La Dernière tentation du Christ (Martin Scorsese, 1988), Willem Dafoe (Jésus), Harvey Keitel (Judas)
« Jésus les aima jusqu'à la fin » (Osty et Trinquet)
ou
« Jésus les aima jusqu'à l'extrême » (Leloup).
Jusqu'à laver les pieds de Pierre qui s'indigne : « toi, Seigneur, me laver les pieds ! »
« Ieschoua lui répondit :
ce que je fais, tu ne le comprends pas
maintenant,
tu comprendras plus tard. »
Deux mille ans après, a-t-on enfin compris ? Pas sûr tant ce geste plus que de nous indigner nous dégoûte secrètement. Un dieu à notre service est en effet plus inquiétant sur le plan ontologique, moral et nerveux qu'un dieu qui nous demanderait de l'être au sien.
Un dieu qui nous lave nous renvoie à notre saleté existentielle. Car s’il nous lave, c'est que nous sommes des porcs, pas moins. Et il n'est pas certain que nous voulions devenir des hommes – encore moins des hommes divinisés.
« Si je ne te lave pas, tu n'auras pas
de part avec Moi »,
dit encore Ieschoua à Shîmon Petros. Celui-ci, toujours excessif, comprend enfin le truc et supplie alors son maître de le laver encore plus, « pas les pieds seulement, mais aussi les mains et la tête ! ».
Sacré Petros qui en fera toujours trop – jusqu'à se faire crucifier tête en bas à la fin.
Mais quand même, le geste reste problématique car il exige que nous le fassions à notre tour entre nous. Là-dessus, Ieschoua est formel :
« Si donc, Moi, le Seigneur et le Maître,
je vous ai lavé les pieds,
vous pouvez vous aussi laver
les pieds les uns les autres. »
Et ça, c'est une autre paire de manche.
Le lavement de pied est une exhortation à la fraternité vraie, au lait dégueu de la tendresse humaine, à l'humanité immonde – pour ne pas dire un programme social, d'entre-aide, d'accueil. dégueu. On est embêté rien que d'y penser. L'autre, berk.
« Aimez-vous les uns les autres
comme je vous ai aimés. »
Pas de doute. On y est. Dans le devoir être. Le dépassement de soi. Le social (l'enfer).