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Pierre Cormary - Page 175

  • Chateaubriand / Crépu I - Esthétique du passage

     

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    Avec Gabriel Nerciat (et d'autres), en septembre 2018 sur Facebook

     

    De Chateaubriand, commence Michel Crépu dans Le Souvenir du monde, essai éblouissant de clarté, d'intelligence et de proximité avec l’auteur des Mémoires d’outre-tombe, il nous manque une photographie – soit l’image « moderne » d’un homme qui a eu vingt ans en 1789,  a vu la Terreur, a vécu les changements de paradigme les plus importants de l'Histoire de France – et les plus rapides, car entre la fin de l'Ancien Régime et la révolution de 1848, il s’est passé en une génération, la sienne, plus de choses qu'en deux mille ans : Révolution, Empire, Restauration, Monarchie de Juillet.  De Talleyrand à Monsieur Thiers, il les aura tous connus. Plus que nul autre, Chateaubriand est la croisée des chemins historiques, politiques, littéraires, constituant le point de jonction entre l'ancien et le nouveau, le passé et l'avenir – et cela jusqu’au nôtre, certaines pages des Mémoires annonçant déjà celles de Céline (l’Histoire en déroute de D’un Château l’autre).

    Comme le disait Julien Gracq dans sa célèbre préface à l’édition du Centenaire, « nous lui devons presque tout ».

    Le problème, Crépu le déplore, est que nous ne lisons plus Chateaubriand, hors quelques extraits en classe de première (enfin, de mon temps… Aujourd’hui, je ne sais pas), et pire, même quand nous le lisons, nous ne le comprenons plus. Pas assez réac comme Maistre ou Bonald, pas assez progressiste pour être un agent de la gauche libérale, irrécupérable partout et pour tous et notamment par cette engeance maudite qu'on appelle les radicaux. Car François-René est aussi cela, « le dernier des catholiques heureux », radicalement anti-radical - de cette ligne proprement enchanteresse et qui me convient à moi de plus en plus, celle qui va de Montaigne à Proust ou de Fénelon à Mauriac, à mille lieux des Bloy, Péguy et Bernanos (ce dernier d'ailleurs épinglé par Crépu, au grand dam des possédés du Grand d’Espagne, on y reviendra), « immenses écrivains, mais qui n'arrivent pas à se relâcher, à laisser venir les choses telles qu'elles sont ».

    Laisser venir les choses telles qu'elles sont. Vivre et laisser vivre, disait Schopenhauer.

    (Je fais aussi ce long post pour faire un bilan spirituel, me sentant, depuis ma chimio, de moins en moins chrétien et de plus en plus « pourceau d’Epicure » - ou quiétiste, à la Fénelon, il faudrait voir.)

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