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Pierre Cormary - Page 82

  • Deux ou trois choses que je commence à comprendre du protestantisme II - La foi insoumise

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    Donc, le catholicisme, c’est de penser : « même si je ne le sens pas, cela doit être ça et tant pis si cela me fait mal, c’est un bien que je ne comprends pas encore. Il faut souffrir pour être sauvé ». Alors que le protestantisme suggère : « si je ne le sens pas, c’est que cela ne doit pas être ça, cherchons donc le vrai bien qui me fera du bien. Il faut être heureux pour être sauvé ».

    Le protestantisme comme thérapie. Les cathos en font des gorges chaudes alors qu'ils devraient en prendre de la graine. Le « born again » n'a pas bonne presse (à cause de Bush, des évangélistes américains, des fous furieux de Dieu qu'on trouve aussi dans les sectes néo-protestantes - d'ailleurs rejetées par l'Eglise réformée) alors qu'il n'y a pas plus chrétien. Ressusciter au présent. Renaître. Se reprendre - ou plutôt, être repris (coucou, Kierkegaard !). Croire pour être heureux. Le Deutéronome n'arrête pas de le dire : la loi est là « afin que vous soyez heureux ».

    Luther l'affirmait comme tel. James Ellroy dans Ma part d'ombre, aussi :

    « Sois sobre [charité], aie confiance en Dieu [foi] et baise [espérance]». 

    Le protestantisme comme thérapie et théodicée (je vais beaucoup me répéter dans ce cycle.)

    La prédestination comme apocatastase personnelle.

     Que l’enfer ne dépende plus de moi, voilà la véritable libération. 

    Luther ou l'antidote - l'anti-Dante.

    Sola gratia mais aussi sola fide - « car dans la foi, j’ai mis tout en abrégé. »

    La foi comme confiance.

    La charité comme culture du sujet, approbation de l’être, ouverture à l’autre. La charité comme oui à l'autre.

    L'espérance comme insouciance.  L'espérance insouciante. Le salut insouciant.

    Dieu non plus comme une échelle barbelée mais comme un ascenseur ou un escalator qui vient à vous (échelle de Jacob) et qui remonte avec vous.

    Dans le protestantisme, Dieu fait du bien, élève au bien, donne du bien – et cela parce que tout est bénévole, gratuit, innocent. Il n'y a pas de donnant-donnant. Il n'y a pas l'horrible « je te sauve à la condition que... » catholique. « Non, aie confiance en moi et je pourvoirai à tout. »

    Dieu en direct et en tout (désir, intérêt, passion). Dieu qui m'apprend à voir le bien dans tout ce que je veux (faire). Dieu qui fait aimer le bien plutôt que craindre le mal. Dieu qui délie du mal, décloue de la crainte et donne à approuver. 

    Comment ne pas être protestant ? 

    Semaine sainte 1996 (26 ans) - je me reconvertissais au catholicisme après le plus sale moment de ma vie. 

    17 décembre 2020, vers une heure trente du matin, après une crise d'angoisse, je me découvre luthérien (bon, cela couvait depuis longtemps, depuis toujours en fait - depuis Kierkegaard, Pascal et mon pseudo internet : "montalte@aol.com")

    24 janvier 2021 - premier office protestant à l'Oratoire du Louvre (et pour une prédication sur l'unité des chrétiens faite par... un prêtre catholique ! Je ne pouvais rêver meilleur passage.)

    28 février 2021 - première communion (c'est le cas de le dire) luthérienne à la paroisse Saint-Jean de Grenelle avec le pasteur Jean-François Breyne... à deux pas de chez ma chère (et très orthodoxe) Aurora qui devait mourir dans la nuit du 14 au 15 mars à l'âge de 89 ans. D'une rencontre capitale l'autre.

     

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