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  • La démission de Benoît XVI : Total respect !

    Sur Causeur

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    Au-delà des clichés et des réactions convenues qui n’ont pas manqué depuis l’annonce, avant hier matin, de la démission de Benoît XVI par lui-même, ce qui frappe surtout est la fascination de plus en plus transparente des media, et sans doute d’une partie grandissante de l’opinion, y compris la plus bouffe-chrétien, pour le pape et le dispositif papal. Ce deux-cent soixante-cinquième souverain pontife d’abord, tellement conspué, honni, caricaturé, alors qu’il fut un génie intellectuel, un professeur hors pair (ses encycliques sont mille fois plus lisibles que celles de Jean-Paul II, son Jésus de Nazareth un chef-d’œuvre d’inspiration et de clarté),  un théologien d’immense niveau qui osa réhabiliter l’Eros et l’Agapé dans une encyclique historique, un antimoderne de grande classe qui prit toujours l’époque à dépourvu (et pour que l’Eglise dure, il faut qu’elle soit antimoderne contrairement à ce pensent les imbéciles à la Karl Zéro, lamentable de démagogie lundi soir au Grand Journal), un expert en humanité comme il y en a peu eu en un siècle, un saint qui purgea l’église de son pire démon (la pédophilie), un homme d’une beauté et d’une délicatesse extraordinaires et qui, en se retirant aujourd’hui, donne la plus formidable leçon d’humilité aux hommes de pouvoir, et d’une certaine manière exhorte le monde à savoir s’arrêter. « Anagké Sténaï », « il faut s’arrêter », disait le vieil Aristote.

    Voyez comment les télés en parlent, même celles qui lui sont le plus hostiles, et comment elles sont malgré tout sous son charme, se demandant ce qu’il va faire pendant ses trois dernières semaines, où il va aller se reposer, quelle musique il va écouter. Le pape, seul monarque à ne jamais avoir de « collègue », souverain d’un autre temps et pourtant du nôtre, et qui pour cela, attise le respect, au moins la curiosité. Tout laïcard et républicain que l’on feint d’être, personne n’est insensible au fonctionnement de l’église romaine. Son « conclave » (un mot magique) dans la chapelle Sixtine (un lieu magique), ses votes à répétition inspirés autant par le « calcul » que par l’Esprit Saint, sa fumée blanche (un rituel magique) et qui Annoncera le successeur de Benoît et au fond de Pierre, parce que voilà, on a beau dire, mais cette institution de deux mille ans, la plus vieille du monde et dont on annonce la mort toutes les semaines, force l’admiration dans l’indignation même qu’elle suscite, excite l’intérêt plus que n’importe quelle autre, sans doute parce qu’elle rompt avec la médiocrité ambiante. Médiocrité de nos démocraties, médiocrité de nos Hollande, Sarkozy, Merkel, Obama, médiocrité absolue de nos valeurs humaines trop humaines, médiocrité sociétale, bling bling ou friendly, médiocrité de notre monde et de nous-mêmes qui ne voyons rien à part le bout de notre nez, et face à ça, la grandeur et l’humilité, les pompes et la misère, les ors et le cilice, la croix et l’encens, l’âme et la transcendance, la misère et la Gloire.

    Tout, dans cette religion surréaliste, chrétienne d’origine païenne, nous interpelle. Ses  improbables Mystères (et qui ne sont en rien des « secrets » comme le pensent ceux qui ont trop lu le Da Vinci Code),  sa Trinité et ses anges, ses miracles et son Immaculée Conception, cette Vierge Marie qui a eu un enfant sans rapports sexuels (et à laquelle tendent, c’est le plus grand des paradoxes, tous ces LGBT), ses valeurs intransigeantes et qui paraissent impossibles, donc sublimes, à suivre, au moins à essayer de suivre, cet Homme-Dieu à jamais étonnant et bandant pour la raison, son credo de Nicée-Constantinople qui, quand on le lit vraiment, est le truc le plus ébouriffant de tous les temps, comme si le monde moderne, post-moderne, mutant, zombiesque, était encore secrètement attaché à ces formes délirantes de la condition humaine divinisée, comme si les imbéciles avaient la nostalgie de l’idiotie primitive et sacrée, comme si le corps glorieux du Christ était ce que l’on avait inventé de plus érogène, comme si enfin, la pesanteur réclamait encore et toujours la grâce.

    Non, ce Carême va être grandiose.

     

    Lien permanent Catégories : Benoît XVI (2005 - 2012), CAUSEUR Pin it! Imprimer