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  • Stanley Kubrick - La terreur et le désir VII

     

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    Cameo Stanley !

     

     

    stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queerLa féérie Eyes wide shut

    A l’instar de tous les films de Kubrick, Eyes wide shut (1999) déçut à sa sortie. On ne voulut pas comprendre le film. On le dit ringard, grotesque, inconcevable dans une époque comme la nôtre. Pensez ! Un film sur l’amour conjugal, la différence sexuelle, l’éternel féminin !  Pas de doute, l’auteur de Lolita avait viré sénile. Qu’est-ce que c’était que cette façon de mêler aussi étrangement le sexe et la mort, d’abord ? De faire du désir un tel problème ? De sembler découvrir « à notre époque » que la femme pouvait elle aussi être un sujet désirant ? De mettre tout le paquet sur un type à qui s’offre mille possibilités de baise spectaculaire et qui n’en profite jamais, se frustrant à chaque coup et du coup nous frustrant aussi, nous stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queerspectateurs ! Et pour finir, de sembler cautionner cette idée étrange que le retour au bercail serait la seule solution aux angoisses d’un mec. Quelle pitié ! Quel pas en arrière ! Comme s’il fallait avoir peur du sexe ! Quelle insulte jetée à la face de Catherine Millet et de Dominique Strauss-Kahn ! Et puis cette scène d’orgie qui sous-entend que les puissants de ce monde sont des partouzeurs infâmes ! Les libertins, Société des Amis du Crime – l’abject amalgame ! Ils ont raison, finalement, les contempteurs de Kubrick quand ils disent que son cinéma a toujours été ennuyeux, pompier, anti-humaniste et que son dernier opus est rétrograde, puritain, insupportablement frileux dans son soi-disant « féminisme ». La femme, sujet sexuel et rédemptrice de l’homme, la belle affaire ! Et la théorie Queer, et la libération sexuelle, et Simone de Beauvoir, stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queerqu’en faite-vous, monsieur le rabbin ? Car enfin, les choses ont bien changé entre les hommes et les femmes depuis l’époque de Schnitzler d’où est tiré Eyes wide shut, non ? A cette question posée par le scénariste Frédéric Raphaël, Kubrick répondait qu’il ne le croyait pas. CQFD. Le vieux était bien gâteux et réac !

    En vérité, comme Barry Lyndon était un film anti XVIII ème, et comme Orange mécanique était sans doute un film anti-soixantuitard et anti-babacool, Eyes wide shut se présentait comme un film anti XXI ème siècle – c’est-à-dire osant refoutre du négatif dans une époque qui s’en était cru dispensée à jamais, osant revenir sur l’innocence de l’inconscient, osant remettre en lien Eros et Thanatos, cette vieille rengaine biblo-freudienne. En vrai subversif qu’il était, Kubrick comprit que c’était en insistant sur la difficulté de l’instinct sexuel qu’il allait prendre l’époque à rebrousse poil. Jeter un soupçon sur la prétendue libération sexuelle.  Reproblématiser la stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queerdialectique du dedans et du dehors. Et montrer en quoi il peut être difficile de faire l’amour. Filmer l’errance d’un homme comme il y en a beaucoup et qui, apprenant que sa femme a failli un jour le quitter pour un bel officier de marine, contacte une jalousie imaginaire, puis des fantasmes imaginaires et se retrouve en de bien embarrassantes situations. Car il ne faut se donner des fantasmes que l’on n’a pas. Il ne faut pas croire que l’on est capable de s’encanailler comme ça. La mésaventure de Bill, c’est la mésaventure du pigeon des Deux pigeons de La Fontaine qui un jour, plein du « désir de voir », décide d’aller à l’aventure et va de déboires en déboires avant de s’en revenir au nid d’amour. Tel un mari prodigue, Bill finit par sortir de cette nuit infernale et revient au bercail avouer à sa femme tout ce qui s’est passé (en fait, rien du tout). Celle-ci lui pardonne, lui demande de l’accompagner, elle et leur fille, dans un magasin de jouets pour faire les achats de Noël, et devant un rayon de peluches lui signifie qu’il leur faut d’urgence recommencer à « baiser ».

    stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queerAutrement dit, ils ne le faisaient plus depuis longtemps et c’est la raison pour laquelle leur couple battait de l’aile. Autrement dit, la fameuse scène du miroir devant lequel on les voyait s’étreindre, sous la musique fameuse de Chris Isaac, « Baby did a bad bad thing », était un simulacre – n’était-elle d’ailleurs pas coupée au moment où Nicole Kidman nous regardait, nous spectateurs, d’un œil étrange, comme pour nous dire : « mais que croyez-vous ? c’est parce que vous nous voyez en train de nous embrasser nus devant vous que vous en déduisez que nous allons aller jusqu’au bout ? » En effet, que voit-on exactement dans Eyes wide shut ? Un homme qui ne regarde plus sa femme. Une femme qui regarde le spectateur quand son homme fait mine de la prendre. Des femmes et même des hommes (le réceptionniste d’hôtel) stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queerqui ne cessent d’évaluer les désirs en faillite de cet homme. Des gens masqués qui regardent d’autre gens masqués baiser comme des machines. Un type masqué qui n'a visiblement pas sa place là et à qui on fait une sorte de Mamamouchi mortifère. Une femme qui vient sauver in extremis ce type et qui est peut-être celle qu'il a sauvé la veille chez un autre type qui lui fait partie des types masqués. Un imbroglio qui n'en finit pas mêlant ce que l'on a vécu avec ce que sa femme vient de rêver. Des rues dans lesquelles on erre sans fin – nouveau labyrinthe mental. Des jeux de miroir qui altèrent sans cesse le sens de ce que l’on voit. Des doubles en pagaille, situations et personnages qui se font écho jusqu’au vertige. En vrac :

    - la première soirée chez Ziegler (Sidney Pollack), sorte de stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queerpréfiguration « habillée » de l’orgie du lendemain soir ;

    - les deux mannequins qui veulent amener Bill « jusqu’au bout de l’arc-en-ciel » qui sera le nom du magasin de costumes ;

    - Marion, l’amie des Harford qui vient de perdre son père et qui tombe subrepticement dans les bras de Bill comme Alice a failli tomber dans les bras du marin ;

    - le mari de Marion qui arrive juste après et qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Bill ;

    - Bill qui aurait donc pu devenir le « marin » de Marion ;

    - un bal costumé érotique qui donne l’impression que le stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queermonde entier est une machine baisante et dans laquelle celui qui n’a pas sa place risque d’être jugé et exécuté (pourquoi pensons-nous au Procès de Kafka en avançant cela ?) ;

    - un cauchemar d’Alice qui a été le vécu cauchemardesque de Bill ;

    - deux mêmes « violet », celui de la robe de la prostituée, celui des draps du lit des Harford ;

    - deux prostituées, dont l’une a contacté le sida et avec laquelle Bill faillit coucher la veille ;

    - deux femmes mortes, ou plutôt une en deux (la « pute » de Ziegler qui se révèle être, sans qu’on puisse réellement stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queerle vérifier, la « sauveuse » de Cruise) ;

    - deux femmes nues pour une – selon la vision de Michel Chion : lorsque dans la séquence de l’orgie, on voit, en un premier plan, une femme masquée entrer au bras d’un homme en cape dans la bibliothèque où se trouve déjà Bill, puis, en un second plan se diriger vers lui pour l’inviter à la suivre dans un lieu retiré, eh bien, ce n’est plus la même femme ! « Elles ont le même masque et accompagnent le même homme (d’où la confusion), mais elles n’ont pas les mêmes seins (plus lourds pour la seconde)  ni la même toison pubienne (plus épilée sur la première). Normalement, tout spectateur en salle devrait le remarquer – mais pour cela il faut qu’il regarde bien les parties tabous des corps qui s’exhibent devant lui, qu’il compare seins et pubis. Il a peut-être honte de regarder ce qu’on lui montre, le spectateur, il n’ose pas toujours bien voir ce qu’il voit. » Il se révèle en fait un bien piètre voyeur, le spectateur, exactement comme Bill se révèle un bien piètre agissant. Faire semblant de voir, faire semblant de désirer, mais ne rien voir et ne rien désirer – en voilà une drôle d’odyssée du cul !

     

    stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons, amour, sexualité, adultère, libération sexuelle, théorie queer, Tout voir pour ne rien voir – tel semblerait l’aboutissement de la vision kubrickienne. La surexposition comme aveuglement final. L’exosquelette pour un corps eunuque. La pièce vide. Et comme  pour compenser cet aveuglement, la tentation du « récit non-iconogène », c’est-à-dire du récit sans images, du récit qui passe d'images, en l’occurrence celui d’Alice racontant à Bill son rêve orgiaque lors de la scène la plus casse-gueule du film. Difficile en effet de ne pas montrer à l’écran une scène aussi forte que le rêve d'Alice et de se contenter de filmer sa parole (un peu comme le récit « pornographique » de l’infirmière dans le Persona de Bergman) en même temps que cette parole fait sans cesse allusion à ce qu’a vécu Bill au château et que par contre l’on a vu jusqu’à la nausée dans la séquence précédente. Bref, ce que l’homme a vécu, en fait, une humiliation sexuelle, la femme l’a rêvé, et ce que la femme a dit avoir pu vivre (l’amour avec le marin), l’homme se l’imagine. Voilà le pauvre Bill encastré entre deux méchants rêves : celui où sa femme l’a vu humilié (et qu’il a réellement vécu) et celui très humiliant qu’il fait en imaginant sa femme avec un autre (mais qu’elle n’a pas vécu). L’homme prisonnier des images, des siennes et de celles des autres. L’homme qui fantasme des choses impossibles et qui se retrouve homme fantasmé. L’homme qui s’imagine des désirs alors qu’il n’en a plus et que sa femme en a encore. L’homme que l’on menace de déshabiller contre son gré et qu’une femme nue vient sauver in extremis, du moins ce qu’on lui fait croire. L’homme qui peut croire un moment donné, et le spectateur avec lui, que sa femme était aussi l’une des participantes de la soirée - alors que narrativement, c’est impossible, mais tant pis, l’important est que l’image génère d’autres images, et puisqu'Alice a pu rêver l'orgie, c'est que quelque chose de surnaturel se passe entre elle et son mari. L’homme qui périt de toutes ces images, vraies ou fausses, parce qu’il a les yeux grands fermés.

    stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queerOn serait alors tenter de dire que si l’image sans parole est toujours fausse, la parole sans image est toujours vraie – en plus d’être le salut de l’homme, aliéné aux images. On se tromperait encore. Dans Eyes wide shut, chaque parole est répétée à l’infini selon un psittacisme qui la rend encore plus hésitante, voire bégayante – les personnages passant le plus clair de leur temps à répéter ce qu’on leur demande,  Bill en premier lieu. Que cela soit avec Alice lors de la scène du joint  : « En quoi es-tu une exception ? - En quoi je suis une exception… », puis :  « Où tu te situes ? - Où je me situe ? » ; puis avec Domino, la prostituée qui l’aborde dans la rue : « Entrez stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queeravec moi ? – Entrer avec vous ? », et avant de reprendre son manteau : « Vous devez partir ? – Je dois partir ? » ; face à l’homme en rouge dans le château : « Le mot de passe pour la maison ? – Le mot de passe pour la maison ? », puis : « Déshabillez-vous. – Me déshabiller ? » ; le lendemain, avec Sally, la seconde prostituée qui apprend à Bill que Domino a fait le test HIV et qu’elle a reçu les résultats : « Séropositive. – Séropositive ? » ; enfin de nouveau face à Alice : « Qu’est-ce que ce tu penses qu’on devrait faire ? – Qu’est-ce que je pense qu’on devrait faire ? », enfin, lui à elle : « Pour toujours. – Pour toujours ? – Pour toujours », cela juste avant  le « fuck » final qu’elle lui propose et qu’il a la sagesse, nous allions dire la virilité, de ne pas répéter. En fait, comme le dit Chion (dont nous avons emprunté ces quelques exemples de psittacisme aux quarante-six qu’il repère dans le film !), « dans Eyes wide shut, former des mots est un acte et un choix – ce n’est pas toujours une chose facile et naturelle ; chaque parole semble jouée ou étudiée. » D’où le rythme extraordinaire de ces paroles qui semblent ralentir sans cesse le film, dilater jusqu’au malaise chaque scène, à force de répétitions forcenées mais aussi de lente articulation (joint oblige !), d’épellation  soignée (de la jolie fille qui égrène les lettres de son prénom : « N-U-A-L-A » à la petite Helena qui apprend à lire : « je… saute… dans… mon…lit »), et le tout entre des blancs significatifs. Contrairement à l'image qui s'impose à nous sans qu'on la veuille, la parole, même si elle induit en erreur, est d'abord le produit d'une volonté consciente. Elle est ce par quoi nous tentons de comprendre ce qui nous arrive (ou dans le cas de Ziegler, mais aussi d'Alice, face à Bill, de lui faire comprendre ce qui lui est arrivé et mieux, ce qui aurait pu lui arriver). Elle est notre façon de signifier des choses, de poser du sens sur le  réel. En somme, même un « mensonge » est un signifiant. Après tout, qui nous dit qu’Alice ait dit la vérité sur cette non-aventure improbable avec l’officier de marine ? N’aurait-elle pas « avoué », sinon inventé, cette histoire à Bill pour créer en lui un peu de jalousie, c’est-à-dire un peu de désir ? Le problème est qu’au lieu de réagir comme il aurait dû, c’est-à-dire ouvrir les yeux sur leur couple, la regarder, elle,  et la prendre sur le tapis, il a préféré fuir dans New York et tenter des désirs qui n’étaient pas fait pour lui, comme une gigantesque et terrifiante partouze où il aura été menacé non pas tant de perdre la vie que de perdre le sens du réel. C’est l’enjeu de la fameuse scène d’explication avec Ziegler autour du billard rouge. A priori, Bill n’a pas de raison de douter de ce que lui dit Ziegler, mais qui assure que c’est vrai ? Qui nous dit que la « sauveuse » de Bill n’a pas été réellement exécutée par les libertins ?

    stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieskiMettons-nous donc un instant à la place de Bill. Voici donc une pute droguée que j’ai sauvé du coma il y a deux jours chez Ziegler, et qui, comme par hasard, réapparaît hier soir au château pour me « sauver » de ces fous, faisant mine de donner sa vie pour la mienne, lors de ce que Ziegler appelle une simple mascarade. Mais voilà que j’apprends aujourd’hui la mort d’une reine de beauté qui a tout l’air d’avoir été ma « sauveuse » de hier. Je vais la reconnaître à la morgue : c’était bien la pute d’avant-hier, mais ce n’était pas forcément ma masquée de hier – et même si Ziegler m’assure que oui, rajoutant qu’elle est morte d’une overdose, et que du reste, je l’avais moi-même prévenu, que la prochaine fois, elle ne s’en sortirait pas. La prochaine fois, c’était donc cette nuit après ma sortie du château ? Elle aurait fait son overdose après m’avoir « sauvé » ? Ce matin très tôt ? Tout cela va trop vite, s’enchaîne dans une logique apparemment imparable. Qui me dit qu’on ne lui a pas fait son overdose ? Qui me dit que ces gens ne sont pas pour de bon une bande de criminels ? J’ai peut-être échappé à la mort, ma femme aussi, mais je n’en saurais pas plus. Le réel est décidément invérifiable et la parole de Ziegler n’est là que pour  redonner un sens acceptable à ce qui m’est arrivé. Il faut que je me reconstruise sur cette parole qui n’est peut-être pas une parole juste, qui n’est juste qu’une parole mais qui peut m’aider non pas tant à voir clair dans ce qui s’est passé qu’à voir clair en moi – qui suis-je ? Que veux-je ? Qu’y a-t-il derrière mon masque ? Rien, visiblement. Masques et visages sont interchangeables. Les secrets n’ont jamais eu aucune importance – sauf peut-être pour les conspirationnistes ou les essentialistes. L’important est d’être en vie (« lucky to be alive » comme titre la première page du journal que je lis dans le café) et, comme me dira ma femme tout à l’heure, d’être « reconnaissant » (« grateful »). Reconnaissant de s’en être sortis, on ne sait trop comment. Mais c’est à cet enchantement auquel nous devons rendre grâce, elle et moi, surtout moi, d’avoir pu se retrouver, d’avoir pu rouvrir  les yeux, et d’avoir pu se dire que l’on avait encore à s’aimer, sinon pour toujours, au moins pour longtemps. Pour le reste, « nous sommes de l'étoffe dont sont faits les rêves, et notre petite vie est entourée de sommeil.»

    stanley kubrick,eyes wide shut,michel chion,leelee sobieski,les deux pigeons,amour,sexualité,adultère,libération sexuelle,théorie queerUn sommeil qui n’est pas si sombre. Au contraire, ce qui frappe dans Eyes wide shut, ce sont les couleurs vives et chaleureuses, les lampions, les guirlandes, et sauf au Château, le sapin décoré présent dans tous les lieux. Ce conte de sexe et de mort est aussi un conte de Noël, une féérie de Noël, une odyssée de Noël. Avec le temps si particulier des fêtes de fin d’année où tout semble extraordinaire, magique, « en suspens ». Temps de l’Avent. Préparations pour l’enfant à venir. Avec les parents qui sortent le soir comme au début de Peter Pan. Avec la permission accordée à Helena, leur fille de sept ans, de regarder le ballet de Casse-Noisette, programme de Noël s’il en est. Avec les cadeaux que l’on empaquète dans le salon et le beau bruit que fait le papier-cadeau. Avec le bon froid de Noël qui fait qu’on met des gants et des moumoutes. Avec le cappuccino fumant que l’on commande dans le café pour se réchauffer.  Avec le magasin de jouets qui pour un enfant est toujours le lieu d’une orgie d’amusements, et la chanson « vive le vent d’hiver » que l’on ne pourra jamais entendre sans se sentir enfant. Avec les nounours devant lesquels on dit « fuck ». Il n’a pas tort, Michel Chion, quand il affirme que ce qui est attendu dans ce « fuck », c’est à la fois une renaissance du couple, mais peut-être aussi l’annonce d’une naissance à venir. L’annonce d’un nouveau bébé qui flotterait dans l’espace. Et un petit frère pour Helena.

     

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    (Cet article a d'abord été publié en une fois sur le Ring le 23 septembre 2011)

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