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sexisme

  • Récitons-le une dernière fois....

    Mignonne, allons voir si la rose
    Qui ce matin avait déclose
    Sa robe de pourpre au soleil,
    A point perdu cette vêprée,
    Les plis de sa robe pourprée,
    Et son teint au vôtre pareil.

    Las ! Voyez comme en peu d'espace,
    Mignonne, elle a dessus la place,
    Las, las ! Ses beautés laissé choir !
    Ô vraiment marâtre Nature,
    Puis qu'une telle fleur ne dure
    Que du matin jusques au soir !

    Donc, si vous me croyez, mignonne,
    Tandis que votre âge fleuronne
    En sa verte nouveauté,
    Cueillez, cueillez votre jeunesse
    Comme à cette fleur, la vieillesse
    Fera ternir votre beauté.

     

    Rapport de la Halde.jpgOui, car comme vous n'êtes pas censés l'ignorer, ce poème de Ronsard apparaît enfin comme ce qu'il est - un concentré de racisme social et sexiste véhiculant les stéréotypes les plus éculés et les plus nauséeux sur les seniors et les femmes. C'est un rapport de la Halde qui l'affirme - la Halde : Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité, et comme toutes les ligues de vertus, le plus beau repaire d'enculés qui soit. Je suis vulgaire ? Oh mais avec ces gens-là, on a le devoir de l'être. Daté du 6 novembre 2008 et intitulé sans rire "Place des stéréotypes et discriminations dans les manuels scolaires", ce rapport "citoyen" stigmatise tout ce que la littérature peut contenir de messages racistes, homophobes, anti-féministes, anti-minoritaires, tout ce qui, selon lui,  porte atteinte à la dignité humaine, offense une communauté,  dégrade la personne, fait de la peine à quelqu'un. Autant dire toute la littérature - citez-moi donc un auteur qui ne tombe sous le coup de la guillotine haldienne. Non que la littérature soit raciste, sexiste et homophobe en soi, grands dieux, non (sauf peut-être celle, génialissime, de Hergé et de ses Aventures de Tintin), mais la littérature est ce qui s'est toujours écrit contre son époque, ses moeurs, sa morale. De Rabelais à Céline, de La Fontaine à Balzac, de Molière à Ionesco, de Chrétien de Troyes à Proust, de Villon à Baudelaire, la littérature a toujours été une critique de la culture de son temps - une critique du pouvoir culturel plus que du pouvoir politique, soit dit en passant (Molière contre les clercs et non contre le roi). Pour ceux qui veulent un monde où tout écart, toute asymétrie, tout conflit soient abolis, la littérature est le premier déni d'opinion. Et c'est pourquoi écrivains  et philosophes ont  si souvent été accusés de corrompre la jeunesse, de désespérer Billancourt, de donner le mauvais exemple, de ne pas aller dans le sens du social, de se foutre du progrès, de n'avoir toujours qu'une vision noire du présent, et souvent terrifiante de l'avenir.

    Philippe Muray l'avait prédit. Le temps où la phrase de Sade, « il n’est point d’homme qui ne veuille être despote quand il bande », ne sera plus comprise, n'est pas si loin.

    Les arts plastiques ne sont d'ailleurs pas en reste. La peinture se révèle même pour un féministe conséquent comme le premier lieu du sexisme et de la pornographie. Car la femme-objet, ce n'est pas simplement Zara Whites, c'est d'abord et avant tout la Maja  nue de Goya, la Vénus d'Urbino du Titien, les Baigneuses de Renoir et de Cézanne, les Demoiselles d'Avignon de Picasso, sans oublier L'origine du Monde de Courbet, choquant autant par son sujet que par son titre - j'en vois, tous les jours, moi, de ces bonnes femmes féministes qui font la grimace quand elles lisent "origine du monde" sur le cartel à côté du tableau, leur sourire ironique à ce moment-là, leur déplorable agacement, les pensées imbéciles et puritaines qui leur passent par la tête - "nous ne sommes pas des origynes, quand même !" Je fais un procès d'intention ? Oui, et alors ?

    Donc, la Halde se propose de réviser les manuels scolaires, qu'ils soient littéraires, linguistiques ou scientifiques.

    Waylon Smithers 2.jpgEt d'abord éradiquer l'odieux "modèle hétérosexiste" qui fait oublier qu'il y a d'autres formes d'amour que celui-ci, et que, comme vont le dire désormais des commandos gays dans les écoles,  l'important dans l'amour, ce n'est ni le sexe ni l'âge ni les opinions politiques, mais.... l'amour tout simplement. Il est donc déplorable de constater qu'on n'évoque jamais les amours homosexuelles dans les manuels de littérature (ou sans doute de manière trop caricaturale comme chez Proust), ni même les comportements homosexuels de certains animaux dans les manuels de biologie. Car écrire dans un manuel de Science Naturelle (ou de SVT, "science Vie Terre" , comme on dit maintenant) que "le rat est attiré par la rate en chaleur" (SVT section Terminale S, édition Bordas), ou que "les grillons mâles attirent leurs femelles par leur chant", ou que  "les mammifères femelles en période ovulatoire recherchent et acceptent les mâles" (SVT 4e éditions Nathan, 2007)  revient à envisager "l’attirance pour le sexe opposé [comme] unique conduite envisagée" - et à oublier que l'homosexualité existe aussi dans le monde animal (quoiqu'en période de surpeuplement), notamment chez les rats, comme l'avait bien montré la bioprogressiste Anne Fausto-Sterling. Ben voyons !

    L'on note aussi, page 85, qu' "au niveau des exercices de mathématiques, le groupe des femmes n’apparaît que dans 30% des exercices. Viennent ensuite les seniors (2,5%), les minorités visibles (2%). Aucun exercice des 359 analysés n’évoque l’homosexualité ou le handicap." Indigne théorème de Thalès ! Homophobe trigonométrie !

    De toutes façons, comment combattre l'homophobie avec des manuels qui ne parlent jamais d'homosexualité ? « Concernant l’orientation sexuelle, nous avions choisi les mots-clefs suivants : "orientation sexuelle", "homosexualité/el(le)s", "lesbienne", "bisexuel" et "homophobie". Ces termes n'apparaissent nulle part dans les programmes », dénoncent, triomphants, les auteurs du rapport. Au contraire, les représentations « hétérosexistes » , pour ne pas dire "hétérofascistes", abondent, et choquent nos vigilants chéris. Dans un manuel d'anglais de seconde, on montre l'image d'un jeune homme aspirant « au mariage avec une femme et à une famille hétéroparentale » ; dans un autre manuel de 6ème, "un petit garçon aime une petite fille blonde" ; dans un livre de terminale, enfin,  est représenté "un globe terrestre sur lequel des familles composées d’un père, d’une mère et de deux enfants circulent en caddies de supermarché". Autant d’images scandaleusement discriminatoires pour nos clercs en colère et qui participent, disent-ils, à l'inégalitarisme ambiant.

    gros degueulasse.jpgEvidemment, il n'y a pas que les gays qui soient victimes de discriminations. Il y aussi les femmes, les noirs, les arabes, les handicapés (ces derniers que l'on évoque toujours que par rapport à leur handicap... ou non, la Halde ayant la possibilité de punir et ceux qui ne voient dans les handicapés que des handicapés et ceux qui ne voient pas que les handicapés sont avant tout des handicapés !), sans oublier les vieux, pardon, les seniors. En fait, tout le monde peut être victime de discrimination, c'est cela qui est chouette à notre époque ! Il suffit même de taper "Halde" sur Google pour tomber sur son cahier de doléance - "êtes-vous victime ?". Ben oui, je suis victime. Je suis gros, je suis blond, je porte des lunettes, j'ai une drôle de gueule,  je suis timide avec les filles, je me suis dépucelé hyper tard (et encore j'en suis pas sûr), je fais caca tout le temps, je lis Sade toute la journée mais ça veut rien dire, j'suis un peu alcoolo aussi, mais j'adore les gousses d'ail cru. Et de l'ail, y en a jamais à la cantine du musée, sauf parfois dans la sauce tartare, et encore y a pas assez de sauce, et là, moi, je me sens rejeté par la direction, le ministère, la culture, et par le tableau de Courbet lui-même, tiens !  Alors, ma vie est méga dure, mais je ne fais rien pour l'arranger, car j'ai ma dignité et  je pense que ce n'est pas à moi de le faire, mais à l'Etat, à la Sécu, à la Halde,  à SOS obèses, à mon psy, à mon curé, à Zara Whites, à tout le monde, mais pas à moi. Et m'abandonner à mon propre fonctionnement discriminatoire, c'est franchement discriminant ! Alors, moi aussi, je CRIe ma douleur.

    A la Halde, ils sont pour les cris et les hurlements. "Tu es contre la discrimination ? éCRIs-le haut et fort !", éructe un panneau en haut à gauche de leur page d'accueil. On croit rêver. Un jour, on lira : "Tu es contre la souffrance dans la vie ? Tu es contre le mal sur terre ? Alors rejoins-nous , camarade, et participe à notre lutte - contre le négatif dans la pensée, le langage et l'existence." Et pour commencer, participe au concours de "lyrics anti-discrimination", whou !

    Bref, ce que l'on pensait réservé aux Etats-Unis (l'interdiction de Michel Ange aux mineurs, la réécriture "citoyenne" des contes de fées, la suppression pure et simple de dessins animés de Tex Avery coupables de témoigner d'un racisme passé, la méfiance systématisée vis-à-vis des chefs-d'oeuvres du passé, que l'on charge de tous les péchés du monde, et le refus, tout démocratique, de la haute culture) fait son apparition en France. Et ce n'est pas tant Sade et Lautréamont qui sont visés que Ronsard, l'auteur du poème le plus récité depuis des siècles par les écoliers français.

    Attention, ça ne rigole pas !

    "Le poème de Ronsard Mignonne allons voir si la rose, notent nos amoureux de l'équité en littérature,  est étudié par tous les élèves. Toutefois, ce texte véhicule une image somme toute très négative des séniors. Il serait intéressant de pouvoir mesurer combien de textes proposés aux élèves présentent ce type de stéréotypes, et chercher d'autres textes présentant une image plus positive des seniors pour contrebalancer ces stéréotypes".

    Au moins, c'est franc. Il s'agit de  CONTREBALANCER RONSARD. Un vrai professeur se doit de trouver un texte plus intéressant que celui-ci, sinon mieux écrit (ils ne le disent pas mais on sent qu'ils le pensent - oui, je sais, mon procès d'intention !), et qui nous montre que les femmes âgées ne sont pas sont simplement des "roses" qui se "ternissent", deux termes insupportablement sexistes quand on y pense, mais de responsables grands-mères qui ont encore un rôle actif et citoyen à tenir dans le paysage social.

    HanselundGretel-large.jpgEt puis, excusez-nous, mais rappeler à des seniors qu'ils vont mourir, n'est-ce pas là le comble de la muflerie poétique ? D'ailleurs, la mort, le temps qui passe,  la poussière qui redevient poussière, on sait que ça existe, ce n'est donc pas la peine d'en remettre une couche. Même des photos représentant des retraités sur la promenade des anglais à Nice sont dévalorisantes, voire traumatisantes pour ces derniers (dommage pour moi qui me serais bien vu finir mes jours assis sur un banc face à la baie des Anges !) Enfin, n'est-il pas répugnant de toujours  représenter la sorcière de Hansel et Gretel sous la forme d'une vieille dame ? Et qui rappelle aussi la méchante fée de Blanche-Neige de sinistre mémoire ? Le senior sentirait-il donc toujours le sapin ou le poison ?

    Et c'est pour cela qu'au fond ce rapport ne va pas assez loin. Ce qu'il faudrait, c'est stigmatiser tous les textes qui depuis Horace font l'apologie de la mort avec tout ce que cela comporte en angoisse existentielle. Car la mort, à notre époque, c'est ce qui doit être combattue... La mort, c'est la suprême discrimination. Et nous, c'est comme ça qu'on fonctionne à la Halde : moins on montrera des filles à poil (Rubens, Titien, Modigliani), moins y aura de viols ; moins on parlera de la mort aux gens (Platon, Pascal, Ronsard), moins ils  mourront, c'est logique , c'est citoyen, c'est anti-raciste. Car la mort, comme chante Fouad, ça ne passe pas et ça ne paye rien ! Ha !

    Place, donc, à la vraie poésie :

    Concours de lyrics contre les discriminations

    Le texte de la chanson gagnante
    Le texte de Fouad, 13 ans, le gagnant du concours de lyrics

    (à écouter ici, comme ça on peut suivre)


    La discrimination tu peux la voir à chaque coin de ruelle
    De peau, de poids, l’Handicap c’est vraiment cruel !
    On t’met à l’écart à cause de ta différence
    Mais dis-moi où est passé l’égalité des chances ?
    Nous sommes en France mais il y a partout des ethnies
    Quitte à croire que nos différences peuvent nous rendre ennemis.
    Aveuglé… par le physique d’une personne
    Comment peut-on juger alors qu’on connaît pas la personne.


    Refrain :

    A partir d'une page tu peux pas raconter une histoire
    A partir d'un geste tu peux faire renaitre l'espoir
    Afin que l’on puisse avancer : faisons un Pas !
    Essayons, essayons… pourquoi pas !

    A partir d'une page tu peux pas raconter une histoire
    A partir d'un geste tu peux faire renaitre l'espoir
    Afin que l’on puisse avancer faisons un Pas !
    Essayons, essayons… pourquoi pas ?!

    Pour moi : ca ne passe pas.
    Pour toi : ca ne passe pas.
    Pour moi : ca ne paie pas.
    Pour toi : ca ne paie pas.

    Toi-moi… maigre-gros [me voilà]… blanc-noir…..

    A partir d'une page tu peux pas raconter une histoire
    A partir d'un geste tu peux faire renaitre l'espoir
    Avançons, pour que l’humanité fasse un pas
    Essayons d’accepter ceux qu’on connaît pas.

    A partir d'une page tu peux pas raconter une histoire
    A partir d'un geste tu peux faire renaitre l'espoir
    Afin que l’on puisse avancer faisons un Pas !
    Essayons, essayons… pourquoi pas ?!

    A partir d'une page tu peux pas raconter une histoire
    A partir d'un geste tu peux faire renaitre l'espoir
    Afin que l’on puisse avancer faisons un Pas !
    Essayons, essayons… pourquoi pas ?!

    A partir d'une page tu peux pas raconter une histoire
    A partir d'un geste tu peux faire renaitre l'espoir
    Afin que l’on puisse avancer faisons un Pas !
    Essayons, essayons… pourquoi pas ?!

    A partir d'une page tu peux pas raconter une histoire
    A partir d'un geste tu peux faire renaitre l'espoir
    Afin que l’on puisse avancer faisons un Pas !
    Essayons, essayons… pourquoi pas ?!

    La Halde et son collège.jpg
    Le collège de la Halde et ses férus de belles-lettres : - Et maintenant, Bodelère !
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