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Vade retro Francesco.

Cet article a été publié sur le site de L'Incorrect, le 25 mai 2019

 

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Au début, on a accepté les coups de fouet du pape François. N’avions-nous pas, nous, vieux européens sur le retour, marchands du temple de l’ancien monde, Sodome et Gomorrhe 2.0, vendu nos âmes au Satan du nouveau, mondialiste, consumériste, innovateur –  de cette innovation qui ne s’arrête jamais et qui est une forme de l’enfer ? Folies LGBTQIA+, Dernier Homme « augmenté » chaque jour un peu plus avec son iPhones XR à « puce A12 Bionic capable de réaliser des calculs 50% plus rapidement que l’ancienne puce A11 » ou sa PlayStation 5 « de troisième génération octacore avec microarchitecture Zen 2 » et en attendant la vie éternelle via le clonage, la restructuration de la famille via l’enfant androïd d’AI de Steven Spielberg, le nouveau salut via l’intelligent design ?  Était-il juste, surtout, que nous soyons les seuls bénéficiaires de la mondialisation pré-stellaire ? Alors, oui, François nous corrigeait, nous morigénait, nous traitait en enfants gâtés et corrompus, et comme nous, bons petits blancs sanglotant pour un rien, nous sentions coupables de tout et de bien d’autres choses, nous acceptions ses mandales avec un masochisme tout chrétien. Surtout, François nous remettait à notre place qui n’était plus le centre du monde. Parce que voilà : la chrétienté n’était plus le centre du monde ni même le souci du christianisme.

 

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Le christianisme contre la chrétienté

C'était cela le nouveau credo et l’enjeu de ce pontificat : jouer le christianisme contre la chrétienté. L’orbi contre l’Urbi. La favela contre Notre-Dame (pas étonnant que le Vatican ait attendu vingt-quatre heures avant de réagir à l’incendie de celle-ci, ce qui indigna ce grand français d’Alain Delon, un vieux monument médiéval français n’étant plus tellement le problème aux yeux de ce pontife argentin n’ayant jamais caché son antipathie pour l’Europe et la France). Au fond, la mondialisation se retournait contre la civilisation qui l’avait inventée et d’une certaine façon c’était justice. L’Église catholique devenait universaliste à la lettre et François incarnait avec bonhomie le nouveau paradigme, Steve Jobs de la Nouvelle Jérusalem.

Tant pis pour nous, gréco-latins moisis, catholiques dégénérés et identitaires, occidentaux oxydés, qui nous nous retrouvions au piquet pour notre bien. « C’est en fils que Dieu vous traite, lit-on dans l’Épître aux Hébreux. Quel est donc le fils que ne corrige pas son père ? Si vous êtes exempts de cette correction à laquelle tous ont part, c’est que vous êtes des bâtards et non des fils. » (12 – 7).

À quel moment le bâtard finit par se réveiller en nous ? À quel moment commença-t-on à s’apercevoir que François était plus un lâcheur qu’un correcteur et moins un père sévère mais aimant qu’un beau-père bannisseur ?  Nous aurions courageusement accepté tous les châtiments papaux si le privilège avait suivi le châtiment mais François ne nous privilégiait pas, il nous abandonnait. Son jésuitisme dont on était en droit d’attendre beaucoup de belles choses géostratégiques se révélait punitif, remplaciste et pousse au crime. Il fit de nous des révoltés, des apostats, des bâtards de Dieu.  Pire : en nous niant, il nous obligea à le renier. Combien de croyants qui se détournèrent de l’Église pendant ce pontificat ? Désespérer ses enfants – si ce n’est pas là le crime par excellence contre l’esprit saint,  je ne sais pas ce que c’est. 

Car oui, il y eut très vite quelque chose de désespérant chez ce pape. Ses sorties sur l’Europe, ou plutôt contre elle, « vieille femme stérile incapable d’avoir des enfants »[1], et dont on imagina dans son esprit que seuls les migrants seraient capables de la réensemencer, finirent par lasser. Sa haine des nations[2], et particulièrement des nôtres, nous mortifia. Son opiniâtreté à défendre, partout où il allait, le métissage anthropologique et culturel, loin de nous unifier, nous insécurisa chaque jour un peu plus. Ses compromissions (pour ne pas dire soumissions) avec le pire de l’islam,  nous clivèrent jusqu’à la fracture. Certes, le berger abandonne le troupeau pour aller rechercher la brebis galeuse, mais lorsque François alla embrasser à Abu Dhabi le Grand imam d’Al Azhar,  Ahmed Al-Tayeb, et signer avec lui un pseudo grand texte de fraternité et de paix, mais fraternel et pacifique à condition d’accepter la charia comme telle, et qui affirmait que l’Orient spirituel pourrait remédier à la maladie de l’Occident matérialiste[3], c’est un loup des Frères Musulmans qu’il allait chercher. Et je ne parle même pas de l’inadmissible et imbécile comparaison qu’il fit un jour dans son avion entre le terroriste islamiste qui pose une bombe dans un endroit public et le cocu « catholique » qui tue sa femme et son amant[4], énormité si confondante qu’on se demanda s’il n’était pas un nigaud,  un traitre ou un dhimmi.

 

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En tous cas, un ennemi de l’humanité véritable, François oubliant dangereusement que l’homme éternel, celui de Patmos et de Jérusalem, de l’angélus et du clocher, de la terre et du ciel, ne « veut point quitter le visage du Seigneur ni sa patrie », selon le sublime vers de Hölderlin. Et il suffit de rouvrir la Bible à n’importe quelle page pour se rendre compte que toute l’histoire que raconte celle-ci est une histoire d’enracinement, de retour, de carte et de territoire – et de frontières (alors que, pourrait-on rajouter pour faire du mauvais esprit, il suffit d’ouvrir une page du Coran pour se rendre compte assez vite que tout y est question de conquêtes, de dominations, de razzias.)

 

« Dieu ne veut pas la migration »

Mais non, pour le pape François, il semble que l‘avènement du Christ, ce soit l’ère du Verseau. Son idéal civilisationnel n’est pas l’axe Athènes / Jérusalem, si cher à Chestov, mais Babel, la ville du vivre-ensemble absolu, « un seul peuple, une seule langue, un seul monde », celle-là même, ne l’oublions jamais, que Dieu démolit. Car Dieu, contrairement à ce qu’éructent les cathos de gauche, n’est pas mondialiste. Dieu tient beaucoup aux peuples et aux nations. « Dieu ne veut pas la migration », comme le déclare le cardinal Robert Sarah[5] dont le surgissement dans le débat politico-religieux cette année est pour le coup une véritable bénédiction –  et une possibilité de se réconcilier avec l’Église catholique, apostolique et romaine. Car il faut bien le confesser, avec Bergoglio, nous nous éloignions de plus en plus de celle-ci.

Grâce soit faite à ce cardinal guinéen, ami des peuples et des nations, d’ailleurs francophone et que nous pourrions accueillir en Avignon un jour si besoin était. Lui n’a pas oublié la « mission spéciale » donnée à l’Europe par Dieu et qui n’était rien moins que la diffusion de l’Évangile, la promotion de la personne et de sa dignité, l’invention de la liberté, la protection des valeurs familiales, tout ce que nous sommes en train de perdre et que nous tentons de compenser en recevant le migrant au risque de se faire envahir par lui « comme la Rome ancienne [le fut] par les barbares. » En vérité, encourager les migrations est criminel autant pour les migrants que  pour les accueillants et contraire à l'esprit d'Abraham, d'Isaac et de Jacob. Et faire du Christ un migrant est une imposture théologique. Là aussi, la parole du cardinal Sarah agit comme un baume contre la lie de François : « Le Christ, enfant, s'est réfugié en Égypte, à cause d'Hérode, mais il est rentré chez lui ensuite. De même, Dieu a toujours ramené son peuple en Israël, après chaque famine et chaque déportation en Babylonie. Un pays est un grand trésor, c'est là que nous sommes nés, c'est là où sont enterrés nos ancêtres. »

 

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La tentation sociale

Voilà qui parlera à l’homme, africain, asiatique, amérindien, européen bien plus que les salamalecs du pontife actuel. Et voilà pourquoi nous nous sommes détournés de lui comme lui s’était détourné de nous. À sa place, on irait écouter sur YouTube le Père Henri Boulad, jésuite franco-égyptien de rite melkite, aux homélies tellement plus avisées, roboratives et respectueuses de la vraie humanité[6], à mille lieux de l’éthique abstraite et mortifère du piètre successeur de Pierre. On relirait les textes du grand Benoît XVI, notre pape, et notamment le chapitre consacré aux tentations de Jésus dans le désert (tome un de son Jésus de Nazareth, somme théologique de notre temps) et qui nous rappelle que la première tentation est sociale. Car oui, le diable est social quand il exhorte Jésus à transformer les pierres en pains afin que le monde ne meure plus de faim – terrible exhortation, ô combien légitime sur le plan humain, mais qui n’est pas la raison première de la venue sur terre du Dieu vivant.  Certes, « le cri des affamés nous pénètre et doit nous pénétrer très profondément dans l’oreille et dans l’âme, écrit Benoît, (…) Jésus [n’étant évidemment] pas indifférent à la faim des hommes, à leurs besoins matériels, mais il les replace dans leur juste contexte et leur donne la place qui leur revient. »[7] Et c’est l’infâme détournement marxiste, dont François semble hélas se réclamer, d’avoir voulu faire de cette place la première. « Voir dans le christianisme une recette conduisant au progrès et reconnaître le bien-être commun comme la véritable finalité de toute religion, et donc aussi de la religion chrétienne, telle est la nouvelle forme de cette même tentation », écrit encore l’irremplaçable Ratzinger[8] avant de nous mettre en garde contre les propensions messianiques à faire du Christ le communiste qui aurait dû nous apporter l’âge d’or. Aujourd’hui comme hier, il nous faut résister à Barabbas que nous avons un jour choisi contre Jésus et que nous sommes toujours tentés de plébisciter, car enfin, lui est un homme d’action, un révolutionnaire, un résistant et non ce rêveur mythomane qui fréquente les usuriers et les prostituées. La voici encore la tentation suprême et satanique par excellence, celle qui consiste à vouloir accomplir le Royaume de Dieu ici-bas, qui promet le bonheur pour tous. Or, « aucun royaume de ce monde n’est le Royaume de Dieu, précise Benoît. Le royaume humain reste un royaume humain, et celui qui affirme qu’il peut ériger un monde sauvé approuve l’imposture de Satan et fait tomber le monde entre ses mains. »[9]

Aussi scandaleux que cela puisse paraître, on ne croit pas en Dieu pour des raisons sociales, économiques ou même culturelles mais pour des raisons spirituelles, existentielles, intimes. On se convertit au Christ pour ne pas mourir seul, pour ne plus avoir honte de ses souffrances (coupable ! coupable ! coupable !), pour espérer en l’amour même si on est dénué. On se convertit au Christ d’abord pour soi et non pour les autres – et même si les autres arriveront juste après et qu’on ne les aimera que mieux.

 

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Véronèse, Le Repas chez Simon le pharisien

 

L'onction contre l'action

De toute façon, les pauvres, on les aura toujours, alors que le Christ on ne l’a qu’une fois. Croire en Lui, c’est aussi faire preuve de gratuité et de luxe. Et préférer parfois le gaspillage sublime et antisocial à l’argent utile, tout ce qu’il y a de plus christique – et comme le merveilleux épisode de l’onction de Béthanie nous le prouve. Celui qui s’indigne que l’on achète du parfum pour son dieu (et par extension pour tout ce qui paraît vain et superflu, subjectif et divertissant : l’art, les monuments, l’apparat) plutôt que des médicaments et de la nourriture pour les plus démunis, celui-là raisonne comme Judas. Et comme chez tout chrétien marxiste, il y a un peu de Judas chez François. Sans doute est-ce un procès d’intention que je lui fais mais quelque chose me dit qu’il n’aurait pas été à l’aise à Béthanie, ni à Cana, ni même à Bethléem – avec ces rois mages qui apportent de l’or, de l’encens et de la myrrhe à un bébé au lieu de faire des actions sociales.

En vérité, François aura été le pape le plus anti-bethanien, le plus anti-onction qui soit. Or, le Christ fut aussi de Béthanie et Il aima les onctions. Le Christ, c'est l'onction plutôt que l'action. Il faut en finir avec ce « Christ » altermondialiste, activiste, contestataire, rebelle à la Barrabas ou philanthrope à la Judas. En fait, gauchiser le christianisme, c'est le tuer. Et François, produit du mondialisme et de la théologie de la libération, a failli le faire.

Alors pourquoi le Paraclet l'a-t-il désigné, lui, et pas un autre (Sarah, évidemment),  et comme le demandait l’ami Gabriel Nerciat dans l’un de nos fils de discussions ? Sans doute, pour nous réveiller de notre torpeur sociale et vivrensembliste. Pour nous rappeler ce mot de Chesterton que même les vertus chrétiennes peuvent devenir folles –  et que la foi ne saurait être une utopie pas plus que l’espérance un espoir et la charité (qui commence toujours par soi-même) un no man's land. Les voies de Dieu étant impénétrables, on peut considérer que François ne fut désigné que pour faire un travail apophatique – montrer ce que Dieu n’est pas afin de rappeler ce qu’il est. Un sale boulot dans lequel il excella et continue d’exceller. Alors oui, nous aurons bien souffert en François, mais c'est fini. Adieu Bergoglio. Nous prierons quand même pour vous qui n’avez pas eu la tâche facile de nous braquer ainsi. Mais il fallait peut-être ça pour que l’esprit se réensemence. Et que Sarah surgisse.

 

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[1]Comparaison qui offusqua Angela Merkel elle-même https://francais.rt.com/international/15373-pape-francois-angela-merkel-vexee

[2] « L’État national ne peut plus être considéré comme un absolu »

https://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/Pape/Francois-appelle-pas-perdre-conscience-benefices-lEurope-unie-2019-05-02-1201019204

[3] « l’Occident pourrait trouver dans la civilisation de l’Orient des remèdes pour certaines de ses maladies spirituelles et religieuses causées par la domination du matérialisme » http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/travels/2019/outside/documents/papa-francesco_20190204_documento-fratellanza-umana.html

[4]http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2016/07/31/01016-20160731ARTFIG00176-pape-francois-si-je-parle-de-violence-islamique-je-dois-parler-de-violence-catholique.php

[5] L’Incorrect n°19, entretien avec le cardinal Robert Sarah, page 18.

[6]Comme celle-ci consacrée aux limites du devoir d’hospitalité -   https://www.youtube.com/watch?v=atPttuTnyMo&t=5s

[7] Benoît XVI, Jésus de Nazareth, « les tentations de Jésus », Flammarion 2007, page 52.

[8] Idem, page 62.

[9] Idem, page 63.

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