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communisme - Page 2

  • Mort d'un maître

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    Comme le disait un jour Jean-Marie Le Pen, LE COMMUNISME EST UNE MACHINE A TUER. Là-dessus, tout le monde devrait être d'accord. Cent millions de morts et presque autant d'abusés et de trompés. Le pire, bien sûr, c'étaient les intellectuels de gauche de l'après-guerre qui se trompaient volontairement et qui pour certains continuent à se tromper, n'ont pas renoncé à la plus grande imposture de tous les temps et continuent à relativiser, diminuer, chinoiser (c'est le cas de le dire) avec le plus grand massacre des temps modernes. En vérité, les repentis à la François Furet et à la Stéphane Courtois sont rares. L'abjecte pensée française n'est pas éteinte et c'est l'objet de la remise en ligne de ce texte commis en 2006 (et grâce aux derniers exploits de Abdelhakim Dekhar, cet extrémiste rouge à "l'étrange profil", comme l'a titré Libération, très embêtée.)

    Alors certes, il y a en effet plusieurs types de communisme comme il y a différentes machines à tuer. Il y a des modes de communisme qui ne sont pas les mêmes. Il y a des dirigeants communistes qui ne sont pas d'accord entre eux - Staline et Mao se sont combattus, Staline a liquidé Trotski. Mais ces conflits de personne et de pouvoir n'ont jamais été idéologiques. L'essence communiste de ces trois là fut bien la même. Et l'assassinat de Trotski par Staline fut une sorte de nuit des longs couteaux individuelle. 

    J'avoue bien volontiers qu'en matière de communisme, je ne suis pas assez calé pour dire que le marxisme est forcément un marxisme-léninisme (encore que Revel dirait qu'il l'est historiquement devenu et que l'on reconnaît un arbre à ses fruits) mais ce qui est sûr c'est que tous les pays, sans exception, qui se sont réclamés de cette idéologie assassine ont tous sombré dans la dictature et le génocide. Comme le nazisme, le communisme est criminogène. Comme le nazisme, le communisme est génocidaire. Goulag et Laogaï sont au marxo-léninisme ce qu'Auschwitz est à l'hitlérisme. Là-dessus, pas de compromission ni d'excuse possibles. 

    Qu'il fut en effet soviétique, chinois, cambodgien, cubain, roumain, coréen, le communisme, tel qu'il fut pensé et accompli au XX ème siècle, reste cette gigantesque machine à tuer, à torturer, à abrutir et à ruiner."Si les communistes s'étaient installés dans le Sahara, il y aurait eu pénurie de sable au bout de trois semaines", disait excellemment Clément Rosset, le philosophe qui a toujours raison comme tous les vrais matérialistes (et qui n'a rien à voir avec le matérialisme dialectique qui fut la pire imposture de tous les temps - là-aussi, comme moi, vous signez ce propos, n'est-ce pas ? "Parce que croire que la pensée de Mao fait pousser les cacahouètes, franchement, hein ? - Ah, mais je n'ai jamais écrit cela, monsieur. Montrez-moi donc où je l'ai écrit, la page, la ligne, s'il vous plaît, il faut être sérieux un moment.. - Vous écrivez que la dialectique maoïste augmente la production dans les campagnes. - Ah mais ce n'est pas du tout la même chose !" Mais si, connasse, c'est la même chose.

    Hors mon petit apport final, l'on aura reconnu l'échange savoureux entre Simon Leys et Maria-Antonietta Macciocchi lors du passage de celui-ci dans Apostrophes en 1983 (elle, on l'a heureusement oubliée, même si sa réaction face à Leys reste typique des intellectuels de gauche dont la mauvaise foi structure la conscience). A ce propos, je fais mienne cette déclaration de Simon Leys sur ma nullité science politique. Comme lui,  "je suis un analphabète en politique", et j'ai toujours l'impression que ceux qui s'y connaissent mieux que moi sont de près ou de loin des gens qui se sont commis dans le pire ou ont été séduits. (Voyez par exemple un Olivier Rolin, ou un Jean Lacouture, ou un Alain Badiou, les intesallo ne manquent pas.) Le comble, c'est qu'ils sermonnent le plouc que je suis un peu comme les médecins de Molière parlent en latin au malade, imaginaire ou non. 

    Il est vrai que l'anticommuniste primaire, secondaire et tertiaire que je suis et qui considère que tout communiste est un chien ne leur rend pas la tâche facile.

     

     
    In memoriam, Jean-François Revel 1924 - 2006.

    On le sait, l'alcool est de droite et la drogue est de gauche. L'alcool ouvre pathologiquement à la réalité, nous la faisant voir dans sa simplicité tautologique - car même si l'on voit "double", l'on voit deux fois la même chose, comme dans la fameuse parole, d’alcoolique s'il en est, de Clément Rosset, "une fleur, je vous dis que c'est une fleur...". La drogue, au contraire, opère une déréalisation de la réalité, faisant de la fleur une femme ou une plante carnivore, souvent un pouvoir - le célèbre Flower Power et ses arrières mondes hallucinatoires. Lucy dans le ciel avec des diamants. Sous-marin rose. Banquise rouge. Paradis communiste. Eden marxiste. Opium des intellectuels. Trahison des clercs dont le premier d'entre eux, celui qui a dit que tout anticommuniste était un chien. Avec le recul, on s'aperçut que c'était plutôt le contraire : tout communiste était un chien. Enfin, "on" - quelques-uns.

    Jean-François Revel fut sans doute un grand buveur mais ne fut jamais un drogué - toute son oeuvre ayant été justement un combat contre la drogue de son temps, c'est-à-dire l'idéologie socialiste et communiste. "Idéologie" suffira car "idéologie" veut dire système plaqué sur du réel - socialisme.  Contrairement à ce que prétendent les idéologues, le libéralisme n'est pas une idéologie mais un empirisme. Le libéral est celui qui observe le réel et qui tire ensuite ses conclusions. Le jardin est conçu en fonction de la nature. L’idéologue, lui, pense le jardin avant la nature - et le plus souvent dévaste la nature. Encore Clément Rosset : « si les communistes s’étaient installés au Sahara, il y aurait eu pénurie de sable au bout de trois semaines. » On ne fait pas d’omelettes sans casser des hommes – pardon, des œufs, dira le révolutionnaire. Le problème est que non seulement l’omelette est toujours ratée (qu’on cite un pays socialiste libre et prospère) mais le nombre d’œufs cassés, pardon, d’hommes,  dépasse l’entendement. Combien déjà, Stéphane Courtois ? Quatre-vingt millions, cent millions ? Plus ? – Oui mais attention, répondent en coeur les nostalgiques du Parti et toutes les belles âmes, le communisme était à l’origine une idée généreuse, religieuse même, voulant établir l’égalité absolue sur terre, alors oui, nous avons fini par le reconnaître, le goulag fut un dévoiement malheureux et criminel, mais l’on ne saurait jeter le bébé marxo-léniniste avec l’eau du bain stalinien.

    Là-dessus, il faut tout de suite mettre les points sur les i. Le goulag ou le laogaï ne sont pas des "dérapages" malheureux d'un système "bon en soi" mais bien les produits logiques et nécessaires d'un système pourri en soi. Prétendre le contraire serait aussi obscène que de dire qu'Auschwitz est une "erreur" du nazisme. Non, Auschwitz est au nazisme ce que le goulag est au marxo-léninisme (Staline et Mao n'étant que des suiveurs zélés et même si l'histoire a voulu qu'ils se méfient l'un de l'autre.) C'est que le communisme part d'une erreur fondatrice : l'égalité à tous prix entre les hommes. Idée apparemment « généreuse » mais qui signifie non pas que tous les êtres humains naissent libres et égaux en droit, combat légitime celui-là et pour lequel se battent les hommes et les femmes de bonne volonté, mais que tous êtres humains naissent libres et égaux en désirs et en besoins. L’égalité au sens communiste est une égalité ontologique, nous allions dire physiologique, biologique, qui vise à concevoir un seul profil d’homme - un seul corps d'homme ! Celui-ci ne vivrait que selon un mode unique prédéterminé où toutes les singularités, les identités et les jugements de goûts n’auraient plus lieu d’être. Il ne serait plus un individu, lieu de tous les vices, mais un homme-ensemble, un homme collectif ou transindividuel. Le communiste, c’est celui qui dit à l’être humain : « tu n’as pas besoin de ça pour vivre heureux » et aussi « tu n’as pas besoin d'avoir ce dont n’a pas besoin l’espèce à laquelle tu appartiens pour être » et encore «  tu n’as pas besoin d’AVOIR pour ETRE. » Bien plus de gens que l’on pense fonctionnent ainsi autour de nous. Elles sont fascinantes ces créatures, communistes dans l'âme, et qui en effet n'ont pas besoin de vivre au-delà de leurs besoins et ne comprennent pas que l'on désire plus que ce que l'on a – c’est-à-dire que l’on désire. Pour eux, le nécessaire pulvérise réellement le superflu.  Jean-Jacques Rousseau était de ceux-là. Une pomme, un quignon de pain et un peu d'air pur suffisaient à son bonheur. Un saint pourrait-on dire - sauf qu'un saint se garde bien d'imposer son régime à autrui. Le saint est celui qui n'a besoin de rien mais qui laisse tout aux autres, et le fasciste, c'est le saint qui décide que sa sainteté devienne le cas de tous. Gare à celui qui tient à son humanité d'antan et à ses caprices archaïques ! On va le rééduquer contre son gré, ce salaud, le forcer à être libre, le corriger de son anthropologie - et s'il est vraiment incorrigible, donc inhumain, le liquider.

    A l’homme inégalitaire, "l'aryen", rêvé par  les nazis, répondit l’homme égalitaire rêvé par les communistes (à moins que cela ne fut le contraire). Comme ni l'un ni l'autre ne se trouvaient dans l'humanité, on décida d'opérer dans cette même humanité et d’en extirper un nouvel homme, idéal, racial chez les uns, social chez les autres, et auquel on pouvait risquer de massacrer scientifiquement tous ceux qui correspondaient le moins à celui-ci – tous ceux qui étaient moins égaux que les autres, comme aurait pu dire Orwell. Certes, pour les nazis, les juifs étaient inhumains par nature, par gènes, et par là-même n'avaient aucune chance ontologique d'en réchapper alors que pour les bolchéviques, les koulaks avaient théoriquement le droit de survivre en rendant leurs biens - quoiqu'il soit plutôt difficile de changer socialement du jour au lendemain. Si on les massacra par millions, ce ne fut pas pour des raisons génétiques mais à cause de leur refus social de s'intégrer au  nouvel ordre.  Encore que pour certains idéologues, le social, ne nous leurrons pas camarades, c'est comme le racial, c'est du biologique. "La haine de classe, écrit Gorki, doit être cultivée par les répulsions organiques à l'égard de l'ennemi, en tant qu'être inférieur, un dégénéré sur le plan physique, mais aussi moral." C'est Revel qui souligne dans La grande parade - Essai sur la survie de l'utopie socialiste (Plon 2000), l'un de ses derniers grands livres.

    A l'époque, l’auteur de La tentation totalitaire était déjà vieux et c'est pourquoi ses adversaires laissèrent sans sourciller le livre faire sa carrière (brillante - mais auprès du lectorat habituel). On n'allait pas discuter avec ce vieux lutteur. C'aurait été d'une part se ridiculiser stylistiquement mais d'autre part ç'aurait été stigmatiser des analyses pénétrantes et somme toute scandaleuses au vu du terrorisme intellectuel qui régnait alors (et continue de régner, n'en déplaise aux Consanguins et à Mithqal) et subséquemment leur faire trop de publicité. Car ce que montre entre autre cette Grande Parade est la consanguinité du nazisme et du communisme - la seule différence véritable résidant dans le traitement médiatique et intellectuel qu’on fit et qu'on continue à faire d’eux. A l'hypermnésie militante du premier, l'amnésie stratégique du second. Aux procès de Nuremberg jamais finis de l'un, les non-lieux renouvelables à l’infini de l'autre, accordés place du Général Fabien ou boulevard Saint Germain. Ce qu'il fallait, c'était préserver à tous prix la croyance la plus durable et la plus terrifiante (celle de Roger Hanin comme de Pierre Bourdieu) dans les bonnes intentions du socialisme - et c'est pourquoi il fallait s'écraser. Tant pis, le livre passerait, Revel finirait par mourir d'une indigestion, et Jean Ziegler pourrait enfin parader à son aise.

    Quatre-vingt millions de morts estime-t-on entre Lénine, Staline, Mao, Pol Pot, Ceauscescu et, ne les oublions jamais, Castro et Guevara. Mais combien en esprits ? Au moins autant. Sartre, Beauvoir, Althusser, c'est entendu, mais aussi Bourdieu et Danielle Sallenave,  Daniel Ben Saïd et Régis Debray, Jean Lacouture et Serge Halimi, Eric Hobsbawm et tant d'autres auxquels on pourrait rajouter les veuves Torez et Mitterrand, soit ce que Dantec appelle "le plus bas niveau" à la page 74 de son Théâtre des Opérations II. "Le plus haut" sera occupé par Harold Pinter, Peter Handke, Günter Grass et Noam Chomsky, dit encore l'écrivain barbouze quoique rajoutant qu'un véritable artiste chute d'autant plus quand il se commet avec la plus grande horreur du siècle passé - ce qui n'était peut-être pas une raison pour aller, lui, Dantec, flirter avec un blog, heu, un bloc identitaire. Pour autant, ce qu'a prouvé cette histoire (et désolé d'y venir deux ans après), c'est qu'un écrivain-barbouze qui joue à touche pipi avec trois connards et un rasé aura plus de problèmes qu'un autre allant s'enspermer à l'action directe ou aux brigades rouges. Un César Battisti reste plus sexy qu'un Maxime Brunerie et les plus en vue des intellectuels et des politiques peuvent faire l'éloge du premier, dire de lui qu'il est un "combattant de la liberté", sans que cela n'émeuve personne. Ces choses-là sont connues - tellement connues d'ailleurs qu'on ne compte plus ces milliers d’enseignants, d’éducateurs, de secrétaires à la culture, ou de directeurs de théâtre (Peter Handke privé de Comédie Française, mais pas Brecht), autant de "négationnistes rouges" comme les appelait Revel, qui n'ont de cesse de pourrir la pensée européenne depuis des décennies, faisant tout pour que le communisme n'apparaisse pas dans ce qu'il est avant toutes choses - criminogène. Comme le rappelait encore Georges Steiner le huit juin dernier à la BNF, la France est encore le pays le plus atteint tant d’ex-adorateurs de Staline et de Marx (il ne faut jamais se lasser de redire que Joseph est comme Wladimir l'exécuteur testamentaire de Karl et non du tout ses enfants indignes) tiennent encore et toujours les rennes du pouvoir culturel.

    "Mais Revel va plus loin, écrit encore Dantec, page 78, il ose enfin enfreindre une règle fondamentale et tacite que même le sinistre tchékiste Gayssot n'a pu transcrire dans le texte : celle qui stipule qu’Il est interdit de démontrer (par la simple analyse des textes et des citations in extenso) que les principes de l'extermination ethnique sont promus en tant que tels dans les textes de Proudhon, de Marx, d'Engels, et bien sûr de Lénine, qu'Il est interdit d'affirmer que le socialisme est dans ses fondements mêmes - l'égalitarisme petit-bourgeois se sublimant en messianisme prolétarien - une abomination de l'esprit, une pure monstruosité invivable dont l'absurde mise en pratique - dans ce "socialisme réel"  qu'il convient de ne critiquer que du bout des lèvres - ne résulte certes pas d'une quelconque perversion exogène qui l'aurait fait sournoisement changer de route au cours du processus révolutionnaire, non, mais bien au contraire du fait qu'il recèle dans ses principes fondateurs une authentique maladie née de la Révolution bourgeoise et qui entendait sublimer le corps social tout entier pour le compte d'une utopie égalitaire." On pensera ce que l'on voudra de Dantec. Ce qui est sûr, c'est que ce fut l’un des rares à avoir accueilli convenablement La grande parade. Et à partager l'indignation de Revel devant l'auto-amnistie des anciens rouges. Au lieu de profiter de la chute du mur de Berlin pour en finir une bonne fois pour toutes avec le communisme en traînant, même de manière symbolique,  celui-ci devant son tribunal de Nuremberg, "l'époque" préféra s'en prendre au libéralisme - accusé de les maux, coupable de toutes les horreurs,  et contre lequel on fut sommé de reconnaître que la grandeur du communisme consistait au moins à avoir "lutté" contre lui. Qu’importe que nos donneurs de leçons aient, selon l’expression définitive de Revel, « du sang sur le stylo », l’important pour eux, était de cacher à tout prix leurs anciens fourvoiements en tentant de prouver que le mal absolu, ce n'était pas le collectivisme et ses camps de rééducation mais bien le marché et Jean-Pierre Gaillard. Tant pis pour notre prospérité  qui n'était rien d'autre qu'une atroce indignité et pour nos libertés, d'honteux privilèges qu'il conviendrait d'abolir un jour. Et pour ce faire, ne pas hésiter à revenir au « véritable » Marx. Autrement dit, revenir une fois de plus aux sacro-saintes bonnes intentions du marxisme au détriment de la praxis – sans se rendre compte que pour Marx, c’est précisément la praxis qui juge de l’idéal et non le contraire. Mais non ! Le "vrai" communisme doit être vierge de tout ce dont se sont rendus coupables des systèmes inspirés... du communisme. « Selon cette argumentation, l’horreur des conséquences prouve l’excellence du principe. » dit Revel.

    Et puis comment se passer d’une idéologie aussi sentimentale que celle-ci, qui a fait que des milliers de gens se sont trompés mais ont été heureux de se tromper ? Ah la nostalgie de l’erreur ! Le sang qu’on a fait couler est moins abondant que ces larmes d’espoir qui ont coulé sur nos joues… Et Revel de citer l’effarante Lily Marcou qui plaide pour les « imbéciles » qu’ils ont été, mais « des imbéciles à qui je voue une grande tendresse : ils ont eu foi, ils se sont battus, avec et pour cette foi, et ils se sont trompés ; mais au moins leur engagement était porteur d’une générosité et d’un altruisme qui n’existent plus dans cette fin de siècle… » ou Danielle Sallenave qui pleure dans un article intitulé «   Fin du communisme : l’hiver des âmes » (Les temps modernes, mars 92), non les âmes mortes que le communisme a expédiées par dizaine de millions dans les airs bien sûr, mais les âmes meurtries des compagnons de gauche qui ne savent plus où est passé leur idéal de paradis sur terre. Alors ils vont chercher un peu d’espoir en Corée du Nord ou à Cuba comme Danielle Mitterrand, histoire de s’arracher à l’enfer libéral qui ne sait créer que de l’inégalité et de l’obésité.

    Mais enfin, quel est le credo de ces gauchistes ? Qu’est-ce qui fait que l’on puisse être sincèrement attiré par une idéologie qui provoqua la plus grande hécatombe de l'histoire ? D'où vient cette envie incompréhensible d'avoir un portrait du Che Guevara sur son tee-shirt - d'un homme qui a fait exécuter des cubains par milliers ? Quelle est donc la différence affective entre le totalitarisme brun et le totalitarisme rouge ? Chacun de nous s'est un jour posé cette question. Mon semblant de réponse serait que si le nazisme relève d'un mal absolu, trop transparent pour être séduisant, le communisme relèverait d'un "mauvais bien", c'est-à-dire d'un mal qui se penserait bon, ou d'une malédiction qui se serait persuadée d'être une bénédiction - et qui par conséquent pourrait encore et toujours séduire les bonnes âmes. Comme le dit, plus clairement que moi, Revel, "s’il n’y a pas de « déçus du nazisme », c’est parce que le nazisme vend la mèche dès le départ [alors que] le communisme cache sa nature derrière son utopie. Il permet d’assouvir l’appétit de domination ou de servitude sous couvert de générosité et d’amour de la liberté ; l’inégalité sous couvert d’égalitarisme, le mensonge sous couvert de sincérité. Le totalitarisme le plus efficace, donc, le seul présentable, le plus durable, fut celui qui accomplit non pas le Mal au nom du Mal, mais le Mal au nom du Bien. C’est aussi ce qui le rend encore moins excusable que l’autre, car sa duplicité lui a permis d’abuser des millions de braves gens qui ont cru en ses promesses. » Le Mal au nom du Bien - la voilà la "métaphysique" communiste. Et la voilà la raison qui a fait que des millions d'hommes ont été et seront encore séduits par cette machine à tuer qu'on appelle le marxo-léninisme. Au moins l’hitlérisme était-il transparent et ne mentait-il à personne. Son amoralité fondamentale outrepassait trop le bon sens et la raison. Et c’est pourquoi il fut si rapidement vaincu. Irrationnel, irrécupérable, aberrant, pathologique, l’hitlérisme serait presqu'une caricature du démon si le démon n'était pas précisément celui qui nie tout et lui-même pour finir - et qui dans le cas qui nous intéresse va même jusqu'à déclarer la guerre à son allié rouge et de fait le « sauve » aux yeux  de ses adorateurs - ne jamais oublier que la grande chance de Staline fut d’avoir été trahi par Hitler ! Aujourd'hui, on le considère à juste titre comme l’événement le plus meurtrier et le plus obscène du siècle passé, mais un événement qui a été jugé et condamné depuis soixante ans. Alors qu'on attend encore un Nuremberg du communisme.  Alors, certes, celui-ci est en voie de disparition et il ne sera a priori pas le combat du XXIème siècle. Il n'empêche qu'il continue encore de dévaster certains pays et n’en finit pas, dans des formes nouvelles, métastases d’extrême gauche, altermondialistes, écologistes, ultra-gauche (parfois teinté d’islamisme), d’apparaître comme une « alternative » au monde actuel. On enferme, on aliène, on tue et on torture encore aujourd'hui au nom du communisme et dans nos pays, de "grands esprits" s'en réclament encore sans honte et sans pudeur.

    Au fond, ce qui n'aura cessé d'étonner et d'indigner Jean-François Revel qui était, il est vrai, l'esprit le moins supersititeux du monde, est que la superstition conduise le monde  autant que la vérité.  Que ce qui n'est pas mette au pas ce qui est  aura été le point de départ et d'achoppement de sa pensée. On serait tenté de dire que si la tentation totalitaire fut par lui analysée mieux que personne, il ne put jamais intérieurement la comprendre. Le mal politique  dont il s'occupa toute sa vie ne releva jamais d'un mal plus profond, métaphysique ou satanique. A ses yeux, cela aurait été passer de l'analyse politique à la pensée magique. Sans doute lui manquait-il la candeur, cette caractéristique humaine qui va toujours de pair avec la cruauté. Le mal effectif suffisait à sa réflexion. Et peut-être est-ce dans cette limite que réside sa noblesse.

    PS : En y repensant, il est fort possible, finalement, qu'il y ait, un de ces jours, "un Nuremberg du communisme" - non pas tant par exigence de lucidité que par déni perpétuel du passé. A notre époque où l'on a de cesse de condamner des événements qui se sont passés il y a cent, deux-cent, ou cinq cent ans (voire le bilan absolument "négatif" de la colonisation, ou les crimes de Christophe Colomb découvrant l'Amérique), on finira bien par s'en prendre à Lénine. Le seul hic est qu'il n'est pas sûr que nos clones comprennent très bien le sens de ce subit anti-léninisme...

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