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allemagne année zéro

  • Le bruit et l'odeur (Notes sur Lauve le pur, de Richard Millet)

     
     

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    En écoutant la Symphonie pour orgue de Saint-Saens et L’Ascension de Messiaen

     

    I

    « Ca m’a pris comme ça, voyez-vous, sous terre » Bien avant ses expériences ethniques dans le RER Châtelet-les-Halles où il remarquerait un jour qu’il serait le seul « Blanc » à bord, Richard Millet, alias Pascal Bugeaud, alias Thomas Lauve, était pris, un soir de novembre 1999, entre Saint-Michel et Châtelet, d’une crise de dégoût existentiel dans le métro qui se traduirait par un vomissement extraordinaire, décrit sur plusieurs pages, vomi des hommes, de l’époque, des souvenirs. 

    Le style train, « faulknérien », de Richard Millet. Ses généralités sublimes, ses fulgurances, ses présences réelles. 

    Les revoilà, les fadards, les gourles, les malaveignes, la terre chaude de pisse, les étrons du père, le vomi du fils pour le roman le plus répugnant et le plus beau de son auteur. 

    Le chœur des femmes – et dire qu’il passe pour un miso-narcissique – qui l’écoute sept nuit durant dans le pré de Nespoux, et qui met un espoir en lui, cet enfant du pays monté à Paris, afin « qu’il nous perpétue » - «  nous » dont  « le simple et obstiné respect du sang, de la terre et du nom – la meilleure part de nous-mêmes, en tous cas ce que nous aurions eu de moins mauvais. » Origines sacrées. Terroir religieux. Sang et sol. 

    Siom – Sion : la terre originelle, le peuple élu, sa Jérusalem inconnue et misérable (p 41). 

    Du « nous » des femmes au « je » entre guillemets de l’auteur. 

    Traversée de Paris qui commence par le Luxembourg où il hume la terre froide du parc qui lui rappelle celle de Siom et où il voit se lever des figures anciennes, des ombres, des morts. Richard Millet ou les revenants.

    Chaque senteur, bruit, émotion le ramène à Siom. Altérité qui renvoie aux racines : p 23, p 34 

    Le RER p 25.  Saint Michel, le Rostand. Les sourds-muets noirs et arabes des Halles. Le Père Tranquille. Mes propres endroits.

    « Je me suis senti laid » - la hantise de la laideur et du non-amour chez l’homme « à qui le souvenir même de l’amour ne peut tenir lieu de feu ». 

     « Moi qui ai toujours été plus propre qu’un chat ». 

    Le devenir femme de Millet -  « les femmes étant la nuit, la grande nuit des ventres, la nuit rouge et noire du plaisir, de l’enfantement, des fins dernières (…) la nuit féminine. » Et ce qu’il devient : « comme s’il était une femme, n’est-ce pas, cette femme qu’il lui semblait être devenu, à ce moment-là ».

    Centre Pompidou.

    Nuit des femmes, nuit des pauvres.

    L’horrible souvenir de son père qui, pour le punir, l’avait abandonné dans la forêt p 35. L’enfant abandonné par sa mère et contraint d’être élevé par un rustre sans cœur. L’horreur de l’éducation « à la dure ». 

    Le petit garçon qui aurait voulu pleurer dans la poitrine de ce père si dur, et rire avec lui « non seulement en guise de pardon mais pour marquer l’accession à un nouvel ordre des choses, à ce qui devait, me disais-je, être le cours normal de l’amour, quelque chose qui n’obéisse plus au châtiment et à la grâce, ni à une colère qui ressemblait au souffle d’une cheminée sans feu, mais aux élans du cœur, à ce qui nous fait bondir vers autrui au lieu de nous en éloigner et qui me faisait, moi, aller parfois hurler au fond des prés et des bois, loin de Siom…. » (p 41) 

    Mais l’on ne pourra jamais se débarrasser de la blessure, des fèces, du chyle, de ces eaux et de ce sang….  « … n’étais-je pas bien de Siom, de cette Jérusalem inconnue et misérable qui est partout et nulle part, en tous cas là où on souffre, où on s’accroupit pour souffrir et contempler le ciel, là où ça sent la merde, n’est-ce pas, dans la grande fraternité de l’excrément, au centre de cette céleste cité qui est ici-bas notre propre cloaque et rien d’autre, nos ancêtres le savaient bien, eux qui croyaient la trouver à Paris, comme maçons, cette Jérusalem… » (p 42) 

    Comme dans le parc de Finngans Wake – défécation et nudité..

    Le bruit et l’odeur. Les corps qui puent. 

    « .. non loin de l'endroit où, quelques années plus tôt, un jeune fadard avait tué plusieurs policiers et passants avant d'être lui-même abattu et sa jeune amie arrêtée - et toujours en prison, celle-là, dans l'étroitesse de son morne visage et d'un secret qui n'était peut-être que la vanité de l'amour fou ; dans une gloire, aussi, qui faisait de cette trop jeune Florence Rey une pauvre fille autant qu'une reine nocturne, une Vierge aux mains vides, une sainte muette, la soeur obscure et inverse de la princesse morte près du pont de l'Alma... »

     A Vincennes – faire parler les monuments. 

    Le morceau de bravoure, p 63 – 65 : enfance, solitude et lecture. La littérature maternelle et miséricordieuse qui sauve l’enfant (comme dans Le Sagouin de Mauriac). L'enfant sauvé par la littérature - la situation provoquante pour le pékin moyen.

    Les pas du père dans l’escalier à la fois menaçants et rassurants. Ce père qui n’aura jamais accès aux livres. Qui comme toutes les âmes simples se méfiera de la littérature comme de la peste. 

    L’arbre totem -  « … un beau cèdre du Liban près duquel il ne passait jamais rien sans y porter la main, toujours au même endroit, sous la première branche, comme sous le sein d’une femme, avec frémissement qui lui donnait, disait-il, l’impression que le temps s’enroulait à son poignet. » 

    Les morts de Millet : la fille de Pauline Dufresnois, de quinze ans.  

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    II

     Seconde nuit, les femmes continuent de l’écouter. Les femmes comme mères qui ne l’abandonneront pas comme sa mère l’a fait. Mais sa mère avait ses raisons. Fuir la terre des morts. Fuir la sainteté de la douleur. Fuir l’ignorance divine. Fuir la haine légitime de la littérature. « Personne, à Siom, n’a jamais lu au lit, n’est-ce pas ? » Le père Lauve qui blâme son fils de lire tant (car la lecture qui n’a jamais servi à rien), comme le père et les frères de Julien Sorel qui le battent quand il surprennent un livre à la main. [Et c’est pourquoi Millet se trompe quand il croit dans son discours décliniste, que les gens ne lisent plus, etc. En vérité, le taux en pourcentage de lecteurs a toujours été le même, et à Siom, aussi nul qu’aujourd’hui.] 

    On est toujours seul à voir les feu follets et à sentir ses propres pets. 

    L’haruspice familial (haruspice : un devin étrusque qui examinait les entrailles d'un animal sacrifié pour en tirer des présages quant à l'avenir ou à une décision à prendre.) Tout est dans les gênes, c'est-à-dire dans les fèces.

    La grande scène de l’étron du père. Maître de l’étron, du monde et du temps. « Veillant à ne pas baisser le pantalon au-dessus d’un serpent. »   

     

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    III 

    Jamais nous n’avions entendu un homme parler comme ça des odeurs, des organes, de la merde, en parler comme une femme, comme nous. Thomas Lauve fait partie de « tous ceux dont l’enfance n’est pas passé ». Nous, les femmes, qui avions compris qu’on ne se révolte ni contre un père ni contre un époux mais qu’on apprend à faire plier malgré eux, qu’on apprend à dominer, et qu’on abandonne s’ils font preuve de trop de résistance. Le féminisme paysan de Millet. « Nous sommes du côté de la terre, des saisons, de cycles et du sang ». La seule douleur valable : la perte d’un enfant. Ecouter l’enfant Lauve raconter « cette vie qu’il allait déployer devant nous, sur l’herbe, soir après soir, comme des linges. » 

    Helles – le collège à Nogent sur Marne où il est professeur de français. L’enfer. Ses élèves qui haïssent la littérature, qui l’appellent « Mister Love ». Cyril Gagneur, le caïd de la classe qui le traite de « bouffon ». La gifle qu’il lui donne et qui le laisse, lui, Lauve, au bord des larmes. Le drame avec le père – un autre connard de rustre, Jacky Gagneur, patron du café Le Rallye, qui le traite de connard et le menace du poing. Le professeur obligé de s’excuser plusieurs fois. Le prof obligé de demander pardon à son élève. 

    Heureusement qu’il n’a pas giflé un maghrébin, lui fait remarquer la directrice de l’école (p 121). 

    La petite Céline Bault, l’élève qu’il aime bien. 

    Au Père Lachaise. Puis au RER A – encore le train. Le style « train » de Richard Millet. 

    Ne supporte pas l’ail, ne supporte pas que les femmes pissent et chient comme les hommes. Ne supporte pas l’impureté. Je le conçois mais je ne le suis pas – car la pureté, c’est la mort (Pierre Jourde). La pureté, c’est le péché. 

    Les femmes qui font pleurer les hommes. Leur permettent, ou mieux, leur interdisent l’amour - avec « cet air avec lequel nous interdisions au petit Lauve l’accès de notre cœur, tant il est vrai que certaines d’entre nous aiment par-dessus tout voir pleurer les hommes, n’est-ce pas, non seulement dans le plaisir qu’ils tirent de nous et qui les rabat violemment sur le côté, vers la nuit heureuse, mais aussi dans l’abandon à la douleur, dans cette solitude qui le rend soudain si proches de nous qu’ils sont, alors, comme des enfants malades et qu’il ne tient qu’à nous – et à nous seules – de leur tenir la tête hors de l’eau, ou bien de leur donner le coup de pied qui les fera replonger au plus sombre d’eux-mêmes. » 

    La fin de la civilisation rurale « avec nous qui étions les derniers à avoir attaché des bœufs à des jougs, attelé des charrettes, lié le foin et le blé avec de la paille, battu au fléau, nettoyé notre linge à la main, fait saillir des taureaux, les béliers et les boucs, et cru à l’éternité. » 

    « Il était de ces êtres qui ne peuvent ni se supporter ni se détacher d’eux-mêmes, une sorte de vieil enfant. » 

    Autre mort : le suicidé sur la voie – et qui va revenir et revenir dans le texte. La grande compassion de Richard Millet. 

    Annie Blanck, torturée et tuée dans le Jura par deux Turcs en 94.  

     

     

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    IV 

    « Sa mère. Nous savions qu’il y viendrait : on en vient toujours à ça, n’est-ce pas, parler de sa propre mère, surtout un homme devant des femmes de notre âge, puisqu’il n’y a plus à faire le paon, à jeter de la poudre aux yeux, à voir la vie en rose… » 

    Les scènes de honte propres à l’enfance : la mère qui chante dans son jardin et que les écoliers entendent de la cour de récréation, à la grande honte de Thomas. La pire situation où tout le monde est innocent, la mère qui chante seule, les enfants qui se moquent d’elle, le petit garçon obligé de subir le rire inoffensif et meurtrier de ces camarades. 

    Le petit garçon abandonné (// Serge Reggiani) – « …parce que vivre n’était rien d’autre que se résigner au pire, à la fuite des mères et des femmes et des femmes, à la chute des corps, à la solitude. » 

    La mère qui quitte son foyer, qui quitte Siom. Les femmes la condamnent mais l’admirent secrètement. 

    « Le fil de la vierge » qui peut tenir en vie un enfant (p 167). Combien de mères la Vierge Marie a-t-elle remplacées dans le cœur des hommes et des femmes ?

    La scène chez le proviseur. Le père Lauve mécontent que son fils lise – au lieu de faire du sport. Dans toutes les familles, le père est le sport ou le travail. La fracture littéraire. 

    Chave qui a vu une fois la mère rue de Rivoli – et qui deviendra la promenade parisienne obsessionnelle de Lauve. Croiser un jour sa mère rue de Rivoli. Croiser un jour la femme à qui l’on n’ose pas parler. Attendre la grâce. 

    Le père qui punit le fils en l’obligeant à compter les aiguilles d’un pin. 

    Le père, l’antilittéraire par excellence, et pour qui la littérature est la rivale qui lui a pris sa femme et lui prend son fils : «… tous ceux qui n’avaient jamais existé et lui faisaient tourner la tête, ces personnages de romans qui l’avaient éloigné de son fils, l’avaient détourné de la vraie vie, laquelle était selon le père Lauve, la vie au grand air, la seule qui vaille, tout le contraire de cette vie de rêveur, de rat, de fonctionnaire, de professeur à quoi, dès l’âge de dix-huit ans, semblait aspirer le fils. » 

    Hommes / femmes ou « La grande division des sexes qui est pire qu’une ligne de front. » 

    Dureté des pères - « ..même si on ne regarde jamais vraiment un père dans les yeux, c’est trop dur, plus dur que le granit et plus profond que la nuit, alors qu’on peut se noyer dans les yeux d’une mère ou d’une épouse. » 

    « … parce qu’il fallait bien croire à quelque chose, n’est-ce pas, qu’on ne peut pas toujours souffrir, ou pas toujours de la même façon, et qu’il y a des larmes qui ne passent pas par les yeux. » 

    L’étron masterpiece du père qui l’exhibe à son fils et à Chave.    

     

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    Morts :

     

    -          le suicidé sur la voie Strasbourg-Paris.

    -          Anne Banks, l’immolée du Jura

    -          Marion, l’enfant disparu d’Angoulême.

     « .. et tous les inconnus de la souffrance anonyme, les oubliés, les enterrés vivants, les emmurés, ceux que la souffrance avaient jetés hors de leur nom et hors du temps humain. » 

    Le premier jour de classe. L’appel du début de classe – « le vieux rosaire de noms que, cet après-midi-là, je découvrais en m’émerveillant de leur fadeur, de leur parfum de France républicaine, héroïque, mourante, détachée de sa propre histoire comme des papillons morts ou des vocables de la Rome antique… » et qui lui fera rechercher ensuite « la justification quasi musicale, harmonieuse ou dissonante » de leur nom sur leur visage. Noms de visages, noms laids ou beaux. 

    La folie d’être père à son tour, y a songé (p 197). 

    Après l’incident avec lui, accorder à Cyril Gagneur le droit de distribuer les copies dans la classe. Triomphe du caïd et humiliation du prof.

    La description de l’odeur non raciale d’une négresse naine : « Il souriait encore, assis dans l’autobus à côté de la négresse naine dont il pouvait sentir l’odeur de femme noire tout en se disant que c’était en réalité non pas celle d’une race, ni même celle de la pauvreté, ou pas seulement cela, mais peut-être celle d’une condition et, par-delà cette condition, la disgrâce d’une femme qui montait chaque matin, à Neuilly-Plaisance, et qui le contemplait avec un ravissement sans bornes après avoir dévalé l’escalier du RER (p 207) 

    L’épisode du petit Philippe qui est une sorte de Kindertotenlieder et une imposture. Il rencontre dans un cimetière une femme qui a perdu son enfant – et pour faire bonne figure, s’invente, lui aussi, un deuil d’enfant, Pierre, sept ans. 

    Souffrances de femmes : machisme, maltraitance, prostitution, commerce de chair humaine, meurtre.

    Le nom des victimes de Guy George, égrené un à un. 

    Rencontre avec des fous en liberté. 

    Voyages au bout des nuits.

     

     

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    VI 

    « … comme si tout secret masculin était lié à une femme et que les femmes fussent l’unique secret des hommes, que seules les femmes, avec le Christ, pussent ouvrir une tombe et rappeler à la lumière celui qui s’était mis à gésir dans les ténèbres de son propre cœur. » 

    Rêver de retrouver la mère à Rivoli, où l’a vu un jour Chave (p 234). Le souvenir d’un autre qui devient le sien. 

    Ingrid, la première fiancée qu’il présente à son père et aux femmes de Siom. 

    Le souvenir du père lançant dans le feu avec une fourche les affaires de la mère partie. Les vêtements de la mère brûlés. Le père et le fils désormais seuls, damnés de l’amour, damnés des femmes. « Et probablement songeaient-ils, le père comme le fils, que l’amour n’est en fin de compte que cette vaine reverdie, cette illusion, cette défaite, l’abandon, la déréliction, même. » 

    L’Education Nationale, refuge des femmes et des hommes-enfants - « … l’enseignement public qui, à cette époque, était déjà le cimetière de l’esprit, le refuge des solitaires et particulièrement des femmes, celles qui n’en pouvaient plus de se morfondre chez elles, qui en avaient assez de la brutalité des hommes, de leur mépris, de l’obscénité, de la violence de leur désir… »

    Le petit garçon d’Ingrid qui croit que Thomas va être son père. La scène où il chie, où les chiottes ne marchent plus et où il est tenter d’accuser l’enfant ! [Avouer ses mauvaises actions, ce n’est pas si courant même dans l’autofiction.]

     Le « tu m’as humilié » au père qui n’a pas bien reçu Ingrid.

     

     

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    VII 

    Encore le chœur des femmes : « et que si nous l’écoutions tous, nous, c’était à peu près comme si nous étions à l’écoute du vent dans les branches des hêtres, des chênes, des sapins. Et puis nous sommes des femmes, presque des ombres, un faisceau de souffles, une conscience anonyme, de très vieux feux. »

    L’amour impossible ou incapable. Après Ingrid, Christelle et la vérité « qu’il était une sorte de Lazare qu’on eût aimé rendre à la lumière du jour mais qui ne se serait pas levé, qui n’aurait pas marché. » 

    L’odeur des règles de Manon, une nuit dans la salle de bain de la chambre d’hôtel. 

    Entre Christelle et Valérie – Intérieur avec deux femmes, encore et toujours. L’amour à trois (p 272) 

    Et ce moment où il croit avoir rencontrer sa mère ici et là, rue de la Folie-Méricourt, rue des Abesses, rue de Rome, place Dauphine. A la recherche d’une dame en noire. 

    Humanité infinie de Millet -  « … chaque femme possède quelque chose d’émouvant, de gracieux et de beau, par le fait qu’elle est femme, par son appartenance au sexe qui a le vrai pouvoir (…) de la même façon que tout être humain a quelque chose d’infiniment digne de pitié, même l’agressive Maghrébine du boulevard des Capucines, même le pire des individus, à cause de sa nuque, oui, la nudité désarmante d’une nuque…. » A rapprocher de ce que Maistre disait à propos d’assassins qui peuvent apprécier un coucher de soleil. 

    Obsessionnellement contre la peine de mort. Un jour, il voit la guillotine, dans une cour à Tulle. Karla Tucker. 

    Pour la beauté du nom de la rue du Faubourg-Saint-Antoine. 

    Le type, rencontré lors d’une errance nocturne, qui lui propose de le « débarrasser » de sa nouvelle copine, Véronique, ce genre de type qui « feraient tout pour ne pas rentrer chez eux ». 

    Nocturnes.

    Son aveu qu’il invente parfois de toutes pièces des histoires de tuerie à la Limonov -  « J’étais entré au désert, je parlais en vain, le récit de mon prétendu crime sonnait sans doute pour eux comme de la littérature, et il n’était rien qu’ils méprisassent autant que la littérature. » Mais alors, La confession négative ?

     

     

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    VIII 

    Microfictions du malheur : le fils obèse et fou abandonné par sa mère. Encore les désespérés, les fous, les criminels, les suppliciés, les enfants perdus.

    Le RER Châtelet-Les Halles, enfin ! Les putes de la rue Saint Denis. Son ancienne élève qui fait le trottoir. La mort violente de Jacky Gagneur.  

     

     

    IX 

    La mort du père.

    Le père qui lui sourit pour la première fois : « …il n’y aurait plus qu’une seule personne : le fils devenu homme dans l’absence du père et le père arrêté, refoulé, récusé dans ce fils qui ne lui ressemblait pas et qui était pourtant son sang et grâce à qui, à ce moment, il semblait se contempler et se recomposer dans le visage filial. » Et le fils qui ne se sent pas encore assez vaste pour contenir le père qui va désormais ne pas cesser de grandir en lui. Devenir le père de son propre père, Villani disait ce genre de chose. « Nous sommes la tombe de ceux qui nous ont donné la vie. »

    Après l’enterrement, la famille Masquelin qui le ramène à Paris. Les beaufs incultes qui tournent en dérision tout ce qui est littéraire, et « pour qui George Sand est d’abord une baiseuse ! » Le seul moment humoristique du livre 

    Suit le couplet antifrance. Et Millet, parfois lassant à force d’être anti-tout, là, anti-kiwi, anti-café. 

    L’aveugle.

     

     

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    X

     

    Le septième soir. 

    Vanessa Dieudonné. Il n’y a que des races supérieures. 

    Son dernier cours à Helles. Sa démission. 

    Céline Bault, 16 ans. Son anniversaire. Richard en boîte de nuit ! 

    Le refuge en langue, en forêt française, en Orient. 

    Dans le RER.  L’attaque des rebeu. Alors qu’ils veulent le molester, un des gars de la bande, le reconnaît comme son ancien prof. Le prof « sauvé » par son ancien élève. 

    Place d’Italie. 

    Le plus sublime roman de Millet. 

    Peut-on faire un grand roman xénophobe ? Oui.

     

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