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JEAN XV - Ieschoua parle II : cep et sarment

cept, sarment,

Pink Floyd, The Wall (Alan Parker, 1982), animation de Gerald Scarfe tirée de la séquence finale "le procès".

 

 

De ce chapitre XV, qui fut le premier que je lus de Jean, en mars 1996, via une « pénitence » que m'avait ordonnée ce vendredi saint-là le curé de Saint-Léon, à la suite d'une tentative de suicide, légèrement surjouée, faite la veille chez moi à coups de rasoir adolescents, et que j'étais venu lui confesser (et parce que j'avais atteint l'âge, 26 ans, où il fallait faire quelque chose de ma vie et que « vivre [comme disait Flaubert] ne me regardait pas », ô putain que non ! Sauf qu'à l'époque je n'en avais pas encore les moyens, de ne pas vivre, comme je les ai aujourd'hui et depuis que j'ai intégré le musée d'Orsay), je retiens cette idée que je suis un sarment qui aura eu la chance inouïe d'être bien émondé, au fond pré-« sleevé » avant l'heure.

Autant dire que je me considère encore aujourd'hui comme un double survivant, d'abord de ces années-là où je n'étais qu'un zombie, puis de celles qui ont suivi (musée, blog, rencontres, Aurora) et qui, malgré tout le bonheur qu'elles m'apportèrent, furent aussi celles où je ne laissai pas de grossir dangereusement au risque de finir un jour en fauteuil roulant. Grâce à la  chirurgie bariatrique, cette Réforme de la chair, tout a changé et continue de le faire –  y compris question chair où je n'ai plus le droit de me planquer. 

Et pour ne pas changer, voilà que je me retrouve à raconter ma vie en plein chapitre XV de Jean, dit du Vigneron, du Cep et du Sarment. 

Dit autrement,  du Père, du Fils et du nous (encore)  –  du moi en l'occurrence.

 

« Tout sarment en Moi

qui ne porte pas de fruit,

il le coupe,

tout sarment qui porte du fruit,

il l'émonde,

pour qu'il en porte encore plus. »

 

Toujours cette idée terrible que celui qui n'a pas aura encore moins et que celui qui a déjà pas mal aura encore plus.

Mais moi qui n'avais rien à l'époque, pourquoi ai-je eu tant ?

Qu'ai-je fait au bon Dieu pour mériter d'être sauvé en règle par lui ?

Et plusieurs fois, en plus ! Le Vieux ne m'ayant pas laissé qu'une seule dernière chance mais bien soixante-dix au moins. C'est qu'il m'en faut, à moi, des anges, des transfigus et des miracles, pour que je saigne [daigne  –  mais le lapsus est intéressant] me réveiller de mes branlettes et de mon désespoir avantageux. 

À croire qu'il m'a choisi, moi, fils d'une orpheline de père suicidé !

 

Un jour, je devais avoir douze ans, ma grand-mère me montra le mot que son mari avait laissé dans la poche de sa chemise avant de se tirer une balle dans la tempe. « Mémêne, pardonne-moi, tout ça, c’est la faute à la guerre. » Il y avait deux taches de sang et quelques brins de paille coagulés sur le papier. J’ai beaucoup aimé ce sang. Le mien, après tout. Et que je compterai bien faire gicler tout le reste de ma vie à la face du monde.

Aurora Cornu, page 340

 

Décidement, ce chapitre est mien.  

 

cept,sarment

Christ vrai cep, icône du XVI ème siècle, voir fiche wikipédia

 

« Ce n'est pas vous qui m'avez choisi,

c'est moi qui vous ai choisis

et vous ai destinés

à porter du fruit,

un fruit qui demeure.

Tout ce que vous demanderez au Père

en mon Nom, Il vous l'accordera. »

 

IL NOUS L'ACCORDERA.

Le pire, c'est que c'est vrai. Tout le bien du monde me sera arrivé (du moins, le bien dont je suis capable) –  en retard, mais arrivé quand même. 

Et il n'y a aucune raison que cela ne s'arrête.

Même mon général de père est content de moi depuis mon opération, c'est dire. 70 kilos de moins en moins de deux ans ! Le seul truc militaire que j'aurais fait à ses yeux (et il n'a pas tort – même si, encore une fois, je doute de ma « volonté ». Je suis le mec le moins volontaire du monde. Je suis une brèle pas possible en tout. Preuve que l'échelle de Jacob m'ait bien tombée sur la gueule, Pirantone !)

De ce point de vue, je veux bien croire aux Mystères. J'en suis un à mes propres yeux.

 

« Je vous dis cela

pour que ma joie soit en vous,

que votre joie soit parfaite. »

 

OUI !

QUE MA JOIE DEMEURE !

MERCI MON DIEU !

 

Et pour finir, ce verset que j'aime beaucoup, vraiment, même si pouvant paraître socialement, politiquement, ontologiquement douteuse, mais qui me rassure, me sécurise, me légitime (soyons clairs, me fait jouir) :

 

« Rappelez-vous la parole que je vous ai dite :

le serviteur n'est pas plus grand que son maître. »

 

Notons en effet que Ieschoua l'a déjà énoncé lors du lavement de pieds (au chapitre XIII 16) et le redit ici en insistant bien.

Le serviteur n'est pas au niveau du maître.

Qu'est-ce à dire ?

Qu'il ne faut pas péter plus haut que son cul ?

Qu'il faut respecter ses maîtres ? L'organisation sociale ? Le système ? C'est Geoffroy de Lagasnerie qui va encore nous sortir un « Se méfier de Jésus ».

Tentons de comprendre. C'est-à-dire d'interpréter par le haut.

Perso (perso ? Ha ha !), j'y vois un appel à l'égalité mais énoncé de manière très subtile, paradoxale, non dite.

Le serviteur n'est pas plus grand que son maître.

Soit.

Autrement dit, il aurait pu l'être.

Il pourrait l'être.

Et visiblement, aux yeux de Ieschoua, cela ne le fait pas.

Il ne doit pas l'être.

Il doit rester à sa place.

Cette place qui est la sienne et que Ieschoua nous a fixés au chapitre précédent, demeures et compagnie.

 

Continuons.

Le serviteur pourrait être aussi grand que le maître  –  mais devrait songer à ne pas l'être.

Très intéressant, ça.

Il faut comprendre le « maître ».

C'est quoi le « maître » ?

Elon Musk ou la chapelle Sixtine ?

Bolloré ou Notre Dame de Paris ?

Ce qui me corrompt ou ce qui m'éduque ?

Ce qui me rabaisse ou ce qui m'élève ?

C'est comme ça qu'il faut lire.

C'est comme ça que je lis. 

Du moins, que j'essaie.

 

Reprenons.

Le serviteur n'a pas se hisser au-dessus de son maître. 

Le serviteur n'a pas à dégénérer en maître

Le serviteur n'a pas à s'inférioriser dans son besoin de supériorité.

Le serviteur ne doit pas à chercher à être maître du maître.

Le serviteur doit observer ce que le maître fait.

Et ce que le maître fait, c'est se mettre au service de l'autre.

C'est laver les pieds de l'autre. 

Le maître, c'est l'autre. L'étranger. Le prochain. 

Ou mieux, c'est ce que vous avez à faire, votre cause, votre travail, votre devenir.

Votre autre en vous que vous ne connaissez pas.

Votre Aurora.

Voilà.

J'ai trouvé.

Le serviteur n'est pas plus grand que le maître au sens où le maître, c’est l'amour  –  ou la cause, ou l'art, ou le livre.

Le maître, c'est ce que l'on doit servir pour s'accomplir.

Le serviteur, c’est celui qui doit servir son travail, son amour, son destin, son talent  –  son maître.

Le maître est ce qui vous apprend/incite/exhorte à être humble par rapport à soi-même et pour soi-même.

Par rapport à Dieu et pour Lui.

Le maître est ce que vous avez de plus grand en vous pour amortir votre vie. Pour donner les plus beaux fruits. Pour envoyer la flèche d'or le plus loin possible. Pour aimer comme il faut.

Seul celui qui sert l'Amour s'accomplit.

Seul celui qui sert maîtrise.

Je crois que là, on tient quelque chose.

Et comme il se doit, c'est le Paraclet qui nous aidera à tout ça :

 

« Quand viendra le Défenseur [le Paraclet] que je vous enverrai d'auprès du Père » etc.

 

Être soi en Dieu.

Être serviteur de Dieu qui lui-même nous lave les pieds.

Demeurer en Dieu –  rien que pour la beauté de l'allitération.

 

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Addendum :

C'est dans ce chapitre aussi qu'il redit le truc chiant : « aimez-vous les uns les autres ».

Alors je pense immédiatement au commentaire de saint Augustin autrement plus sexy :

« Aime et fais ce que tu veux ».

J'aime beaucoup ça parce que je pense immédiatement au contraire qui serait :

« Hais et fais ce que tu ne veux pas ».

ou mieux :

« hais et ne fais plus rien ».

À la lettre,

« AIME –  ET TOUT »,

donc,

« HAIS – ET RIEN ».

 

Pas mal ce cep, non ?

Et qui nous donne de bonnes raisons d'être chrétien. 

En fait, le chapitre le plus alcooleux de l'Evangile (parce qu'il fallait vraiment être ivrogne pour se comparer à un cep et faire toute une eschatologie là-dessus).

Et l'alcool, l'ivresse, c'est Underground, d'Emir Kusturica, notre film préféré à ma soeur et à moi, vu en avant-première au Max Linder, souvenir inoubliable et où l'on avait échangé avec Emir et qui ressort en copie neuve 31 janvier.

 

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Underground (Emir Kusturica, 1995)

 

 

À SUIVRE –  JEAN XVI Ieschoua parle III : Partir, revenir

À REPRENDRE –  JEAN XIV Ieschoua parle I : Enter le paraclet

 

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