même niveau que lui, d’infléchir le cours d’une ou de plusieurs existences individuelles, de rendre à la littérature le pouvoir de résurgence mythique ou de bifurcation providentielle qu’on trouve par exemple dans Le Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde, L’Autobiographie de Mark Rutherford de William Hale White, Le Temps retrouvé de Marcel Proust, Ulysse de Joyce, Sylvia d’Emmanuel Berl, Nadja ou Arcane 17 d’André Breton ?
Même s’il se situe évidemment à un tout autre niveau de création littéraire, c’est le cas, indéniablement, du premier livre de Pierre Cormary – le plus célèbre parmi les obscurs gardiens de musée de Paris et le moins connu parmi les blogueurs littéraires célèbres –, « Aurora Cornu », qui vient de paraître, avec une courte préface d’Amélie Nothomb, dans la collection Éléphant blanc dirigée par l’exemplaire et courageux Étienne Ruhaud aux éditions Unicité.
Aurora chez moi devant Le Genou de Claire (23 janvier 2015) - la bilocation "home" dont parle Fabrice Moracchini à la fin de son article.
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Un mot de MILAN DARGENT, le 27 février 2023
Bonjour Pierre
Ce petit mot pour te dire mon admiration : Aurora Cornu a été un immense plaisir de lecture.
J’ai été « scotché » comme disent les jeunes, tant tu sais emmener ton lecteur là où tu veux qu’il aille, avec une réelle maîtrise (par exemple la description du Genou de Claire dont tu m’as dit qu’elle t’était parfois reprochée est en fait exactement à sa place, et les lecteurs que tu perds à ce moment-là seraient de toute façon partis). Je craignais que ton texte ressemble trop à ton blog mais ce n’est pas le cas, il est celui d’un écrivain et non d’un bloggeur (dans le sens où tu as su « t’économiser »). Même tes influence littéraires, on ne les sent pas (s’il fallait en trouver une, je pencherai vers une accointance célinienne, mais bien masquée)… Que tu sois parvenu à évacuer (enfin, au moins apparemment) la dimension sexuelle d’une telle histoire est un véritable tour de force qui empêche de basculer vers quelque chose, au fond, de plus banal (et qui aurait sans doute satisfait le lecteur progressiste, te faisant chef des anti méméphobes !). Tu es allé vers autre chose, de singulier et, oui, poétique. Toi qui réévalue Breton, ton Aurora sera peut-être la nouvelle Nadja, une référence en matière d’histoires d’amour ! Je dois dire aussi que ton livre, bien que drôle, a quand même un fond d’une immense tristesse, qui secoue le lecteur.
Il a aussi son côté « Recherche » puisqu’il est au fond l’histoire d’une vocation.
Ma conclusion : sans les femmes on se ferait bien chier sur cette planète.
Aurora Cornu de Pierre Cormary est en quelque sorte le double du Aurélia de Gérard de Nerval. J’y ai retrouvé la même cristallisation et les mêmes effluves de grâce produite par cette cristallisation divine. Aurora Cornu est partout, même quand elle n’est physiquement nulle part : dans les traces de sa présence recherchée rue Cognac-Jay, dans sa Roumanie, dans l’espoir de la voir recevoir et ouvrir une lettre envoyée par notre auteur à New-York, en plein cœur de la rive gauche à Paris, et puis dans une voix soudaine qui roule les "r", ou bien encore dans une silhouette qui s’apparente à son physique, à son allure. Enfin, après valses hésitations, moult rêves vécus à voix haute, des déplacements imaginaires rendus possibles par la seule force de son amour, des correspondances enflammées, un défi permanent lancé à lui-même et à la face du destin, un réel sentiment d’ubiquité de l’auteur perçu par le lecteur, la rencontre survient de façon surprenante. Aurora Cornu apparait dans sa toute majesté : elle est cette artiste multi-cartes virevoltante, allurée et passionnante dont ne peut que s’éprendre un lecteur touché par tant de culture littéraire et cinéphilique. Une très belle amitié amoureuse débutera entre les deux protagonistes qui durera jusqu’à la mort d’Aurora, en 2021. Pierre Cormary nous gâte vraiment. En nous racontant par le menu ses rêves fous puis ses instants amoureux assumés avec son idole, il opère une mise à nu assez stupéfiante. C’est spirituel, presque mystique parfois et composé de multiples révélations sur la famille, et les femmes. Avec subtilité, il nous enseigne qu’Aurora l’aidera à devenir ce qu’il est. On plonge avec lui dans les méandres du passé, et des tourbillons un chouïa plus intimes.
Aurora à Saint-Malo, devant la tombe de René, avec Mirela Roznoveanu en 2000
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27 janvier 2023
Après celle à la Lucarne des écrivains (Crimée), deuxième signature à L'Européen (8 rue Biot, Place de Clichy) avec Etienne Ruhaud, toujours excellent en maître de cérémonie [bravo à lui pour le prix SARANE ALEXANDRIAN 2022 qu'il reçut la veille à la Société des Gens de Lettres, Hôtel de Massa], Hervé Weil, Carnif Low, Alexis Denuy, Cristina Hermeziu, Raluca Prelipceanu, Dana Nicolaescu, Bernard Bacos, Patrick Chartrain, Jonathan Boudina, Jean-Charles Fitoussi, Jom Roniger, Fabrice Chatelain, Auxence Denis et quelques autres. Je crois qu'on s'est tous bien amusés. Sans compter, en comptant plutôt, qu'on a vendu huit exemplaires, tain tain tain ! Le quatrième tirage se rapproche.
Grand merci à tous, anciens et nouveaux.
Et pour ceux qui veulent me voir bavasser avec mon écharpe Solutré, cliquer ici.
(Merci à Patrick Chartrain pour cette vidéo)
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Deux belles recensions, cet après-midi, sur Facebook : celle de BERNARD BACOS et d'AYMERIC PATRICOT (auteur, entre autres, d' Autoportrait du professeur en territoire difficile, Gallimard 2010, des Petits blancs, Plein Jour 2013, et de La Viveuse, Léo Scheer 2022), insistant tous les deux sur la dimension occultiste et mystique d'Aurora.
(Le 25 janvier 2023)
J’ai lu "Aurora Cornu", le livre de mon ami Pierre Cormary que je tiens en haute estime et avec qui je suis souvent en accord depuis que je le connais, c'est-à-dire 2005.
La trame de fond est sa relation avec cette femme qui a deux fois son âge, roumaine, actrice, réalisatrice, écrivain, poétesse. Il a fait une fixation sur elle quand il l’a vue dans "Le genou de Claire" d’Éric Rohmer, de 1970, qui est aussi l’année de sa naissance. Il veut absolument la rencontrer et y parvient via des recherches sur internet.
J’en connaissais déjà les grandes lignes, mais ce qui m’a frappé et séduit dans ce livre c'est sa dimension mystique. En effet Aurora a des pouvoirs chamaniques, elle s’intéresse à l’ésotérisme, à la gnose, aux outre-mondes..., ce qui est aussi mon cas. Elle est visionnaire, médium, habitée, sorcière, forte, fascinante.
Elle est syncrétique, c’est une chrétienne qui croit en la réincarnation et s’intéresse à toutes les religions, c’est aussi ma vision, elle offre à Pierre une Bhagavad Gita. Elle a aussi fondé un monastère orthodoxe en Roumanie. Elle partageait ces croyances avec son mari Aurel Cornéa.
Elle a réalisé un film "Bilocation” à Londres en 1972 avec Patrick Bauchau, une œuvre étrange, inquiétante, underground, occultiste. Elle a connu Jean Parvulesco qui a écrit sur elle, et s'est clashée avec Raymond Abellio.
Mais Aurora ne fait pas tout un cinéma là-dessus comme certains, elle ne se la joue pas, elle va droit à l’essentiel, pour elle c'est tout naturel, pour moi aussi.
Pierre confie qu’il ne cherche pas l’amour avec elle mais une "amitié mystique”. Il y a beaucoup d’allusions et de sous-entendus d’inspiration païenne dans leurs échanges, il est très réceptif et sensible aux signes, il réfléchit à 100 à l’heure. Elle veut le guider, lui donne des conseils, lui dit de ne pas avoir peur.
Du coup j’aurais bien aimé la connaître, d’ailleurs un signe du destin a fait qu’un jour, en 2013, j’ai rencontré Pierre au Flore alors qu’il y avait rendez-vous avec elle, il était tout remué ! Et dans son livre il parle aussi de gens de son entourage que j’ai connus dans une autre vie...
Vers la fin il parle moins d 'Aurora et plus de sa vie personnelle et familiale, pas toujours faciles... Elle meurt en 2021 à l'âge de 89 ans.
Ce livre est très touchant, plein de profondeur, d’intelligence et de sensibilité, avec beaucoup de fulgurances très justes et de références de toutes sortes, ça fait du bien par les temps qui courent !
Il est très bien écrit, avec un style fluide, direct, jamais abscons, mais ça, ceux qui connaissaient et qui lisaient Pierre le savaient déjà !
BERNARD BACOS
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Les livres paysages, par AYMERIC PATRICOT
Il y a des livres qu’on dévore parce qu’ils nous paraissent évidents, drôles, et qu’ils visent une sorte de point essentiel, comme ça m’est récemment arrivé avec le « Blabla et le chichi des philosophes » de Frédéric Schiffter (Puf, 2001).
Et il y a des livres dans lesquels on se promène, des livres paysages qui prennent le temps de s’étendre et nous invitent à baguenauder, virevoltant autour d’un sujet qu’ils entourent de mille attentions.
« Aurora Cornu » de Pierre Cormary, publié par Etienne Ruhaud chez Unicité (2023), préfacé par Amélie Nothomb, précédé d’une rumeur flatteuse voulant que Houellebecq l’ait recommandé, est de ceux-là. L’auteur y détaille son obsession pour Aurora Cornu, l’actrice et poétesse roumaine, égérie de Rohmer, et raconte leur improbable rencontre. Dialogues savoureux, digressions autobiographiques, situations cocasses… Le livre grandit avec l’ambition de tout cerner de la femme aimée, d’autant qu’il s’agit ici d’un amour sans sexe, longtemps fantasmé. Rêve de fusion par la présence et par les mots… Il y a de la courtoisie dans ce projet, de l’hallucination par la parole.
Mais le ton reste léger, l’écriture fluide, et le volume permet une curieuse expérience, proche de l’amitié : c’est avec patience qu’on suit longuement un homme dans la spirale émotive qu’il nous offre en spectacle. Ce qu’il ressent nous paraît familier. On dirait un partage mystique, en somme, d’autant qu’il se place sous le signe d’une personnalité qui ne rechignait pas à l’occultisme.
"C’est cette amitié que Pierre Cormary nous raconte, à sa manière, truculente, imagée, mais aussi au plus proche du réel. En effet, Aurora Cornu est avant tout un roman organique, fait d’humeurs, de bouffes pantagruéliques, de maladies aussi. Nous voilà propulsés dans un film italien, Pierre Cormary est un alchimiste qui parvient à faire du Fellini et du Ferreri avec du Rohmer. Il a un don particulier pour les dialogues tragi-comiques qui fusent et nous voilà aussi au théâtre, dans une pièce de Pirandello peut-être. Pierre Cormary, aux origines pieds-noirs, est décidément un homme du sud, cela transpire dans son roman."
L'ensemble de cet article (qui est le premier à parler de ma "mère cachée") ici.
Le 03 octobre 2015, Aurora entre ma mère (à droite) et moi (à gauche), rue Malard.
1er roman disponible aux éditions Unicités, collection Elephant Blanc
Pierre Cormary est né en 1970. La même année est sortie le film Le Genou de Claire d’Eric Rohmer, dont l’une des actrices est une jeune femme s’appelant Aurora Cornu. Originaire de Roumanie, la jeune comédienne (par ailleurs autrice, poétesse et scénariste) prête son élégance et son charme dans ce film qui, alors qu’il aura bien grandi depuis sa naissance, tapera dans l’oeil de Pierre Cormary, lequel tombera alors amoureux de cette héroïne à l’accent fort prononcé.
Il visionnera le film plusieurs fois et tentera de retrouver trace de cette femme sur les réseaux et autres plateformes (telles que Youtube) pour entrevoir, une fois encore, sa silhouette. Presque obsessionnelle, sa quête prendra une tournure concrète lorsqu’il rencontrera enfin son idole. Agé de 40 ans, et Aurora de presque le double, il tissera avec elle une relation d’amour (platonique) et d’amitié qui sera le terreau de ce livre.
Autofiction autobiographique ?
Forcément, nous sommes mis face à cette histoire sans réellement savoir si tout cela est vrai, si tout cela est fictionnel, si tout cela n’est pas simplement le fruit d’un esprit dérangé. En vérité, il est un peu tout cela à la fois car Pierre Cormary, personnage central et narrateur de l’histoire y déroule ses pensées, ses états d’âme et les conversations qu’il a pu avoir avec la dame, en maniant ses souvenirs avec humour, tendresse, poésie, et un spleen solaire facétieux.
[Si j'avais un titre à donner à cette critique de PASCAL LABEUCHE je l'appellerai "A coeurs ouverts" (le sien et le mien.) Merci infiniment, Pascal.]
Fini le Aurora Cornu de Pierre Cormary.
Bien plus que de cette Roumaine, bien plus que de la fascination de l’auteur pour elle et qu’évoque Amélie Nothomb dans sa préface, c’est de la quête d’une nouvelle matrice qu’il est question dans ce roman – car je n’hésite pas à parler de roman ici, au sens sollersien si l’on veut (Sollers qui me semble d’ailleurs une des principales influences de ce roman : références culturelles prises comme personnages secondaires, accumulation d’épithètes et de superlatifs à l’intérieur d’une même phrase, ton et souffle général des témoignages d’admiration, cadence au galop du récit qui ne se départ jamais d’une certaine légèreté, etc.)
Matrice, donc. Dès notre naissance, les choses sont mal barrées.
« Les mères sont très douées pour castrer leurs fils de leur père et les réaccoucher seules. »
Voilà donc que nous naissons, que nous sommes émasculés et que nous renaissons, sans avoir été consultés, d’une femme seule. Cette dernière pour glorifier la chair de sa chair, et pour couronner le tout, va le crucifier, ne voyant pas que la couronne qu’elle lui a mis autour du crâne pour prolonger son utérus n’est faite que d’épines. Du côté du père, aucune salvation possible, a fortiori depuis son mariage avec une bigote du ménage toute droite sortie, nous dit l’auteur, de La Petite Maison dans la Prairie. Le père, donc, qui ne manque jamais une occasion pour humilier son fils, la honte semblant être le sentiment dominant de leur dialectique : le coup du canapé Conforama est un sommet de cruauté, j’en avais les larmes aux yeux autant que le rire à la gorge, tant l’humour est une des vertus premières de ce roman, un humour cathartique bien souvent.
Crucifié, banni du cœur et du rang social et de son propre corps,
« le corps – celui qui sera toujours mis entre les femmes et moi. Celui qui m’aura fait la peau. Celui qui m’aura rendu immonde à mes propres yeux »,
on aime quand même, on veut aimer, tomber amoureux, tomber amoureux en pouvant ne pas imposer à l’objet de son amour sa chair profanée. Quel antidote à la profanation ? La sacralisation bien sûr - l’idole, celle dont on peut charnellement tomber amoureux devant un écran et avec qui l’écart d’âge permet de ne même pas avoir à se poser la question de savoir si rapport sexuel (qui n’existe pas comme dirait l’autre) il y aura : ce sera Aurora Cornu.
Aurora Cornu de Pierre Cormary renvoie donc bien malgré lui à la question qui me semble essentielle que posa en termes parfaitement justes Krishnamurti :
« Pourquoi y a-t-il une telle nécessité d'admirer l'autre ? Est-ce l'image de la personne qui se fait admirer ou est-ce le désir inné d'admirer qui trouve une place chez une autre personne ? N'attendez pas que je réponde à ça. »
Toujours est-il que leur histoire, que je laisse à chacun le plaisir de découvrir, est délicieuse. Et toujours est-il que Cormary a trouvé sa matrice, celle qu’il ne subit plus, celle qui ne lui fera plus subir le dégoût d’être soi ni la fatalité de ce dégoût. Il aura trouvé son accoucheuse - comme Aurora Cornu se définissait elle-même, pas mère car n’ayant pas eu d’enfant, mais (donc ?) accoucheuse.
L’auteur pouvant naître pour la troisième fois – et pour la première fois à lui-même – il a la force de s’amuser de tous ceux qui l’attaquent : trolls, paternel, conservatrice mal embouchée (je ne connais hélas que trop cette engeance misérable …) et jusqu’à soi-même.
Dès lors, une définition du bonheur peut être faite :
« Le secret du bonheur consiste à être attentif à ce dont nous avons besoin sans chercher à savoir ce qu’il pourrait y avoir derrière. Ce n’est pas à l’intention bonne ou mauvaise des êtres à laquelle nous devons être attentifs mais bien à leurs conséquences, bonnes ou mauvaises, sur nous. »
J’ajouterai que les intentions, nous ne les connaissons de toute façon jamais. Pas plus que la nature de nos admirations.
Alors soyons attentifs à nos besoins et à nos jouissances, oui. La jouissance de lire Aurora Cornu, roman flamboyant, très drôle et, par l’affirmation de sa propre responsabilité et le refus de la victimisation, hautement consolateur.
C’est une tranche de vie radieuse d’un gardien du musée d'Orsay, intellectuel discret en légère surcharge pondérale. Avant que l’action du roman ne commence, on comprend que l’ordinaire des jours du narrateur consiste à fantasmer intensément. Il est occupé à remplir un blog de critiques littéraires mystiques et toujours inspirées qui lui valent d’être trollé par des ilotes livides, à vider des bouteilles de blanc à la brasserie Suffren avec de puissants intellectuels, et à visionner des films des années soixante et soixante-dix dans son confortable studio proche de l’École militaire. Cet homme va se mettre tout à coup à fréquenter le monde réel : il l’aura voulu. Aurora Cornu est le roman exalté, poétique, musical et trépidant d’un fantasme qui devient réalité.
C’est un livre refusé par trente maisons d’édition, d’une virtuosité rare, original, autant savant que foutraque. Les comités de lecteurs l'ont jugé « hybride », « hors-norme », « inclassable », « déroutant », et franchement inadapté pour trouver sa place dans une collection classique. Le genre, lui, est assez conventionnel : un polar amoureux dans lequel le narrateur part en quête de sa muse, son idole, son idéal cinématographique. Aurora Cornu est l'une des protagonistes du « Genou de Claire », film phare d’Eric Rohmer daté de 1970, que tout le monde a oublié mais que l’auteur connaît sur le bout des doigts. Aurora Cornu, actrice et poétesse roumaine au français coloré par un accent d'Europe centrale, femme fatale et dominatrice, de celles qui font rêver ce vieux garçon de quarante ans au point qu'il se met en tête de la retrouver après l'écriture d'un texte à sa gloire.
De nature, le narrateur est angoissé, frustré par sa misère sexuelle et sa solitude. Il se réfugie dans la nourriture et l'alcool, part en guerre dans son esprit contre le monde entier de sorte qu'on pourrait presque l'identifier au narrateur des Carnets du sous-sol de Dostoïevski. Il part à la recherche de cette femme irréelle, ce mythe, sans savoir si elle est vivante ou morte, avec la crainte qu'elle se mette à lui éclater de rire au visage. Il lance des bouteilles à la mer et envoie des lettres enflammées à l’Ambassade de la Roumanie en France avant de découvrir, quelques mois plus tard sur son répondeur, cet accent roulant les "r" tant de fois entendu depuis son écran de télévision. A plus de quatre-vingt ans, Aurora Cornu est bien vivante au crépuscule de sa vie.
Certes, il pourrait s'avérer être un fanatique obsessionnel, un archétype de l'émission « Faîtes entrer l'accusé », mais elle concède néanmoins à le rencontrer, émue par la ferveur de sa lettre.
Ainsi débute une romance aussi exaltée que platonique qui durera neuf ans. Loin de les brimer, leur différence d'âge les soulage et les décharge du danger de la chair et de ses tourments. Pierre Cormary la déifie et la comble de compliments tout en sachant combien elle lutte contre une fatigue monumentale. Alors que son corps s'affaisse, elle demeure fière comme un coq et refuse de prendre son bras pour traverser les passages piétons. Durant neuf ans, ils écument brasseries et restaurants, festoient plus que de mesure sous l'œil ahuri des serveurs, interloqués par ce couple si mal assorti. C’est un binôme bizarre, tous deux boulimiques d’un genre particulier, par goût de l’excès plus que par peur du manque. Ils multiplient les orgies de caviar, engouffrent des montagnes d’oursins et de langoustines, finissent des caisses de champagne, terminent à l'Armagnac. Chaque retrouvaille est une fête accompagnée de quantités de nourritures fines et d'alcool, d'une joie furieuse de se retrouver dans l'allégresse. Le narrateur qui se plaint d'être toujours à découvert sur son compte en banque cite Alfred Hitchcock qui affirme que la nourriture est le substitut de la sexualité.
Une rencontre inespérée
« Aurora Cornu » raconte une histoire vraie d’amour platonique de près d'une décennie entre un être inadapté socialement, qui doit sa survie à son statut de fonctionnaire (gardien de musée, il vit au contact des œuvres qu’il protège au quotidien et qui le protège de « la vie active », du diktat de la performance qui balayent les gens comme lui) et une vieillarde sublime qui redécouvre sur le tard la joie intime d’être adoré. « Aurora Cornu » de Pierre Cormary raconte l'histoire de la protagoniste autant que du narrateur, une rencontre inespérée entre deux être amoindris et seuls qui pensaient ne plus rien avoir à attendre de la vie et dont on ne sait lequel est une béquille pour l'autre. Catholique, Cormary craint l'enfer (un mot à connaître : il est stygiophobe), tandis qu'Aurora, orthodoxe et mystique, croit en la miséricorde et en l'amour total, en l'idée que le mal n'est pas une fin en soi. Elle lui transmet sa force d'âme et son optimisme, sa confiance au destin. Elle le pousse à rencontrer des femmes, l'incite à vivre davantage et recommence, l'air de rien, à se maquiller.
Aurora est un peu l'aurore pour Pierre Cormary, elle le sort de la nuit, de ses angoisses spirituelles dans lesquels il s'était réfugié depuis l'enfance. Lui qui n’a jamais voyagé qu’assis sur son canapé et qui peine à sortir de son XVème arrondissement parisien, qui préfère les airs d’opéra aux grands voyages, qui n'a jamais fait que décevoir son père militaire qui lui voyait un avenir d'aventurier, met doucement un pied dans l'existence à près de quarante ans.
Avant Aurora, Pierre Cormary avait publié près de huit-cent textes sur son blog (entre autres sur : Shakespeare, Sollers, Patrice Jean, Chateaubriand, Nietzsche, Kierkegaard, Simon Leys, Benoît XVI, Emmanuel Carrère, Chesterton, Homère, Joyce, Montaigne, Sacher-Masoch, Gombrowicz, Machiavel, Molière) et participé de façon épisodique aux Cahiers de l'Herne (Michel Houellebecq et Pierre Michon). Avant Aurora, il avait noué quelques amitiés solides dans le milieu littéraire comme avec Amélie Nothomb qui préface son livre. Désormais, il s'autorise à devenir écrivain et à s'aimer. Pierre Cormary accouche d'Aurora Cornu sur le papier, quand elle l'accouche dans la vie.
Et de cet accouchement il n'écrit pas tout : il nous épargne les soins prodigués à sa muse au cours des dernières années de sa vie. Il ne raconte pas combien, à la fin, il fut son bâton de vieillesse. Il fallait connaître le narrateur à cette époque pour savoir l'énergie qu'il déployait pour adoucir ses derniers mois sur terre. L'auteur ne raconte pas qu'il allait régulièrement lui acheter ses médicaments à la pharmacie, qu'il se tenait à son chevet pour lui lire du Cioran à sa demande (auteur qui apaisait Aurora pour une raison obscure). Il ne raconte pas combien il l'accompagnait comme il le pouvait dans les souffrances de la fin de vie, ses rages de dents, ses douleurs au dos, aux genoux, aux articulations. Il jette un voile de pudeur sur ses derniers spasmes et ne raconte pas que c’est lui, technophobe au plus haut point, qui a inscrit la date de sa mort sur sa fiche Wikipedia.
« Aurora Cornu est morte dans la nuit du 13 au 14 mars 2021 à l’âge de 89 ans. Elle repose au cimetière parisien de Thiais, quartier roumain", est-il écrit en dernière page.
Gloire aux marginaux
On peut comprendre la réticence des éditeurs mainstream à publier ce monstre : la structure est foutraque, saccadée par des bonds dans le futur et dans le passé, les pages sur Aurora se mêlent à d'autres sur sa vie intime, son handicap amoureux qu'il assimile à « des problèmes de tuyauterie », son cancer de la lymphe qu’il juge « prodigieux » car celui-ci lui permet de passer neuf mois à lire Rilke et écouter Wagner, son travail feutré dans les murs d’un célèbre musée parisien, son horreur de l'intendance (ceux pour qui réparer une machine à laver revient à résoudre une énigme insoluble se reconnaitront).
Dans son premier livre, Cormary voulait tout écrire, se raconter, surtout ne renoncer à rien, ne pas céder le moindre pouce de ses marges, de ses excès, de ses délires. Il voulait faire un roman total, remplir à ras bord chacune de ces pages, comme il l'a fait tout au cours de sa vie avec son ventre (Pierre Cormary pesait 143 Kilos jusqu'à ce qu’une opération chirurgicale vienne lui rétrécir l’estomac il y a quelques mois.) Il accouche ainsi d’une œuvre en forme de poupée russe, où chaque fiction en cache une autre, de sorte que l’on se perd parfois et qu'on lui en veut presque de noyer tant d'élan dans une montagne d'anecdotes parasites.
Après neuf ans d’écriture religieuse, Pierre Cormary nous demande de lire son premier livre comme il est né : avec les forceps. Et finalement, ce sont les éditions Unicité qui l'ont accueilli et sa collection « éléphant blanc », dirigée par Etienne Ruhaud, autre agent muséal dans la vie civile qui se targue de publier des ouvrages hors-circuit, « onéreux et peu utile ». Une niche pour un livre massif qui passera inaperçu ou qui marquera l'Histoire, qui donnera à coup sûr à ses lecteurs l'envie de clamer haut et fort : gloire aux marginaux !
Aurora et moi, au Violon d'Ingres, le 16 octobre 2015 pour nos "trois ans".
Qui peut s'enorgueillir d'avoir connu Aurora Cornu (1932-2021) ? Romancière, poétesse, actrice - dans le célébrissime, donc, Genou de Claire d’Éric Rohmer -, cinéaste franco-roumaine, réalisatrice d’un film étrange, Bilocation, muse et première épouse de l'écrivain roumain Marin Preda, installée à Paris dans les années 1960, où elle épouse Aurel Cornea, ancien otage au Liban, avec pour témoin de mariage un certain Jacques Chirac...
Ceux qui l'ont connue savent quelle force magnétique avait sa personnalité, et que sa vie fut un roman époustouflant, taillé sur mesure. La poétesse qu’elle fut l’a d’ailleurs exprimé très tôt dans des vers qui sont tout autant une sorte de prophétie autoréalisatrice : « Une femme étrange aux traits taillés en marbre/Aux mains d’or, des yeux solennels comme la mer/Les sourcils arqués respirant un charme pur/Dont l’un est noir et l’autre comme le sel. »
Ceux qui n'ont pas connu Aurora Cornu ont maintenant ce roman-portrait hors norme que Pierre Cormary lui dédie en amoureux déclaré et assumé. Un admirateur transi, un disciple qui ne cache pas son obsession presque mystique envers Aurora, la « maïeuticienne » qui porte bien son surnom, en tant que révélatrice d'âme et de destins.
"En bon conservateur, Cormary ne supporte pas l’éphémère, il déteste les tables rases et la sous-culture amnésique, désire toujours plus d’arrêts sur images et de commémorations. Il n’a de cesse de se regarder vivre des instants cruciaux, des moments qui marquent au fer rouge, tout ce qui d’ores et déjà fait office de souvenir indélébile. Cormary est alors à la fois l’explorateur et le mémorialiste, celui qui éprouve et celui qui consigne, qui vit l’événement dans sa magie aurorale mais aussi dans sa récapitulation définitive. Le temps d’avant s’inclut dans l’instant présent qu’il patine et exhausse. En faisant de chaque geste et chaque remarque d’Aurora, le paraphe admirable de tout ce qu’elle a vécu jusque-là (et tout ce que le récit nous fait partager morceau de bravoure après morceau de bravoure ; sa jeunesse, ses amours, ses créations), il devient « le témoin invisible et rétroactif de leurs existences à tous. Le rapporteur ». Et quand il regarde chez elle ses albums photos, il peut ainsi à bon droit la voir successivement, mais en fait tout à la fois, « fillette, adolescente, fiancée, muse, épouse, camarade, cariatide, lectrice, actrice, réalisatrice, épouse encore, veuve, pythie, sphinge, légende, mienne ». Chaque instant est désormais mythifié ; tout s’inscrit dans le présent éternel. Si la littérature d’aujourd’hui nous a habitués à l’idée que l’autofiction devait absolument être atone, ennuyeuse, complaisante. Cormary démontre qu’elle peut être implacable et lyrique !"
Un mot de Céline Le Gall / Albine Gallois, le 15 décembre 2022
Je n'aurais jamais pensé que l'on ferait de moi un personnage de roman, un tannage à partir d'une de mes anciennes peaux — et pas la plus douce, c'est certain, mais Pierre n'a jamais eu peur des monstres. Pire, il sut même voir en moi bien plus et bien mieux que la plupart. Il put extraire, plus tard, de la louve que j'étais, ce quelque chose de très fragile qui m'effrayait, sans rien abîmer, pour me le faire contempler en pleine lumière. Il fait toujours cet effet à ceux qui ont assez confiance en lui pour l'écouter jusqu'au bout. Dans une certaine mesure, cet écrivain génial, qui fut mon camarade à la Sorbonne, m'aida à vivre pendant ces années où un pacte littéraire nous liait. Pierre comprend à peu près tout mieux que les autres et il sait l'exprimer, notamment parce qu'il est capable d'avoir une vision hors de ses émotions et de ses jugements, sans pourtant jamais se trahir. Sans lui, la fin de vie d'Aurora Cornu eût été fort différente. Il lui redonna de la vie, du sens, de la fiction aussi, lorsqu'elle était parmi nous ; et il lui a offert une forme d'immortalité lorsqu'elle ne l'était plus. Il l'a aimée absolument et l'on ne peut qu'être bouleversé de le savoir. Ce livre est un acte d'amour et, plus important peut-être, un acte de foi en la littérature.
Merci, Pierre.
Céline Le Gall / Albine Gallois
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LES REFUS "MOTIVES" DE 2019 :
FLAMMARION,
ALBIN-MICHEL,
LE ROCHER
Monsieur,
Votre manuscrit, Aurora Cornu, nous est bien parvenu et nous vous remercions de l’attention que vous avez porté à notre maison.
Le comité de lecture a apprécié votre écriture, qui va du maniéré à l’élégant, du brillant à l’excessif, parfois émouvante de sincérité.
Cependant, il a regretté que ce texte, très déroutant, soit le journal d’un écrivain qui voudrait écrire un roman, mais que le journal dévore et qui ne parvient pas à ses fins. Par ailleurs, ce journal pâti d’être composé en grande partie d’extraits d’un blog, c’est-à-dire de textes rédigés dans un style qui ne se prête pas à la publication. Enfin, le lecteur peine à entrer dans cet univers très autocentré et à y persévérer.
C’est pourquoi, en dépit des qualités de votre travail, notre comité de lecture ne l’a pas retenu.
Nous vous souhaitons de trouver un éditeur plus à même de mener votre projet à son terme et de lui donner toute la place qu’il mérite.
Veuillez agréer, Monsieur, l’expression de nos sincères salutations.
PS : Si vous souhaitez récupérer votre texte, faites-le moi savoir et je vous le renverrai par La Poste
Le Rocher, 05 décembre 2019
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Cher Monsieur,
Je suis navrée de vous décevoir, mais malheureusement votre roman a été refusé. Les membres du comité de lecture n’ont pas été séduits par les exploits ou non-exploits de votre narrateur en matière de littérature ou de sexualité.
Avec mes regrets,
Albin Michel, le 21 février 2019
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Cher Pierre-Antoine Rey,
Je vous prie de m’excuser d’avoir tant tardé à vous répondre. J’ai lu Aurora Cornu, sorte de monument dédié à une icône, un peu comme celui que dressait Jean-Jacques Schuhl à Ingrid Caven ou Simon Liberati à Eva Ionesco (et plus récemment Sollers à Dominique Rolin, en publiant ses propres lettres). Sauf que ce « livre monstre », comme vous le qualifiez vous-même dans votre note d’intention, se double aussi d’une sorte de roman de formation. On ne peut qu’être séduit par la singularité de votre livre, par son écriture si aiguisée, son infinie souplesse et par la joyeuse ambition de ce texte. Et ce qu’il se permet : tout, justement, car porté par une grande confiance en la littérature, en l’art plus généralement.
Mais, pour être tout à fait franche avec vous, votre livre aurait beaucoup de mal à trouver sa place dans les collections de Flammarion, plus volontiers romanesques. Mais je suis bien certaine qu’un autre éditeur, dont le catalogue accueille plus régulièrement ce genre « d’entreprise qui n’eut jamais d’exemple » saura mieux vous publier et vous défendre. Car votre livre est à bien des égards très réussi. Impossible de vous résumer ce qui m’a plu dans ce livre-somme constitué des deux portraits d’Aurora et de Pierre Cormary et où il ne se passe essentiellement que deux choses, qui en réalité s’enchaînent : d’abord la cristallisation stendhalienne et la recherche d’Aurora, et ensuite le projet de lui consacrer un livre. J’ai beaucoup aimé l’enquête autour d’Aurora, sortie et descendue de l’écran, comme chez Woody Allen, et cette intrusion, véritable coup de foudre, qui déclenche chez l’amoureux toute une série de recherches dans le but de reconstituer la biographie de cette inconnue, une vie cosmopolite et mouvementée. Le but étant bien sûr de connaître cette Aurora pour mieux la retrouver, si elle est encore en vie. C’est le « comment » la retrouver que vous mettez en scène et qui nous intéresse, car l’on sait dès la première page que Pierre l’a retrouvée. Et au hasard de cette enquête, le lecteur en apprend plus sur Pierre Cormary, qui nous livre ses confessions à la Rousseau, les souvenirs d’enfance et de jeunesse du timide et complexé qu’il était et demeure jusqu’à sa rencontre avec la vraie Aurora. Que ce soit au lycée, à la fac ou plus tard au musée, les timides manœuvres du héros (souvent fantasmées plus que réelles) autour des jeunes filles ou des femmes dont il rêve qu’elles pourraient lui imposer de délicieux supplices sont croquées avec une autodérision que vous maniez fort bien. On s’amuse aussi au récit du séjour à Grimaud pour Noël, du séjour de l’écrivain à Saint-Malo pour y travailler pendant qu’Aurora est une fois de plus à New York.
Mais pour finir d’être tout à fait franche, je vous livrerai les quelques réserves, subjectives sans aucun doute, que j’ai sur le livre : j’ai trouvé la cinquantaine de pages consacrée à l’analyse du Genou de Claire trop longue comme celles où vous écrivez la véritable guerre d’insultes ordurières que mènent des « trolls » (mais en réalité un homme) contre vous ou encore l’épisode sur la domina professionnelle [PARTIE ET CHAPITRE QUE J'AI ENLEVES DE LA VERSION DEFINITIVE ET QUI FERONT L'OBJET DE DEUX LIVRES AUTONOMES DANS QUELQUES ANNEES.]
Je vous souhaite très sincèrement de trouver un éditeur pour ce livre hors normes. Bien à vous
Flammarion, le vendredi 15 février 2019
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Aurora Cornu enfin disponible sur Amazon !
Attention ! Ils disent "temporairement en rupture de stocks" mais cela ne les empêche pas, s'il y a des commandes, de les commander à leur tour à Soleils distribution.
"Voilà l’histoire d’Aurora Cornu, l’un des plus beaux romans d’amour de ces dernières années. Avec ce je-ne-sais-quoi de terriblement attachant qui fait que même quand il m’emmerde avec ses longueurs, comme par exemple avec cette trop longue analyse filmique, au début du livre (les cinéphiles, race maudite capable de se toucher dix heures autour du travelling de la 71e minute d’un film indo-coréen de 1954 complètement oublié et oubliable, y trouveront leur compte), à la fin, je crois que tout est fabuleux chez Pierre Cormary, même l’ennui. Et peut-être même que ce livre n’aurait pas dû être autrement parce que son amour insensé pour Aurora Cornu, imaginaire, à la dérive, est là, dans cette structure folle."
Première librairie (Albin Michel, 229, bvd Saint-Germain, à cent mètres d'Orsay, chez Amélie !) à m'exposer - et comme quoi, les livres finissent par arriver partout (Angers, Nice, Saint-Malo !), et depuis cette semaine un peu plus vite, second tirage oblige.
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Quand Michel Houellebecq parlait de Kleist, Beethoven et moi (dans Marianne en mai 2015) :
« Les dernières fois que j'ai eu des conflits, si j'ai gagné, c'est en faisant preuve d'autorité et pas du tout de conviction ou d'habileté. Je n'ai jamais été foutu de faire publier le manuscrit de quelqu'un d'autre, par exemple. » Son dernier échec en date ? Celui de Pierre Cormary, critique et blogueur. « Je le trouve bon parce qu'il me surprend. Il y a des auteurs qui me surprennent. Mais celui que j'admire le plus, c'est peut-être Heinrich von Kleist. » A l'évocation de l'écrivain romantique allemand, il a semblé s'éteindre dans un « mmh », avant de se redresser sur sa chaise : « J'ai failli dire une connerie : "Il y a toujours dans le génie quelque chose qui surprend." Je me suis mis en tête Beethoven, qui est pour moi le génie absolu, mais il n'est pas surprenant. On peut être génial sans être surprenant. »
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Un mot de PASCAL ZAMOR (06 décembre 2022)
”- Demande au mendiant. Il le sait.
- Cela a un très beau nom, femme Narsés... Cela s'appelle l'aurore."
Très cher Pierre,
On ne va pas faire semblant. Nous nous connaissons et nous nous fréquentâmes régulièrement pendant quelque temps. Aussi vais-je m'adresser directement à toi.
Aurora - Aurore - l'accoucheuse de Cormary écrivain. "Lorsque, matinale, l’Aurore parut, doigts-de-rose..." Cormary naquit pour la deuxième fois.
Aurora. L'initiatrice. La prêtresse qui te fit prendre le chemin de l'amour (n'est pas d'ailleurs le titre du film que tu vis avec cette jeune femme à qui tu n'embrasses "jamais sans émotion les joues fessues", une très émouvante scène de baiser également, p 288 ). Le chemin de l'amour donc, et non pas de la charité (je ne sais pas d'ailleurs si tu es féru de charité). Un amour approbateur des êtres, des contraires. Le Oui Mollybloomesque. Un Oui orgasmique (vla t'y pas que je me mets à faire du Cormary). Ou plutôt devrais-je écrire Yes. Puisque la dernière lettre qui clôt le roman de Joyce (notre relation semble placée à l'ombre du barde irlandais !) en est aussi la première, comme dans un recommencement. Et que comme tu l'écris : "Tout n'a jamais fonctionné que dans la répétition, que c'est la deuxième fois qui fait exister la première." Mais attention. L'amour, il ne s'agit pas de le provoquer par on sait quel effort de volonté, il suffit et il faut le laisser venir à son heure. Et il faut croire que pour toi, son heure était venue.
Paraphrasant le Tao-Te-King, je pourrais même écrire :
"Qui connait l'amour embrasse tout ;
embrassant tout, il est juste ;
juste, il est royal ;
royal, il est Céleste ;
Céleste, il un avec la Voie."
Alors celui qui le connait peut s'épandre dans l'infini (remarque que pour toi infini et appétit ne sont pas incompatibles).
Un peu pervers, tu sais même faire preuve d'un brin de modernité puisqu'au cours d'un chapitre "joycien" (encore lui ), tu nous dévoiles la construction du roman en train de se faire. Te souviens-tu de notre discussion sur la mise en abyme sous le regard de la caméra d'un ami cinéaste ?
Alors que je lisais ton roman, le hasard fit - les chinois ne croient pas au hasard, ils y voient, au-delà des rapports de causalité, une mise en relation - que j'écoutai une émission sur Apulée et ses Métamorphoses. J'y entendis les mots suivants : "Moi, repris-je, je crois qu'il n'est rien d'impossible, et que tout se fait ici-bas par prédestination. Il n'est personne, prenez vous, moi, le premier venu, à qui il n'arrive journellement des choses étranges, de ces choses sans exemple, et qu'on ne veut pas croire...". Tiens me dis-je alors, c'est tout à fait le roman de Cormary (je te laisse dévorer le mot "prédestination").
Une dernière chose. Non content d'être émouvant, ton texte est aussi fort drôle. Le retour de Télémaque, entre autres, chez son Ulysse de père, alors que la maisonnée est prise en charge par une adoratrice de Monsieur Propre est à mourir de rire (amour rire).
Je te prie de croire, mon cher Pierre, à mon admiration la plus sincère.
Je t'embrasse,
A la revoyure.
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Aurora Cornu (née Stephanie Chitu le 06 décembre 1931 à Provita je Jos, morte le 14 mars 2021 à Paris - 91 ans aujourd'hui.
Page 159, la page préférée d'Alcazar Mops (et des intellectuels).
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03 décembre 2022
Pierre Cormary - Quand on me "reproche" la préface d'Amélie !
Y - Mais Amelie Nothomb … que dire ?
PC - Comment ça "que dire" ?
Y - Ca fait tache sur Aurore et sur le livre.
PC - Pour moi, c'est un honneur. Je pratique Amélie depuis vingt cinq ans, elle est très importante pour moi, je la considère comme un déjà-classique/populaire (rien à voir avec Musso ou Marc Lévy), qui aura un jour son intégrale en Bouquins et qui continuera d'être lue et aimée, sinon adulée, par plusieurs générations.
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Un mot de JEAN-YVES PRANCHERE, 02 décembre 2022
[Quand on a des lecteurs plus intelligents que vous...]
Cher Pierre,
Aujourd'hui, à 14h47, oubliant que Pierre Cormary était banni de FB, j'ai envoyé sur FB ce message :
"Ton livre est génial. Je le dévore — c'est une jubilation.
Merci de l'avoir écrit, vraiment."
Je viens de le finir (j'ai remis à plus tard mon travail urgent, ne pouvant me résoudre à décrocher du livre). Mes yeux se sont mouillés à la page 368.
C'est un livre magnifique. Epique, lyrique, drôle, touchant, galvanisant, transmuant par la grâce de l'écriture — ou par la lumière d'une autre grâce ? — les faiblesses et les ridicules de l'animal humain en réussites de l'expérience d'exister — de communier — et en délivrance du ressentiment (ah tiens, voilà un "re" dont le sens est négatif) expulsé par la gratitude.
Chapeau.
Pierre Boyer
(JYP)
Un peu plus tard, nous aurons une discussion en MP sur le livre et par extension sur nos Weltanschauungen respectives d'où est tiré cet extrait :
"Ta monadologie est celle d’une communication des substances. Ton syncrétisme correspond à une sorte de vision des choses en Dieu (de ce point de vue tu es du côté de Spinoza, ou plutôt de Malebranche parce que ton Dieu n’est pas celui de Spinoza) : tu perçois le plan divin où les choses convergent et où toutes les droites sont des courbes qui se rejoignent dans le même point infini (après tout, c’est la réalité physique de notre univers comme espace courbe à trois dimensions). D’où ton intolérance pour ce qui te semble caillou, obstacle, entêtement à tourner le dos au point de fuite — et qui te semble faire tache (la gauche qui boude au lieu de jubiler). D’où en même temps ton indulgence pour tout ce qui indique le point de fuite (Godard, par exemple).
Je dis bien : tu perçois ce plan. Et ton écriture travaille à le faire percevoir au lecteur. D’où l’effet galvanisant de ton livre."
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30 novembre 2022
Signature à La Lucarne des écrivains, 115 rue de l'Ourq, avec François Mocaër, Etienne Ruhaud, Noémie Halioua, Lou Fritel, Hervé Weil, Carnif Low, Catherine Leconte de Floris, Jean-Baptiste Arnaud, Hugues Moreau, Daniela Iancu, Raluca Barb, Raluca Prelipceanu, Anne-Amélie V., Enguerrand et Cecilie P. , Julien G. et Jean-Paul W.
On en a vendu dix.
Sinon, les commandes affluent bien. Bientôt, le troisième tirage.
Pour ceux qui veulent m'entendre présenter mon livre et en lire un extrait, avec de superbes effets d'écharpe, c'est ici
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Pierre Cormary, le 28 novembre 2022 - Chers amis, je serai donc, avec deux autres auteurs d'Unicité, ce mercredi 30 novembre 2022, à partir de 19 h 30, à La Lucarne des écrivains, où je tenterai de vous vendre mon livre et surtout d'être digne de lui - ou plutôt d'elle, Aurora Cornu, muse, égérie, sage-femme et tant d'autres choses. Une soirée qui me stresse un chouia (il paraît même qu'il va y avoir des questions aux auteurs !) mais qui sera aussi un prétexte pour nous retrouver, nous disputer et nous vanter.
A mercredi, donc !
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Raluca Barb, le 28 novembre - Romanul « Aurora Cornu » al autorului Pierre Cormary a aparut in Franta. Prefatat de Amélie Nothomb si sustinut de Michel Houellebecq. Comenzile sunt deschise on-line. Daca vrea cineva sa îl lanseze si în România, sa se manifeste in MP.
Le roman « Aurora Cornu » de l'auteur Pierre Cormary est apparu en France. Préface d'Amélie Nothomb, soutenu par Michel Houellebecq. Les commandes sont ouvertes en ligne. Si quelqu'un veut le lancer en Roumanie, qu'il se manifeste au député.
Pierre Cormary - Merci, future traductrice !
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Pierre Cormary, le 21 novembre 2022 - François Mocaër me dit qu'il est obligé de faire un deuxième tirage cette semaine. Et Etienne qu'il prépare trois ou quatre signature jusqu'en février tandis qu'Hervé Weil, toujours dans les mauvais coups, concocte mon invitation à son émission dans moins de trois semaines. Jamais tranquille, putain !
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Elise Nhouyvanisvong - In bed with Pierre Cormary (le 28 novembre 2022)
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Dans un restaurant de Port-Royal, avec MH, Lisis Li Qianyum et Martine Coupri, le 25 novembre 2022
Pierre Cormary – Évidemment que les lecteurs connus, ça compte. Mais maintenant, c'est des lecteurs inconnus que je voudrais.
Pierre Cormary - En tous cas au Suffren, je viens d'en vendre deux d'un coup ! A Caroline et Flore, plutôt ravies d'en être. Il est vrai que je leur fais de la pub.
Et Aurora y était connue comme "la dame aux oursins".
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20 novembre 2022
Salon du livre à Rambouillet, avec François Mocaër et Carole Carcillo Mesrobian. On en a vendu un - grâce, il faut le dire, au bandeau d'Amélie Nothomb, une mère m'ayant dit que sa fille était une fan d'Amélie et que si Amélie me recommandait, c'est que cela devait valoir le coup.
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Aurora Cornu et Jean-Claude Brialy dans Le Genou de Claire, par Jacques Cauda, auteur Unicité.
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Première réceptrice de mon livre, Scarlett Bengall, nouvelle panthère de Guilaine Depis (15 novembre 2022).
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Un mot de Patrick Chartrain (28 novembre 2022)
Publicité.
Critique lapidaire :
La plus belle histoire d’amour du XXIe siècle,
un auteur vivant,
une lecture vivifiante.
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Un mot de CHARLES DU PARDESSUS (22 novembre 2022)
Mon cher Pierre, Je viens de quitter ton Aurora et je n’ose imaginer ce qu’il put en être pour toi qui eus la grâce de la connaître. Il faut te remercier de l’acte de charité que constitue ton livre : tu aurais très bien pu garder pour toi cette déesse faite femme, mais tu as choisi de la rendre présente à chacun qui croit encore, comme toi, que la littérature est partout, et surtout là où on la cherche. Tu t’es risqué dans le genre le plus périlleux qui soit : le roman d’amour et ta réussite est d’autant plus exceptionnelle qu’elle est l’oeuvre d’un mal aimé. J’ai lu les plus splendides - car sincères - mémoires d’un puceau qui, tout abstinent qu’il est, en sait plus que tous les prétendus pratiquants. Si l’amour est de corps et d’esprit, alors en mangeant, en bavardant, tu prouves en avoir atteint les sommets avec une femme qui n’était pas ton genre - et d’ailleurs : on s’en fout des genres quand on aime ! Dans tes pages les plus fievreuses, tu prouves magistralement que la sensualité de l’esprit vaut bien l’esprit de sensualité. On y découvre un homme d’une force toute poétique, un homme qui peut se passer du monde, parce qu’il en porte un en lui. Plus fellinien que rohmérien, ton livre est la preuve vivante - combien il y a de vie dedans ! et pour cause : Aurora y est ! - que le le fantasme peut devenir réel, quand le réel n’est que fantasme. C’est le livre, dis-je d’un homme, mais c’est aussi celui d’un enfant. Les plus belles crises d’adolescence sont celles qui durent tout une vie, car en elles tout reste fervent, même les premières amours, qui resteront de fait toujours premières, puisqu’il ne saurait en y avoir de deuxième. Comme aime à le rappeler Peter Pan : « deux est le commencement de la fin ». Aurora est Une. Au fond, j’ai lu ton livre comme un conte ; l’ayant fermé hier et en parlant à une amie Roumaine qui me demandait de le lui résumer, elle même connaissant Aurora pour son idylle avec Marin Preda, je lui répondis : « c’est l’histoire de Peter Pan qui trouve son île imaginaire en suivant les traces d’une femme ». Aurora aura été la preuve réelle que le rêve est aussi vraie que la réalité. La littérature incarnée, en somme.
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Un mot de NOEMIE HALIOUA (15 novembre 2022)
Neuf ans d'écriture appliqués et trente refus de maisons d'édition pour un livre d'une finesse et d'une érudition rares, titanesque, foutrement structuré, avec des litanies de commentaires, de commentaires de commentaires, de fulgurances sur la vie et la littérature qui racontent aussi l'inadaptation aux codes du monde moderne et le refuge dans un univers parallèle, purement cérébral et spirituel, contemplatif, drolatique et totalement immature.
Et puis, bien sûr, cette rencontre avec Aurora Cornu, l'héroïne, cette dame âgée dominatrice et caractérielle, ancienne actrice roumaine, poétesse et traductrice à laquelle il voue un culte depuis les films de Rohmer, femme fatale qui le ramène à ses émois de petit garçon. L'accoucheuse de son premier livre, experte en fessées, le torture un peu mais toujours de façon platonique et il l'accompagnera joyeusement jusqu'à son dernier souffle.
Que dire si ce n'est que c'est un livre cormaryen, c'est à dire qu'il ne ressemble à rien, qu'il s'assume jusqu'au bout des ongles, de sa misère sexuelle de vieux garçon à ses plaisirs artistiques, sans oublier ses précieux billets de blog de l'époque (des morceaux entiers sont publiés tels quels). Cormary demeure rétif à tout conformisme, même si cela implique un sacrifice social. "Il faut aller au bout de sa subjectivité" me dit-il souvent quand je sens moi-même que je perds pieds, que je n'ose pas, que je crains d'aller trop loin lorsque j'écris.
Cette fois je n'irai pas plus loin car il ne faudrait pas déflorer la critique qui sera publiée prochainement. J'en profite simplement pour dire que je bénis le ciel de connaître ce Pierre Cormary qui fait partie de mes plus proches, avec qui je passe des soirées interminables à décortiquer l'enfer la littérature et l'amour (notre seul point de divergence après de milliers d'heures de discussion : lui dit qu'il n'y croit pas, ou pense qu'il n'est pas assez fort pour y croire, tandis que moi j'y crois et je pense même que c'est la seule raison de vivre qui vaille et ce malgré mes expériences plutôt catastrophiques en la matière.)
Bref, Vive Aurora Cornu et Pierre Cormary !
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Un mot de CRISTINA HERMEZIU (09 novembre 2022), la première critique !
Qui peut s'enorgueillir d'avoir connu Aurora Cornu (1931-2021) ? Romancière, poétesse, actrice (dans le Genou de Claire, d'Eric Rohmer), cinéaste franco-roumaine, première épouse de l'écrivain roumain Marin Preda, installée à Paris dans les années 1960...
Ceux qui l'ont connue savent quelle force magnétique avait sa personnalité, et que sa vie fut un roman époustouflant, taillé sur mesure.
Ceux qui ne l'ont pas connue ont maintenant ce roman-portrait que Pierre Cormary lui dédie en amoureux déclaré et assumé. Un admirateur transi, un disciple qui ne cache pas son obsession presque mystique envers Aurora, la "sage-femme" qui porte bien son surnom, en tant que révélatrice d'âme et de destins.
Sa vie parisienne et new-yorkaise est racontée ici par une plume qui fond nonchalamment érudition et auto-ironie, idolâtrie et esprit iconoclaste.
Félicitations , Pierre Cormary ! Et bravo aussi Etienne Ruhaud, l'éditeur de ce livre inclassable, décalé et envoûtant.
Cine are orgoliul să afirme că a cunoscut-o pe Aurora Cornu (1931-2021)?
Romancieră, poetă, actriță (Genou de Claire,d'Eric Rohmer), cineastă, prima soție a lui Marin Preda, stabilită la Paris în anii 1960...
Cei care au cunoscut-o știu ce personalitate magnetică a fost, cu o viață ca un roman, pe măsura uriașei sale forțe de seducție.
Cei care n-au cunoscut-o au acum acest roman-portret pe care i-l consacră Pierre Cormary, îndrăgostit declarat și asumat asumat. Un admirator subjugat și un discipol care nu-și ascunde obsesia aproape mistică pentru Aurora, "moașa", femeia-înțeleaptă revelatoare de suflete și destine.
Autorul îi povestește viața de la Paris și cea de la New York, amestecând cu grație erudiția și autoironia, idolatria și spiritul iconoclast.
Felicitări Pierre Cormary.
Și bravo Étienne Ruhaud, editorul acestei cărți singulare !
#decitit #AuroraCornu
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07 novembre 2022
Réception et sortie de mon livre.
C'est l'histoire d'un homme qui rencontre une femme.
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03 novembre 2002
Chez Aurora, sans doute pour la dernière fois de ma vie - avec la chère Daniela Iancu que je remercie.
+ Photo du documentaire "Cela mai iubita dintre pamanteni" ("le plus aimé des terriens" - émission de Marius Tuca du 03 août 2001, que l'on peut voir sur YouTube.)
+ ce poster d'Aurora caressant un oiseau en plein vol (cité pages 199, 282 et 371 de mon livre) désormais dans mon studio.
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02 novembre 2022
Tombe d'Aurora Cornu, cimetière parisien de Thiais, quartier roumain
MON ICÔNE, MA CAMARADE
Raluca Prelipceanu - Un moment de curatenie si de reculegere la mormantul Aurorei Cornu. Dumnezeu sa o odihneasca!
Un moment de recueillement et de nettoyage à la tombe d'Aurora Cornu pour la Toussaint !
Un moment de propreté et de silence au tombeau d'Auroa Cornu. Que Dieu ait son âme !