Raphaël Tisserand nous touche. Ne pas avoir accès au sexe des femmes parce qu’on est gros, timide ou maladroit, ou qu’on ne sait y faire, a de toute éternité été le drame de l’homme mais l’est devenu tout particulièrement dans nos sociétés libérales où les désirs sont laissés à l’effort de chacun, autrement dit aux plus forts et aux plus riches – alors que jusqu’à une période relativement récente, la société avait tellement conscience des difficultés que représentait une relation sexuelle classique qu’elle organisait celle-ci à travers le mariage et la prostitution, deux manières qui permettaient aux plus humbles et aux plus laids d’arriver à leurs fins. Normalisé, organisé, « vénalisé », le coït devenait possible pour tous. C’est depuis que le « devoir conjugal » est devenu un désir individuel que la fracture sexuelle a eu lieu entre les « grands fauves » et les batraciens. Nous sommes plus nombreux qu’on le croit à regretter le stupide XIX ème siècle.
De plus, et contrairement aux fadaises du « nouvel homme féminin » dont on nous flagelle les testicules, l’un des grands problèmes de l’homme moderne, c’est de ne pas être assez bestial. Comme le dira le Bruno des Particules :
« En un mot je ne suis pas assez naturel, c’est-à-dire pas assez animal – et il s’agit là d’une tare irrémédiable : quoi que je dise, quoi que je fasse, quoi que j’achète, je ne parviendrai jamais à surmonter ce handicap, car il a toute la violence d’un handicap naturel. »
Ne l’oubliez jamais, les femmes n’aiment pas les hommes qui veulent qu’on les embrasse. Les femmes méprisent les hommes doux et féminins. L’homme qui ne fonctionne pas bien sexuellement n’aura aucune chance jamais de se faire aimer. Car c’est le sexe qui précède l’amour, le permet, non le contraire. Sans couilles, le coeur n’est rien. Bat à vide. Les femmes se détournent de l’homme qui ne peut pas – ou trop mal. Éventuellement, s’il écrit, elles le lisent. Autre façon de retrouver l’amour.
« Je ne souhaite pas être aimé malgré ce que j’ai de pire, mais en raison de ce que j’ai de pire, je vais jusqu’à souhaiter que ce que j’ai de pire soit ce que l’on préfère en moi », confiait Houellebecq à BHL dans leur livre commun, passionnant et mal-aimé, Ennemis publics.