Fake, fake, fake... Défilé de fakes sur l'écran, en mots et en images, histoires réelles ou fictives qui vont se mélanger comme telles, essai cinématographique sur le faux, le beau et l'amour. Car F for Fake (ou Vérités et mensonges) est aussi la plus belle histoire d'amour vraie qui soit, celle entre l'homme le plus intelligent et la femme la plus belle du monde, Shakespeare et Aphrodite, Falstaff et Rosalinde, Orson Welles et Oja Kodar.
L'histoire d'un faussaire de génie, Elmyr de Hory, racontée par un biographe lui-même faussaire, Cifford Irving, auteur d'une fausse biographie sur Howard Hughes (le milliardaire qui influença le personnage de Citizen Kane), tous les deux mis en scène par un magicien de l'écran, Orson Welles, à partir de rushes d'un film de François Reichenbach et d'un certain Richard Drewett, Elmyr : The True Picture, diffusé par la BBC le 30 mai 1970, et aujourd'hui introuvable (sinon, qu'on me fasse signe).
Un film fait d'images pré-existantes non-utilisées (celles du docu initial de Reichenbach et Drewett et de films non achevés d'Orson Welles lui-même), d'extraits d'une médiocre SF de Fred F. Sears de 1956, Les Soucoupes volantes attaquent (mais qui rappellent La Guerre des mondes de Welles), de séquences spécialement tournées pour le film par Welles (interview de Hory à Ibiza, déjeuner plantureux avec Reichenbach et des amis au restaurant La Méditerranée, plans sur le quai de la gare d'Austerlitz, dans la maison de Welles et d'Oja Kodar à Orvilliers, de la cathédrale de Chartres, et même du Champ-de-Mars où je vais tous les jours.)
« Un film qui ne ressemble à rien, où de nouveaux rapports sont institués entre discours, fable, matériau et hors-champs », écrit Youssef Ishaghpour dans sa somme sur Orson Welles, La Caméra visible - et qui là pourrait s'appeler le montage visible tant ce film singulier, hermétique et formidablement attachant est un pur produit de montage où tout n'est que faux raccords, déformations d'images (parfois refilmées sur un autre écran et apparaissant telles l'une après l'autre sans que la continuité ne soit interrompue), confusion de sens typiquement "falstaffienne".
« La parole et le geste “falstaffiens“ devenus esthétiques du film », dit encore Ishaghpour.